Samedi 20 mai à 22h, à l’occasion de la « Nuit des Musées », le Quatuor Arnaga donnera dans la Villa Arnaga à Cambo un concert sous forme d’hommage à trois compositeurs du Pays Basque : Arriaga, Ravel et Usandizaga. Formé par les violonistes Arnaud Aguerguaray et Aurélia Lambert, l’alto Olivier Seube et le violoncelliste Yves Bouillier, tous professeurs au conservatoire de Bayonne et membres de l'Orchestre Régional Bayonne Côte Basque, le Quatuor Arnaga interprètera :
- le 3ème quatuor d'Arriaga, 1er mouvement
- le Quatuor d'Usandizaga sur des thèmes populaires basques
- le Quatuor de Ravel : 1er mouvement
Dans un court « avant-propos » au concert, j’évoquerai en particulier ce troisième quatuor du compositeur basque Arriaga, écrit à l’âge de 17 ans, pièce très originale, en particulier pour son menuet et l’andantino dont la sérénité champêtre est troublée par un orage à l’intensité dramatique croissante, très « Symphonie Pastorale » beethovenienne…
Arriaga, le « Mozart » basque (1806-1826)
On respire comme un parfum de romantisme à la vie de ce « fou » de musique dont la naissance même fut placée sous l’invocation de Mozart, tant par sa date (cinquante ans plus tard, jour pour jour) que par les prénoms dont il fut doté : Juan-Crisostomo pour Johannes-Chrysostomus ! De Salzbourg à Bilbao, on notera d’ailleurs plus d’une coïncidence troublante entre les deux musiciens : une extraordinaire précocité bénéficiant d’une même volonté de « promotion musicale » de leur progéniture par leurs pères respectifs. Jusqu’à l’ultime épisode de leur vie : ni Mozart à Vienne, ni Arriaga à Paris n’auront de tombe, le jeune basque reposant dans une fosse commune du cimetière Nord de Montmartre.
Mais ce parallèle, aussi saisissant soit-il, comporte des limites : Arriaga avait pour maîtres Catel, Boieldieu, Cherubini, et manifestera quelque influence « schubertienne »…
Envoyé par son père au Conservatoire de Paris afin d’y recevoir l'enseignement de Pierre Baillot (violon) et de François-Joseph Fétis (harmonie et contrepoint), ce dernier – dont il deviendra l’assistant à l’âge de 17 ans – affirmera à propos du jeune Arriaga que « ses progrès tinrent du prodige ; moins de trois mois lui suffirent pour acquérir une connaissance parfaite de l´harmonie ; et au bout de deux années, il n´était aucune difficulté du contrepoint et de la fugue dont il ne se jouait. Les progrès de ce jeune artiste dans l´art de jouer le violon en furent pas moins rapides : la nature l´avait organisé pour faire bien tout ce qui est du domaine de la musique ».
Hélas, « possédé par un désir effréné de composer », il meurt d’une affection aux bronches dix jours avant son 20e anniversaire en laissant à la postérité quelques chefs d’œuvre dont les Quatuors à Cordes écrits en 1824. Leur inventivité mélodique hors du commun exprimée sous une forme classique enflammait l’admiration de ses professeurs : « il est impossible d’imaginer rien de plus original, de plus élégant, de plus purement écrit (…) chaque fois qu’ils étaient exécutés par leur jeune auteur, ils excitaient l’admiration de ceux qui les entendaient » !
Une malle contenant son violon et ses partitions, renvoyée à sa famille, échoua au grenier, son père étant tout à ses bateaux et à son commerce de cacao, de sucre, de riz etc., entre Bilbao et Bayonne… Il fallut attendre quarante ans pour qu’un de ses neveux soustraie à l’oubli les œuvres du jeune biscaïen, et presque vingt ans encore pour que les fameux quatuors fussent joués à nouveau en attendant la découverte - parmi des papiers d’emballage - de l’Ouverture (op 20), qui permit de célébrer dignement le centenaire de la naissance d’Arriaga en 1906. Depuis lors, en pleine entreprise de réappropriation de ses valeurs et traditions, le Pays Basque donnera son nom au théâtre de Bilbao, instituera une commission permanente destinée à la publication de ses œuvres et lui érigera un monument commémoratif dans l’effervescence patriotique des années trente.
Concert « compositeurs basques » par le Quatuor Arnaga, samedi 20 mai à 22h, Villa Arnaga à Cambo
Alexandre de La Cerda