Du dimanche prochain 26 août au 16 septembre, la Côte Basque vivra pour la deuxième année consécutive à l’heure du Festival Ravel, grâce à la réunion du festival Musique en Côte Basque et de l’Académie Internationale de Musique Maurice Ravel qui proposent désormais une série d’événements associant artistes consacrés et talents de demain.
L’idée avait déjà germé il y a deux ans, lorsque j’avais interrogé le président de l’Académie Jean-François Heisser, en vue de la commémoration en 2017 du 80ème anniversaire de la disparition du maître de Ciboure, avec cette année-là un début de réalisation vivement encouragé par Alain Rousset, sous l’égide de la tout récemment alors nommée ministre de la Culture Françoise Nyssen, les deux politiques étant présents à Saint-Jean-de-Luz. D’ailleurs, le président du Conseil régional de Nouvelle-Aquitaine ne manque pas de souligner que « c’est lors d’une rencontre à Pessac, en janvier 2017, avec Jean-François Heisser, qu’était née cette initiative de lancer sur ces terres basques un festival célébrant le compositeur français le plus joué dans le monde »… Immédiatement « séduit par cette proposition » et souhaitant que la Région soit partenaire de Musique en Côte Basque et de l’Académie Ravel invitées à unir leurs forces pour ce nouveau « Festival Ravel », après la réussite tant artistique que populaire de la première édition, Alain Rousset estime que parmi les plus de 400 manifestations soutenues par la Région, le Festival Ravel n’est pas un festival parmi d’autres, car Ravel dépassera le Pays Basque pour se déployer en Nouvelle-Aquitaine, dès le mois d’octobre prochain, à Gradignan et à Saintes : « Célébrer le centenaire Debussy, c’est provoquer la rencontre de deux figures essentielles de la musique française. Si l’on ne peut réduire Debussy à ses « Préludes » et Ravel au « Boléro », force est de constater que ces deux œuvres ont atteint l’universalité. Pièces les plus jouées de leur répertoire respectif, elles incarnent des bréviaires merveilleux suscitant enchantement et rêve imaginatif tant chez l’auditeur profane que le mélomane averti. Il y aura donc un match aller et retour, sans forcément de « victoire aux points », si ce n’est de fêter cet âge d’or, où innovations harmoniques et rythmiques réinventaient le langage musical ». Et Alain Rousset d’ajouter que cette nouvelle édition serait également dédiée à la mémoire de Peyuco Duhart qui nous a quitté l’an passé, « saluant l’élu basque, l’homme affable et chaleureux, l’ardent promoteur de la coopération transfrontalière et de l’euro-région ».
Pour sa part, Jean-François Heisser évoquait parmi les autres « pistes » d’inspiration du festival, la création de « L’Histoire du Soldat », la présence des compositeurs basques, une production originale de l’opérette « Véronique », chef-d’œuvre d’un André Messager défenseur de l’avant-garde d’alors. Soulignant que Maurice Ravel nous avait légué un message d’ouverture en direction des cultures les plus diverses, Jean-François Heisser évoquait encore l’attrait du compositeur pour le jazz pendant les dix dernières années de sa vie, forme musicale qui sera présente au festival grâce au concert en solo de Laurent de Wilde qui rendra hommage le 28 août (à 20h30 à la Luna Negra à Bayonne) à deux pianistes fondateurs de l’histoire du jazz : Duke Ellington et Thelonious Monk. En ré-arrangeant leurs œuvres (Fleurette Africaine, In My Solitude, Round Midnight, Pannonica, Monk’s Mood…), en interprétant des compositions personnelles qui leur sont dédiées (Tune for T, Edward K) ou qui s’en sont inspirées (Le Bon médicament, Over The Clouds, Edward K), de Wilde tisse la toile d’un jazz vivant où le passé et le présent se tutoient en toute intimité.
Quant au « match aller et retour » Ravel-Debussy, ils auront lieu avec le pianiste Philippe Cassard le mercredi 29 août à l’Auditorium Ravel à Saint-Jean-de-Luz, puis le samedi 1er septembre à 20h30 à l’église d’Ascain avec Anaïs Gaudemard, harpe, Philippe Bernold, flûte, Marie-Josèphe Jude, piano, Philippe Graffin, violon, Miguel Da Silva, alto, Jérôme Pernoo, violoncelle, Lise Nougier, soprano, le Quatuor à cordes constitué de membres de l’Académie Ravel : Yaoré Talibart et Vashka Delnavazi, violons, Natanael Ferreira, alto, et Jean-Baptiste
Maizières, violoncelle. On se souviendra qu’à propos du Quatuor en fa majeur de Maurice Ravel, Debussy l’avait adjuré de n’y pas altérer une seule note, contrairement à ce que lui suggéraient ses éditeurs : « Au nom des dieux de la musique, et au mien, ne touchez à rien de ce que vous avez écrit de votre Quatuor » !
Sans doute, la « Barque sur l’Océan » du compositeur ziburutar avait-elle touché « La Mer », les esquisses symphoniques pour orchestre de Debussy, dont le compositeur Arthur Honegger disait que « chaque note, chaque timbre – tout est pensé, ressenti et contribue à l'animation émotionnelle ». Quant à la pianiste Marguerite Long, dont on conserve l'enregistrement historique (1932) du Concerto en Sol de Ravel (lequel dirigeait l’orchestre), elle écrivait : « Personne après Debussy n'a joué du piano comme avant. Il nous a trop bien habitués à l'oscillation infinie de sa propre vibration, à ce diapason révélateur. De cette sensibilité extraordinaire découle son emprise, son immense capacité à séduire. Et ses méthodes d'écriture ou l'utilisation proscrite de certaines harmonies n'ont aucune importance. Voici ce que ses innombrables imitateurs n'ont pas compris ». Cependant, elles n’en furent pas moins « contrastées », les relations entre Ravel et Debussy en qui le compositeur ziburutar voyait certes « un artiste incomparable, un individu au génie des plus phénoménaux »… Mais Ravel considérait également que certaines de ses œuvres de jeunesse – « Habanera » et « Jeux d’eau » - auraient inspiré à Debussy quelques pages dont la critique omit de reconnaître la « filiation ravélienne »…
Le Festival donnera ainsi l’occasion de commémorer toutes ces grandes figures du monde musical se donnaient alors rendez-vous sur la côte basque !
Début de la programmation du Festival :
- Dimanche 26 août à l’église de Saint-Jean-de-Luz à 10 h 30, messe des Corsaires par les chorales de la Côte basque, suivie d’un concert sur le parvis à midi.
- Du 27 août au 7 septembre à l’auditorium, master classes publiques, de 9 h 30 à midi et de 14 h à 19 h.
- 29 août à 20 h 30 à l’Auditorium, match aller Debussy-Ravel avec le pianiste Philippe Cassard
- 30 août à 20 h 30 à l’église de Ciboure, récital de piano de Nicholas Angelich conclu par la valse de Ravel
- 31 août à 20 h 30 à l’église luzienne « Portraits de femmes » par Natalie Dessay et Philippe Cassard.