The Young Lady, film du Royaume Uni de William Oldroyd – 89’
L’année dernière en 2016, nous avons fêté, si l’on peut dire, le 400ème anniversaire de la mort de William Shakespeare (1564-1616). Du grand Will, nous avons hérité d’une bonne trentaine de pièce de théâtre dont un Macbeth, la pièce écossaise comme la nomment les acteurs anglais par superstition : elle aurait porté malheur à nombre d’acteurs. Mais avec « Macbeth », l’homme de guerre, devenu roi, il y a sa femme, son inspiratrice maléfique : Lady Macbeth. C’est le titre original de ce long métrage à la durée « sage » : 89 minutes.
La pièce matricielle du barde William Shakespeare a eu une nombreuse descendance, tant littéraire que cinématographique (Orson Welles, Andrzej Wajda, Roman Polanski, etc.). Ici, le scénario est adapté du livre russe de Nikolaï Leskov, « Lady Macbeth du district de Mtsensk ». En 1936, le compositeur Dimitri Chostakovitch en fit un opéra homonyme qui lui valut les foudres de Staline, un long article dans la « Pravda » dénonçant sa musique « formaliste-petite bourgeoise », et une disgrâce qui faillit lui coûter la vie. La malédiction de la « pièce écossaise » perdura sous des cieux peu cléments…
Ici, l’action a été transposée en Angleterre en 1965 : une jeune femme Katherine (Florence Pugh) épouse sans amour un homme plus âgé, Alexander (Paul Hilton), qui ne s’intéresse guère à elle, souvent absent, et vit sous la férule de son père, personnage odieux. Katherine semble s’étioler dans cet univers glacial, d’une sourde violence en compagnie d’une servante noire dévouée, Anna (Naomi Ackie). Elle tombe amoureuse de son palefrenier, Sébastian (Cosmos Jarvis), personnage fruste lui aussi, mais doté dans cet univers sans amour, d’un fort pouvoir érotique. Le mécanisme dramatique est ainsi remonté, et la deuxième partie du film nous réserve quelques surprises.
C’est la première réalisation de William Oldroyd issu de la Royale Shakespeare Compagny (toujours le grand Will !) et la maîtrise dont il fait preuve, direction d’acteurs, cadrage, rythme des scènes, est étonnante. Malgré un faible budget (580.000 € !) il a su en décors naturels minimalistes par une mise en scène astucieuse (plans fixes aux cadrages géométriques, quelques plans séquences) nous rendre « palpable » cette terrible histoire à la manière d’un théâtre de la cruauté. A noter le travail du chef opérateur Ari Wegner qui, avec une caméra numérique, réussit à maintenir un chromatisme en concordance avec le déroulement des scènes (couleurs froides, couleurs chaudes).
Ce jeune metteur en scène anglais est à suivre tant il fait preuve, pour son premier opus, d’ingéniosité cinématographique malgré les contraintes qui lui sont imposées (budget, rapidité du tournage). Il est vrai qu’il dirige d’excellents acteurs (école anglaise !)
Jean-Louis Requena