Quel symbole que cette remise, samedi 25 mars dernier, du Prix Manuel Lekuona à l’Académicien de la langue basque Jean-Louis Davant, dans son village natal d’Arrast-Larrebieu ! Arrast – Ürrüstoï – où un autre de ses fils, Arnauld-Michel d'Abbadie, fils de notaire royal et maître de la maison abbatiale d'Arrast, dut fuir la révolution française à l'âge de vingt et un ans pour se réfugier dans la catholique Irlande. Mais il n’oubliera pas son Pays Basque d’origine en suscitant l'intérêt de ses fils pour les études basques et en appuyant, entre autres, les travaux de l'abbé Darrigol et lui faire obtenir en 1827 le prix Volney de l'Académie Française pour sa « Dissertation critique et apologétique sur la langue basque ». Précisément, son fils Antoine d'Abbadie participera lui-même à la publication des « Etudes Grammaticales sur la Langue Euskarienne », écrira encore « Lettres sur l’orthographe basque » (1854), « Travaux récents sur la langue basque » et, en euskara, « Zuberoatikaco gutun bat » (1864) et sera le mécène à Urrugne et en d’autres endroits du Pays Basque – de part et d’autre de la « muga » de concours destinés à stimuler la renaissance de la langue et de la culture basques !
On avait déjà ressenti, le lundi précédent la remise de son prix, l’émotion de Jean-Louis Davant dans ses propos lors des obsèques de Pierre Charritton à l’église d’Hasparren, (son prédécesseur comme lauréat du prix Manuel Lekuona). L’académicien souletin avait établi un parallèle entre Rabelais, l'auteur de la Renaissance, et la figure de son collègue disparu qui avait pleinement participé à la renaissance de l'euskara.
Une comparaison qui joue pleinement en faveur de Jean-Louis Davant qui vient d’ailleurs de publier chez l’éditeur Cairn son dernier ouvrage « Petite histoire du Pays Basque » (voyez notre rubrique « LIVRE ».
La remise du prix
Donc, samedi 25 mars dernier, c’est devant un auditoire fourni représentant le monde de la culture basque que l’académicien souletin avait reçu à Arrast-Larrebieu le Prix Manuel Lekuona 2016 d’Eusko Ikaskuntza.
La cérémonie organisée dans une ambiance conviviale avait rassemblé autour du président d’Eusko Ikaskuntza Iñaki Dorronsoro, Jean-Michel Larrasquet, vice-président pour Iparralde, Allande Davant, maire d’Arrast-Larrebieu, et Battittu Coyos, auteur d'une bio-bibliographie qu’Eusko Ikaskuntza vient de publier dans la collection « prix Manuel Lekuona ». Je laisse maintenant le « clavier » au compte-rendu de l’association :
« Le maire d’Arrast-Larrebieu, Allande Davant, en plus de remercier l’apport du lauréat à sa commune, a souligné la fierté d’être son neveu et premier voisin.
C’est ensuite Battittu Coyos qui a prononcé « l’éloge » de Jean-Louis Davant, en évoquant certains chapitres significatifs de son parcours. Tout au long de sa vie, il s’est dévoué corps et âme à ses travaux en tant que bascophile et contributeur de l’unification de l’euskara. Coyos a en outre affirmé qu’il s’agit d’un homme qui a impulsé nombre de réflexions nouvelles et nous laissera un apport fondamental pour la connaissance du Pays Basque.
Le Président d’Eusko Ikaskuntza a, quant à lui, rappelé que ce prix né en 1983 compte désormais un palmarès de 33 lauréats, parmi lesquels six sont originaires du Pays Basque Nord. Il a mis en lumière l’ampleur et la richesse de l’œuvre de Davant qui « illustre à la fois la démarche d’un homme d’esprit et d’action », « ses travaux actifs, sa passion et sa générosité en faveur de la langue, de la culture et de son propre pays dans toute sa richesse et sa complexité ». A ce titre, Iñaki Dorronsoro a voulu rappeler le tout récent décès de Piarres Charritton, qui avait obtenu le prix en 1999.
Après ces éloges, Jean-Louis Davant s’est fondu en remerciements avec toute l’humilité qui le caractérise. Il a considéré que les étapes de sa vie ont été comme un devoir. « J’ai laissé beaucoup d’empreintes, mais quelle valeur ont-elles ? Que signifient-elles ? C’est l’avenir qui le dira, s’il en reste quelque souvenir ». Sans aucun doute, le prix lui a donné la force de continuer à travailler « en faveur de la langue basque, du savoir, de la culture et du peuple basque ».
Pour achever la cérémonie, Jean-Michel Larrasquet, vice-président du bureau d’Eusko Ikaskuntza en Iparralde, a évoqué la dimension philosophique de la personnalité de Davant et sa capacité à traiter les problématiques majeures touchant au sujet basque.
On a alors réparti parmi l’assistance les exemplaires de la biographie tout juste publiée. La cérémonie a été clôturée par un cocktail et une émouvante démonstration de danses de mascarade exécutées par des jeunes souletins en l’honneur du lauréat ».
Alexandre de La Cerda