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Redécouvrir le classicisme musical d’un héros romantique
Redécouvrir le classicisme musical d’un héros romantique
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Redécouvrir le classicisme musical d’un héros romantique

La vague du quatuor à cordes qui envahit l’Europe musicale a trouvé, depuis l’an dernier, un lieu d’élection en Pays basque. Le festival « Quatuor en Pays basque » sèmera, du 8 au 19 octobre, les plus belles musiques dans les plus beaux sites : Villa Arnaga, château d’Arcangues, église Notre-Dame de Bidart, Musée historique de Biarritz. Jeunes et déjà chevronnés, le quatuor Piatti et le quatuor Équinoxe rejoindront le quatuor Arnaga dans cette célébration musicale aux visages si variés par la multiplicité des compositeurs et par l’audace de ses choix. Arriaga, Alard, Sendrez, Walton, Britten et Lekeu, voisineront avec Beethoven, Borodine, Durosoir, Haydn, Mozart, Chostakovitch.
La conférence d’Alexandre de La Cerda, le dimanche 8 octobre à 16 h, précédera le premier concert du festival donné dans la belle demeure d’Edmond Rostand à Cambo par le Quatuor Arnaga qui interprètera le Quatuor n°1 en ré mineur d’Arriaga, le Quatuor op. 8 de Jean-Delphin Alard et le Quatuor de Michel Sendrez.
Nous sommes le 20 novembre 1817 à Bilbao. C’est la date inscrite sur un dessin à l’encre de chine figurant un grand salon orné d’un lustre et de tableaux. Le long de chaque mur, une rangée de chaises avec des spectateurs et au milieu de la salle, une dame de qualité assise à un piano-forte et entourée de quelques gentilshommes. Lui faisant face, un quatuor de jeunes musiciens assis à leurs pupitres. Ce dessin est parvenu jusqu’à nous, il est l’œuvre d’un garçon de 11 ans qui se trouve lui-même parmi les jeunes exécutants : il joue du violon, c’est Juanito, autrement dit Juan Crisóstomo Jacobo, Antonio d'Arriaga y Balzola.
La maîtresse de maison est Dona Luisa Torres y Urquijo, mélomane avertie et pianiste délicate comme il est indiqué au revers du dessin.
Contrairement à une opinion parfois répandue, le Pays Basque n’était guère en retard sur la vie musicale de son époque, et Bilbao ne faisait pas exception à la règle. Dans toutes les provinces basques, de part et d’autre de la Bidassoa, un même élan tendait à répandre une musique réputée « culte » par rapport à la chanson populaire et à la faire déborder des salons où elle se cantonnait à l’occasion.
On respire comme un parfum de romantisme à la vie de ce « fou » de musique dont la naissance même fut placée sous l’invocation de Mozart, tant par sa date (cinquante ans plus tard, jour pour jour) que par les prénoms dont il fut doté : Juan-Crisostomo pour Johannes-Chrysostomus ! De Salzbourg à Bilbao, on notera d’ailleurs plus d’une coïncidence troublante entre les deux musiciens.
Envoyé par son père au Conservatoire de Paris afin d’y recevoir l'enseignement de Pierre Baillot (violon) et de François-Joseph Fétis (harmonie et contrepoint), ce dernier – dont il deviendra l’assistant – affirmera à propos du jeune Arriaga que « ses progrès tinrent du prodige ; moins de trois mois lui suffirent pour acquérir une connaissance parfaite de l´harmonie ; et au bout de deux années, il n´était aucune difficulté du contrepoint et de la fugue dont il ne se jouait. Les progrès de ce jeune artiste dans l´art de jouer le violon en furent pas moins rapides : la nature l´avait organisé pour faire bien tout ce qui est  du domaine de la musique ».
Hélas, « possédé par un désir effréné de composer », il meurt d’une affection aux bronches dix jours avant son 20e anniversaire en laissant à la postérité quelques chefs d’œuvre dont les Quatuors à Cordes écrits en 1824. Leur inventivité mélodique hors du commun exprimée sous une forme classique enflammait l’admiration de ses professeurs : « il est impossible d’imaginer rien de plus original, de plus élégant, de plus purement écrit (…) chaque fois qu’ils étaient exécutés par leur jeune auteur, ils excitaient l’admiration de ceux qui les entendaient » !
Une malle contenant son violon et ses partitions, renvoyées à sa famille, échoua au grenier, son père étant tout à ses bateaux et à son commerce de cacao, de sucre, de riz etc. entre Bilbao et Bayonne… Il fallut attendre quarante ans pour qu’un de ses neveux soustraie à l’oubli les œuvres du jeune biscaïen, et presque vingt ans encore pour que les fameux quatuors fussent joués à nouveau en attendant la découverte - parmi des papiers d’emballage - de l’Ouverture (op 20), qui permit de célébrer dignement le centenaire de la naissance d’Arriaga en 1906. Depuis lors, en pleine entreprise de réappropriation de ses valeurs et traditions, le Pays Basque donnera son nom au théâtre de Bilbao, instituera une commission permanente destinée à la publication de ses œuvres et lui érigera un monument commémoratif dans l’effervescence nationaliste des années trente.
Programme :
Dimanche 8 octobre conférence d’Alexandre de La Cerda à 16 h, concert 18 h, Villa Arnaga Cambo
Quatuor Arnaga : Juan Crisòstomo de Arriaga Quatuor n°1 en ré mineur, Jean-Delphin Alard Quatuor op. 8, Michel Sendrez Quatuor
Samedi 14 octobre 20 heures 30, Musée Historique à Biarritz
Quatuor Equinoxe : Wolfgang Amadeus Mozart Divertimento en ré majeur, Alexander Borodine Quatuor n° 2 en ré majeur, Lucien Durosoir Quatuor n° 1 en fa mineur
Dimanche 15 octobre 18 heures, Villa Arnaga à Cambo
Quatuor Equinoxe : Guillaume Lekeu Molto adagio pour quatuor à cordes, Dimitri Chostakovitch Quatuor n° 8 en ut mineur op. 110, Lucien Durosoir Quatuor n° 1 en fa mineur
Mercredi 18 octobre 20 heures, Château d’Arcangues
Quatuor Piatti : Ludwig von Beethoven Quatuor n° 11 op.95 'Serioso', Lucien Durosoir Quatuor n° 3 en si mineur, William Walton Quartet in A minor
Jeudi 19 octobre 20 heures 30, Eglise Notre Dame à Bidart

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