« Get Out » - Film américain de Jordan Peele – 104’
Le film d’horreur ou film d’épouvante est un genre indémodable qui a perduré depuis la naissance du cinéma. Il est bon, dans une salle obscure, d’avoir, sans conséquences physiques, des frissons garantis avec les monstres animaliers, voire humains (bien plus dérangeants !) qui s’agitent sur l’écran. Les producteurs ont compris dès les années 1920, qu’il y avait un marché porteur. Ils ont rapidement occupé celui-ci : la firme américaine Universal dans les années 1930 (Frankenstein – 1931, La Momie – 1932, etc.), la Hammer britannique dans les années 1950 (le Cauchemar de Dracula – 1958, Le Chien des Baskerville – 1959, etc.). L’année 1968 voit apparaître deux films américain majeurs : La Nuit des morts-vivants de George A. Romero et Rosemary’s Baby de Roman Polanski. Dans les décennies qui suivent, la veine ne tarit pas, en Italie (sous-genre giallio, sanguinolent), au Etats-Unis (sous-genre slashers), en Espagne, France, Japon, etc.
Tous les pays producteurs de films cultivent, au fil des décennies, la veine du film d’épouvante en l’adaptant à leur propre culture. C’est un genre universel qui se décline à l’infini.
L’histoire commence bien : Chris Washington (Daniel Kaluuya) est un photographe noir qui vit dans un appartement « bobo » avec Rose Armitage (Allison Williams), une blanche charmante. Celle-ci propose de passer un week-end chez ses parents pour y rencontrer Dean, son père neurochirurgien, et sa mère Missy, psychiatre. Malgré l’appréhension de Chris, le couple interracial est bien reçu. Dean déclare en guise de bienvenue, qu’il aurait volontiers voté une troisième fois Barack Obama ! C’est une nouvelle version de « Devine qui vient dîner ? » (Stanley Kramer - 1967). Une fête est prévue par les parents ce week-end. De vieilles personnes, toutes blanches, arrivent en masse et semblent s’intéresser exclusivement à Chris. Seuls deux serviteurs sont noirs. Que se passe-t-il dans cette grande et belle maison aux hôtes si chaleureux, aux visiteurs encombrants ?
Le film sorti au Etats-Unis un mois après l’intronisation de Donald Trump a fait un « tabac », car sous des aspects humoristiques, horrifiques, grinçants, il raconte beaucoup de choses sur la question raciale préoccupante dans ce pays. Les racistes peuvent se dissimuler sous des masques de respectabilité bonhomme, et adhérer sans hésiter aux pires des stéréotypes raciaux. Le réalisateur Jordan Peele, également scénariste, dont c’est le premier long métrage nous propose un conte horrifique qui en dit long sur le « comment vivre ensemble » qui est l’interrogation majeure de toute les sociétés démocratiques.
Le film rencontre un grand succès en France (plus d’un millions d’entrées en un mois d’exploitation !), ce qui n’est que justice compte tenu du conte sociologique, horrifique, drolatique qui nous est proposé. L’effroi et le rire font toujours bon ménage.
A cette occasion, le cinéma indépendant américain montre de nouveau, s’il en était nécessaire, toute sa créativité.
Jean-Louis Requena