Une voiture-bélier a défoncé une porte de la cathédrale d’Oloron-Sainte-Marie (classée au patrimoine mondial de l'UNESCO) dans la nuit de dimanche à lundi : les voleurs (?) ont dérobé des objets de grande valeur (calices, ostensoirs et un trésor d’orfèvrerie d’une valeur inestimable qui a appartenu aux évêques d’Oloron). D’autres objets ont été cassés et abandonnés sur place. Parmi les objets précieux emportés, signalons encore une chape liturgique, deux dalmatiques et deux manipules d’un même ensemble datant du XVIème siècle dont le roi François Ier avait fait cadeau à l’évêque d’Oloron. Le maire d’Oloron évoque un « préjudice considérable : en dehors des conséquences économiques, on vole aux habitants d’Oloron-Sainte-Marie tout un pan de leur patrimoine », a estimé Hervé Lucbéreilh sur les ondes de France Bleu Béarn.
A part le maire de Béguios qui a condamné l'acte immédiatement, ainsi que le sénateur Max Brisson, on attend les réactions des politiques locaux pour condamner cet attentat qui touche en priorité les chrétiens béarnais, mais également le diocèse et tous les amoureux de notre patrimoine...
« Et tous ces édifices qui brûlent… Nous avons dépensé des millions pour des portiques ecotaxes qui ne fonctionneront jamais, nous installons des radars automatiques partout et de plus en plus performants, nous avons des caméras dans nos grandes surfaces pour ne pas qu'un mars se fasse voler, mais nous ne sommes pas capable ne serait ce que de vidéoproteger notre patrimoine, avoir au moins des vidéos à exploiter de ce genre d'actes. Les priorités de ceux qui ont le pouvoir sont visiblement ailleurs », note pour sa part un de nos correspondants.
Quant à l’évêque du diocèse, Mgr Aillet, il a émis le communiqué suivant : « Apprenant par la presse et par Monsieur l’Abbé Jean Marie Barennes, curé de la paroisse La Trinité d’Oloron, l’attaque au bélier contre la cathédrale d’Oloron Sainte-Marie, je partage l’émoi des paroissiens et des habitants du quartier Sainte-Marie, après le vol d’une partie du trésor.
C’est un patrimoine insigne qui a été volé, tant aux habitants de la commune qu’aux fidèles de l’Eglise catholique. S’il ne s’agit pas en toute rigueur de termes d’une profanation, on peut toutefois parler d’un vol sacrilège puisque ce sont des objets de culte, dont certains sont encore utilisés aujourd’hui en certaines grandes circonstances, qui ont été dérobés.
Je remercie les autorités civiles et les forces de sécurité pour la promptitude avec laquelle elles sont intervenues sur les lieux. Il leur appartient maintenant de mener l’enquête.
Je souhaite que les acteurs de ce délit et le patrimoine ainsi dérobé, heureusement bien répertorié, soient retrouvés.
Je constate que ces graves incivilités et ce manque total de respect pour un patrimoine sacré se multiplient en France, ce qui ne laisse pas d’inquiéter pour le sens profond des valeurs de civilisation qui caractérise notre société ».
+Marc Aillet, évêque de Bayonne, Lescar et Oloron, le 4 novembre 2019
Eduquer à la propriété du patrimoine
En France, on aime la valeur patrimoniale du passé. Les journées consacrées à cette mission sont nombreuses. Musées, cathédrales, châteaux, espaces historiques du passé connaissent un engouement certain depuis ces dernières décennies. Mais une connaissance partiale de la laïcité incomprise conduit à juger le patrimoine religieux comme un bien privé du clergé, sans conséquence directe sur sa protection et sa sécurité. Or, les églises ne sont pas la propriété du clergé, mais de l’Etat et des Communes. Les cathédrales relèvent directement de l’Etat pour nombre d’entre elles.
Depuis la séparation de l’Église et de l’Etat en 1905, ces biens communs que sont les églises appartiennent aux communes qui ont fonction et mission de les entretenir, conserver et protéger.
En règle générale, le curé affectataire est autorisé à faire usage de ces biens, mais n’est en aucun cas leur propriétaire. Une bonne entreprise souvent menée de concert avec les édiles, particulièrement conscients de la valeur exceptionnelle de ce patrimoine à défendre et préserver chez eux.
Tout cela est dans les usages mais n’empêche pas les vols et les brigandages toujours possibles. Nous le voyons à Oloron-Sainte-Marie : l’émotion provoquée par un tel méfait a provoqué la répulsion de la cité.
Nous le vîmes à Bayonne il y a une décennie, le trésor de la cathédrale conservé dans un coffre de la sacristie fut pillé le temps d’une nuit de cauchemar. Calices, objets de piété, orfèvrerie furent dilapidés et disparurent dans le paysage sans qu’à ce jour on ne mit la main sur leurs auteurs.
Il manquerait sans doute une éducation civique individuelle et publique pour apprendre à tout un chacun dans sa commune le droit de propriété qui demeure le soin des biens patrimoniaux qui sont entreposés dans les édifices religieux et méritent une évaluation détaillée de leur nature.
On devine qu’à l’avenir, les soins diligents engagés par certains maires pour mettre sous clé dans des espaces communaux de tels trésors, soit à nouveau d’actualité.
Des prises de photographies réalisées par la gendarmerie et les Monuments Historiques existent déjà en de nombreux lieux mais sans qu’il soit toujours possible d’assurer la sécurité publique des espaces religieux ouverts aux visiteurs, et toujours exposés à des vandalismes et à des vols imprévisibles.
Il faudra de toute évidence organiser avec des bonnes volontés la surveillance de ces espaces municipaux comme cela existe pour des bâtiments actuels faute de subir des préjudices à l’avenir.
La solution de fermer les édifices aux visiteurs n’étant qu’un pis aller, et ne répondant au défi de leur disponibilité publique et pour tout public.
Nombre des églises, chapelles, oratoires, cimetières parfois furent visités dans le passé, mais les pratiques des commerces illicites existent toujours dans les faits.
L’urgence confirmée par les exactions commises ces dernières heures à Oloron appellent à redoubler de vigilance et à envisager avec les populations locales, leurs édiles et les associations une protection continue de ces espaces exposés aux rapines et aux malveillances.
Chaque curé de paroisse peut témoigner pour son compte d’avoir subi des préjudices dans le passé.
Eduquer et apprendre à tout citoyen du lieu de sa commune la propriété publique de ses biens partagés dans la communauté devient une urgence civique.
Les circonstances l’exigent désormais, l’explication, la justification et le bien fondé de ces enjeux patrimoniaux s’imposeront à chacun par nécessité.
Faisons confiance, changeons la méthode, acceptons d’associer les citoyens à ce défi commun et vital pour toute commune dépositaire de richesses historiques méconnues et oubliées.