Succédant à ses prédécesseurs - dont certains n’étaient guère familiers de la littérature -, c'est bien la première fois dans l'histoire de la Ve République qu'une éditrice est nommée au Ministère de la Culture : il s’agit de Francoise Nyssen, l’emblématique éditrice de la maison « Actes Sud ».
En dehors de sa trajectoire dans l’Edition, il convient encore de signaler que Francoise Nyssen n’a pas été la dernière à signer le 11 juin 2015 la déclaration issue de la conférence humanitaire « Pour la paix en Pays Basque » à propos de l’annonce faite par l’ETA de mettre un terme à son action armée (Conférence Internationale d’Aiete à Saint-Sébastien).
Concernant son action dans l’édition, Françoise Nyssen a succédé à son père Hubert, fondateur d’« Actes Sud », aujourd'hui une holding familiale en bonne santé (après une fusion récente en 2005 avec les éditions du Rouergue), au souffle « d’un vent de Camargue qui lui semblait plus doux que celui du 6e arrondissement parisien : un matin de l'hiver 1979, Françoise Nyssen n’avait-elle pas installé ses enfants, son piano et ses chats dans une camionnette de location bleu ciel, direction l'autoroute du Sud. Une semaine plus tôt elle avait démissionné de la direction de l'Architecture, renonçant sur un coup de tête à une tout autre carrière, pour s'en aller rejoindre son père ». Coups de tête et coups de cœur, voilà ce qui anime l'éditrice. En trente ans, elle n'a cessé de s'enflammer. Pour des livres, des auteurs (Gôran Tunstrôm, Alice Ferney, Elena Poniatowska) et pour un agronome devenu son mari, Jean-Paul Capitani, aujourd'hui solide capitaine d'Actes Sud.
Notre confrère Didier Rykner, journaliste et historien de l'Art, dans son magazine en ligne « La Tribune de l'Art », dont la lettre reçue par des milliers de lecteurs est l’une des rares à consacrer une importante couverture aux activités des musées régionaux, n’hésite pas à s’en réjouir : « Les éditions Actes Sud, fondées par son père et qu’elle codirige, sont l’une des meilleures maisons d’éditions françaises dans tous les domaines, et notamment celui de l’art et du patrimoine. Pour ne prendre que quelques exemples (il y en a évidemment beaucoup d’autres), elle publie, chaque année, les actes des colloques des Conservateurs des Antiquités et Objets d’Art, elle a édité en 2015 un livre sur le Couronnement de la Vierge de Simon de Châlons et en 2016 un ouvrage sur le patrimoine mobilier religieux en Vaucluse (voir ici), des livres qui ne cèdent donc pas à la facilité ». Et de retenir une information donnée par le site Sceneweb.fr : Francoise Nyssen aurait, alors qu’elle habitait et travaillait à Bruxelles, « fondé des comités de quartier pour protéger le centre des promoteurs ». Si ce point est avéré (il n’y a pas de raisons de penser le contraire) cela nous la rend d’emblée éminemment sympathique.
« Sera-t-elle du gouvernement suivant, après les élections législatives », se demande Didier Rykner ? Là est la vraie question. Venant de la société civile et n’ayant jamais fait de politique, on peut penser que son poste devrait être reconduit si le parti d’Emmanuel Macron devait obtenir une majorité absolue, ou même relative, à l’Assemblée Nationale. « On espère en tout cas qu’elle aura à cœur de modérer le programme immobilier du Président de la République qui s’avère particulièrement inquiétant et que celui-ci a récemment détaillé dans une interview pour Business Immo », poursuit notre confrère : « les a priori positifs sont donc nombreux. Il reste que le ministère de la Culture n’est pas un poste facile, et que l’inexpérience dans la gestion de l’administration peut parfois brider les meilleures volontés (…) On pourra rapidement juger de ses premières décisions ».
ALC