Un retour sur un thème peu connu de cette époque de la Première Guerre mondiale permet de rapporter comment fut vécue cette épreuve au sein des sociétés paroissiales grâce aux souvenirs rapportés par l’Abbé Joseph Zabalo, aujourd’hui âgé de 95 ans.
Dans une commune basque comme Hasparren où en 1912 l’abbé Mirande fut envoyé comme curé de cette importante paroisse. Il avait déjà créé les Chrérubinots de Bayonne, société paroissiale relevant de la Cathédrale, les Eglantins à Hendaye, avant de poursuivre avec les « Jeunes Basques » à Hasparren, appelés Xerubinoak à l’origine, avant la francisation de leur nom. Il fera venir à Hasparren le père de Joseph Zabalo qui lui fut d’une grande aide pour créer avec les vicaires le patronage des garçons en 1913.
Dès 1912, l’abbé Mirande avait organisé sur le fronton un spectacle de gymnastique qui ravit la jeunesse du pays pour qui cet exercice physique n’était pas encore entré dans les usages. Le curé Mirande voulut ainsi réaliser son souhait de créer un espace réservé à la jeunesse par un patronage comme il l’avait déjà fait à Bayonne et Hendaye au cours de 1912.
Pour l’acquisition du terrain, les dons obtenus auprès de riches mécènes et de personnes qui avaient dû quitter Paris en ce temps où la guerre se profilait à l’horizon, lui procureront les substances nécessaires pour proposer ce projet aux gens du Pays Basque.
Dans un patronage de garçons, la mixité n’était pas encore dans les esprits. On commença donc par les jeunes hommes, le Curé Mirande administrant lui-même la proposition pour les jeunes filles, tout d’abord au presbytère, puis par la suite sur un terrain donné à la paroisse à l’usage des filles...
Les patronages brillaient de leur éclat, le recrutement, les propositions de gymnastique, de musique et de chants étaient au rendez-vous et la jeunesse y trouvait son plaisir.
Mais le rêve fut de courte durée car 1914 sonnait le rappel des jeunes soldats sur le front. Il décidera de l’avenir des Jeunes Basques. Ces années de guerre leur seront douloureuses.
Avant de quitter la commune, les vicaires pratiquèrent avec les jeunes gens la gymnastique, un art apprêté de l’époque pour maintenir la santé physique et mentale de la jeunesse.
Les anciens évoquent la préparation militaire de cette jeunesse, mais comme rapporte l’abbé Zabalo, elle ne relevait guère des attributions des prêtres, au demeurant patriotes dans l’âme mais non tenus à accomplir cette fonction.
Si en d’autres lieux, tels Langon et le patronage Saint-Joseph en Gironde, ces groupements paroissiaux entretenaient une correspondance suivie avec les « Poilus » et publiaient les lettres reçues du front dans un bulletin « feuilles de route », mais selon Joseph Zabalo, rien de semblable n’existait à Hasparren. Les correspondances reçues dans les familles alimentaient les informations sur l’avenir des jeunes Basques.
Avant de partir, les vicaires en charge des garçons avaient inculqué aux jeunes hommes les rudiments de la vie spirituelle et morale qui les attendaient : probité, honneur et service de la patrie...
Le prêtre de Langon en charge de cette jeunesse girondine dit en substance : « soyez au fond du cœur fiers d’être de ceux dont les noms pourraient s’inscrire à la litanie émouvante des morts au champ d’honneur » ! Ces lettres adressées à ces jeunes adultes à Langon prouvent qu’en ces années difficiles, « la guerre est d’abord perçue comme une cause juste par les soldats catholiques, et la dimension sacrificielle du conflit ne doit être épargnée ».
Si les informations étaient rares, le soutien des familles sur place, la prière pour les morts du champ d’honneur, seront le quotidien du patronage le dimanche matin, jour accordé aux activités du patronage qui fonctionna doucement pendant ces années de guerre, privé de la jeunesse envoyée sur le front.
Les paroissiens exercèrent autour du curé l’aide ponctuelle aux plus démunis et la solidarité s’organisa car, faute de bras au masculin, les jeunes filles devinrent à leur tour les personnes incontournables pour répondre à la demande et occuper les emplois tenus par les hommes absents pour l’heure.
1914-18 décima le patronage et les familles : l’abbé Zabalo évoque autour de 150 jeunes gens morts et revenus blessés de la guerre, et le gouffre béant de ces années noires qui affectèrent la vie courante d’une société en plein essor depuis 1913 mais renvoyée à ces temps difficiles avant qu’un nouveau vicaire en la personne de l’abbé Bidondo originaire de Saint Just Ibarre ne reprenne le recrutement en faveur des Jeunes Basques à Hasparren !
Le temps des marraines de guerre fut pour la guerre suivante et l’Indochine. Les vicaires d’Hasparren alimentèrent en 1943 leur bulletin de liaison avec les jeunes soldats « aufa muthilak » qui porte la signature de l’abbé Larzabal, connu comme auteur basque de théâtre, et de l’abbé Larregain autre acteur de premier plan dans le suivi du patronage des Jeunes Basques.
Mais cette histoire postérieure dans la cité est déjà d’une autre époque !