Contrairement à nos chroniques habituelles qui font état de la sortie d’un film, il s’agit cette semaine de relayer un vœu qui a pris naissance Outre-Bidassoa sous forme d’une pétition : il s’agit de consacrer un film à Blas de Lezo, ce marin basque qui avait empêché l’Amérique du Sud de tomber aux mains des Anglais au XVIIIe siècle.
Un film qui, de l’avis des pétitionnaires pourrait bien dépasser les meilleurs tournages connus tels que l'Alamo et 55 jours à Pékin (tourné en Espagne en 1962), avec les Anglais dans le rôle des méchants… Comme dans « Braveheart », le célèbre film de Mel Gibson sur la résistance écossaise !
Né le 3 février 1689 à Pasaia (Pasajes de San Pedro) en Guipuzcoa, Blas de Lezo y Olavarrieta avait débuté sa carrière en 1701, à l’âge de douze ans, comme aspirant dans la marine française, sous les ordres du comte de Toulouse. En 1704 il prend part, comme membre d'équipage dans la flotte franco-espagnole, à la bataille de Vélez Málaga lors de la guerre de Succession d'Espagne, où il perd la jambe gauche. Promu enseigne de vaisseau, il participe à diverses batailles de Palerme et pour s'y être distingué, il est promu lieutenant de vaisseau. Le siège de Toulon en 1707 lui coûte l'œil gauche. Il continue de combattre la Royal Navy avant de rejoindre la marine espagnole en 1711 pour être promu capitaine deux ans plus tard. En 1714 il perd le bras droit au siège de Barcelone, ce qui ne l'empêche pas, durant cette campagne, de capturer le « Stanhope » et dix autres navires britanniques (la perte de ses membres lui a valu le surnom de Medio-hombre - demi-homme - ou « anka motz » en basque).
À la fin de la guerre de Succession d'Espagne, il se voit confier le 16 février 1723, le commandement de la flotte des mers du Sud. Patrouillant dans le Pacifique, il chasse et détruit les navires pirates britanniques et néerlandais le long de côtes des Amériques, capturant douze navires. En 1725, Blas de Lezo se marie au Pérou. Il rentre en Espagne en 1730 pour être promu commandant de la flotte méditerranéenne.
En 1732, il commande une flotte de 54 navires qui accompagnent José Carrillo de Albornoz et 30 000 hommes pour reprendre à l'Empire ottoman la ville d'Oran. Avec six navires et 5 000 hommes, il chasse les Barbaresques après un dur combat. Nommé en 1734 lieutenant général de la marine espagnole, il retourne en Amérique en 1737 comme gouverneur de Carthagène. En mars 1741, la guerre continuant d’opposer l’Angleterre à l'Espagne, l'amiral Edward Vernon et le général Thomas Wentworth avec une flotte de 186 navires armés de quelque 2 000 canons et amenant une armée de 23 600 hommes, font le siège de Carthagène. Blas de Lezo n'a que 3 000 soldats réguliers, 600 archers Indiens, et les équipages de ses six navires de ligne à leur opposer. La colossale bataille dure 67 jours. La défaite des forces britanniques n'en est que plus humiliante. Mais une épidémie de peste fera mourir Blas de Lezo à peine quelques mois après cette défense qui a été sa plus grande victoire, le 7 septembre 1741, sans que l’on sache, ce jour, où il a été inhumé.
Depuis quelques années, l'amiral basque Blas de Lezo y Olavarrieta est sous les feux de l’actualité (historique) avec des romans, des biographies, des expositions et des statues (à Madrid et à Cadix) et l'une des plus modernes frégates de la marine espagnole porte son nom.
Lors d'une visite à Cartagena de las Indias, l'historien britannique Arnold J. Toynbee avait résumé d’une phrase l'importance de cette victoire de Blas de Lezo : « Ceci est la raison pour laquelle on ne parle pas l'anglais en Amérique du Sud ». Lezo avait demandé dans son testament de fixer une plaque sur les murs de la ville : « Ici, l'Espagne a battu l'Angleterre et ses colonies ». Et les Colombiens l’ont fait en 2009. L’histoire d’un héros basque qui mériterait assurément un film…
Alexandre de La Cerda