Les conditions sanitaires imposées depuis Paris nous privent du concert très attendu que Laurent Riboulet de Sabrac, titulaire des orgues de la villégiature impériale, devait donner ce dimanche 1er novembre à l’église Saint-Martin, en guise de clôture du festival Biarritz en Chamades.
Aussi avons-nous voulu reprendre la série des « premiers émois musicaux » inaugurée lors du premier « confinement » par le jeune organiste Thomas Ospital et qui consistait à relater un épisode de leur vocation artistique, soit comment ils avaient attrapé le « virus » de la musique !
ALC
« Tout a commencé avec Denise Limonaire qui était organiste de l’église Saint-Martin à Biarritz : elle était mon professeur de piano et j’avais dix ans lorsqu’elle m’a proposé de monter à l’orgue pendant une messe de minuit : ce fut pour moi un choc émotionnel ! A cet âge-là, voir cette petite dame jouer de cet instrument… j’en ai fait des rêves pendant une dizaine d’années et elle a commencé à me donner des cours d’orgue que j’ai suivis pendant deux ans, et très vite, j’accompagnais déjà une messe célébrée par le chanoine Eyharts : c’était l’oncle de l’astronaute, il avait fait bâtir Sainte-Thérèse ! C’était en 1978, et depuis lors, je n’ai plus jamais arrêté de faire des messes.
Deux ans plus tard, j’ai suivi Marie-Bernadette Carrau au Conservatoire de Bayonne où j’ai accompli mon cursus, et elle m’a « débauché » pour que je joue à Saint-Charles où j’ai fait une messe par week-end pendant vingt-trois ans. C’est également au conservatoire que j’avais rencontré René Massiaux, car le châtelain d’Ilbarritz avait besoin d’un organiste « brillant » pour la messe dominicale… C’était un homme d’une gentillesse, d’une éducation, d’un raffinement, un homme « d’un autre monde » ! Ce fut une aventure qui dura plusieurs années et j’éprouvais pour lui beaucoup d’affection.
Ensuite, c’est lors d’un stage d’orgue à Biarritz que je fus remarqué par Jacques Taddéi, directeur du conservatoire de Rueil-Malmaison membre de l’Institut et titulaire de Sainte-Clotilde (à Paris), il avait apprécié mes qualités d’improvisation et me voulait dans sa classe d’improvisation à l’orgue. Il y avait également dans ce conservatoire deux classes d’orgue, l’une avec Susan Landale, avec qui je restai pendant sept ans, et l’autre avec Marie-Claire Alain que j’ai suivie pendant trois ans, et ce fut extraordinaire pour moi ! C’était dans les années 90, puis en 2002, je fus appelé à Saint-Martin par Denise Limonaire et le curé m’a très vite nommé titulaire ; un an plus tard, le titulaire de Sainte-Eugénie est décédé, et quelques années plus tard, c’est Marie-Bernadette Carrau, titulaire de Saint-Charles qui disparut… et le clergé de Biarritz voulut que j’assume les charges de toutes ces orgues, ce dont je suis très fier, et très reconnaissant à mes prédécesseurs qui ont laissé des instruments d’une telle qualité, la raison pourquoi j’ai eu à coeur de les entretenir : je les ai fait restaurer et je les ai agrandis.
En 2012, je suis allé voir le maire de Biarritz, Didier Borotra, pour lui dire que l’état de l’orgue de Sainte-Eugénie était vraiment critique. Il m’avait demandé : « mais combien vous faut-il » ?
Je lui répondis : « 150.000 Euros ! » Il a rigolé, poussé les hauts cris, mais il les a accordés et on a ainsi pu restaurer l’orgue de Sainte-Eugénie qui avait entre autres de graves problèmes de soufflerie. Cela m’a donné l’occasion d’inviter de grands organistes sur un mois pour inaugurer les travaux sur l’instrument et le curé de Biarritz, Dom Maurice Franc, a trouvé cela formidable et il voulut refaire ce festival chaque année en les faisant jouer tour à tour sur les quatre principaux instruments de Biarritz, sans oublier un cinquième instrument que l’on a installé à Sainte-Thérèse : il s’agit de l’orgue de salon de Denise Limonaire.
Ce festival a pris une ampleur phénoménale et cette année, il y a eu encore une plus grande affluence du public. L’entrée en est gratuite et son organisation, efficace, en revient à Pascal Matthieu. Pour ma part, j’ai eu l’honneur de recevoir de Mgr Aillet la médaille du Mérite diocésain en 2018, un très grand moment pour un 40ème anniversaire puisque j’avais commencé ma première messe ».