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Cinéma
La critique de Jean-Louis Requena
La critique de Jean-Louis Requena
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| Jean-Louis Requena 522 mots

La critique de Jean-Louis Requena

The Florida Project - Film américain de Sean Baker – 112’

The Florida Project est né de l’observation du coscénariste, Chris Bergoch, lors de l’installation de sa mère à Orlando (Floride) à proximité du Walt Disney World Resort, le plus important parc de loisirs du monde (11.000 hectares !). Aux alentours de ce « Royaume Enchanté », cher à Walt Disney, son « génial inventeur », sont implantés dans un entrelacs d’autoroutes bruyantes et d’un aérodrome, des motels aux murs multicolores ou survit une population précaire, désargentée, loin du « rêve américain » pourtant si proche .

De petits enfants délurés, Moonee, Scooty, Jancey, errent dans les coursives de ces motels, sur les parkings, et font les 400 coups à la première occasion. Moonee, 6 ans (Brooklyn Kimberly Price), dotée d’un sacré caractère, mène sa petite troupe à un train d’enfer que ne peut refréner le gérant « bon enfant » Bobby (William Dafoe), ni sa jeune mère caractérielle et déjantée Halley (Bria Vinaite). Rien ne peut arrêter cette petite troupe qui court entre « The Future », pavé de béton brut recouvert d’une peinture jaune et le « Magic Castle » aux couleurs mauves. Chaque petit appartement, sorte de cellule, de ces manoirs peinturlurés, renferme un drame social venu s’échouer à quelques encablures de l’entrée du « Royaume Enchanté ».

C’est le règne de la débrouillardise, de l’existence au jour le jour. Chacun fait comme il peut avec de petits boulots au fast-food du coin, voire comme la mère de Moonee par la vente de produits frelatés aux abords des grands hôtels, et enfin par de la prostitution occasionnelle. C’est un univers désespérant, poisseux, glauque, à un jet de pierre du « Rêve Américain » tel qu’il est proposé en diffusion continu par les networks (chaînes locales de télévisons).

Sean Baker, coscénariste a procédé à de longs repérages sur les lieux mêmes afin de « coller » au plus de la réalité de cette humanité vivant non loin de ce parc de loisirs, temple de la sous-culture de masse. A part William Dafoe grand acteur, toute la distribution est composée de non-professionnels. C’est un miracle car rien n’est plus difficile que de faire « jouer » des enfants sans qu’ils ne soient faux ou cabotins. Sean Baker (46 ans) en cinéphile averti a visionné de nombreux films avec des enfants : les 400 coups (1959), l’argent de poche (1976) de François Truffaut, Ponette (1996) de Jacques Doillon, etc. Il dirige les enfants à merveille en s’adaptant à leur rythme physiologique par des longs plans séquences, un minimum de découpage, ce qui génère une fluidité du récit cinématographique ponctué de quelques scènes statiques dans un univers clos : les sombres appartements. La scène finale, outre son ingéniosité de mise en image, est bouleversante.

Sean Baker est un jeune cinéaste américain à suivre car il démontre, pour son cinquième long métrage, une maitrise de son art sur le plan de l’écriture scénaristique, de la direction d’acteur, ici pas évidente, et du filmage (film argentique 35 mm.)

Florida Project a été présenté au dernier Festival de Cannes à la Quinzaine des Réalisateurs.

Jean-Louis Requena

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