Samedi dernier, c’est sur les traces de La Fayette et de Victor Hugo que les Amis d’Arnaga se sont embarqués sous un ciel d’azur à Pasajes/Pasaia pour découvrir le musée-chantier naval d’Albaola dans la baie du port. Une visite conviviale organisée par le président des Amis d'Arnaga Christian Perret et l’historien-journaliste Alexandre de La Cerda.
Pasajes communique avec la mer par un étroit goulet situé entre les monts Ulia et Jaizkibel qui débouche sur une large baie propice aux installations portuaires. L’estuaire de Pasaia possède le plus important port commercial de Guipuzcoa.
Les deux quartiers historiques qui forment la commune de Pasaia sont les villages de « San Pedro » (Saint Pierre) à l’Ouest et de « Donibane » (San Juan ou Saint Jean) à l’Est, nés sur les rives opposées à l'entrée du port de Pasaia.
Au cœur de la rue principale dans le vieux quartier Donibane/San Juan. à Pasajes, la chapelle votive porte une pierre datant du 814 commémorant la victoire des tribus vasconnes à Roncevaux afin de venger la vendalisation de Pampelune par les troupes de Charlemagne. A quelques mètres, une autre plaque indique que Gilbert du Motier, marquis de La Fayette, embarqua en 1777 à bord de La Victoire pour son premier séjour en Amérique, afin de mener la guerre d’Indépendance. Un an plus tôt, en juillet 1776, les députés des treize provinces réunis en congrès à Philadelphie avaient proclamé l'indépendance des provinces anglaises qui se constituèrent en république fédérative sous le nom d'Etats Unis d'Amérique. Louis XVI y vit une occasion d’affaiblir l'Angleterre dont la marine était prépondérante sur toutes les mers. Ce qui permit le départ de La Lafayette en Amérique.
Près d’un demi-siècle plus tard, le séjour de Victor Hugo (1802-1885) marqua aussi l’histoire de Pasajes et du Pays Basque. En 1811, encore enfant, le petit Victor avait rejoignit son père, Léopold-Joseph Hugo, général de l’armée de Napoléon en garnison à Madrid. Ce dernier participa à la Guerre de l’Indépendance Espagnole, et resta un mois à Bayonne. C’est ainsi qu’en mémoire de leur séjour, une des rues de la ville porte depuis le nom de l’écrivain.
Adulte, Victor Hugo retourna en 1843 au Pays Basque afin de se remettre de « l’échec » de sa pièce « Les Burgraves. Dans son journal de voyage publié après sa mort sous le titre « En voyage, Alpes et Pyrénées » (1890), Victor Hugo s’aventure dans les étroites rues où les maisons blanches portent des linges aux fenêtres. Puis il décrit la demeure du XVIIème siècle, un ancien « palais » où il habita dans le vieux quartier San Juan : « C ́est là une maison comme on n ́en voit nulle part. Au moment où vous vous croyez dans une masure, une sculpture, une fresque, un ornement inutile et exquis vous avertit que vous êtes dans un palais; vous vous extasiez sur ce détail qui est un luxe et luxe et une grâce, le cri rauque d ́un verrou vous fait songer que vous habitez une prison; vous allez à la fenêtre, voici le balcon, voici le lac, vous êtes dans un chalet de Zug ou de Lucerne. Et puis un jour éclatant pénètre et remplit cette singulière demeure; la distribution en est gaie, commode et originale ; l ́air salé de la mer l ́assainit ; le pur soleil de midi la sèche, la chauffe et la vivifie. Tout devient joyeux dans cette lumière joyeuse.
Partout ailleurs la poussière est de la malpropreté. Ici la poussière n ́est que de la vétusté. La poussière d ́hier est odieuse ; la cendre de trois siècles est vénérable. Que vous dirai- je enfin ? dans ce pays de pêcheurs et de chasseurs, l ́araignée qui chasse et qui tend ses filets a droit de bourgeoisie. Elle est chez elle. Bref, j ́accepte ce logis tel qu’il est ».
Actuellement la demeure baptisée « maison Victor Hugo » transformée en musée est gérée par le Département de Tourisme de l'Agence de Développement Régional Oarsoaldea. A son rez-de-chaussée se trouve l’office de Tourisme, au premier étage.
Les techniques ancestrales des charpentiers basques
Depuis la terrasse, le groupe des Amis d’Arnaga aperçut au loin le musée-chantier naval d’Albaola sur l’autre rive (à l’Ouest), à proximité de l’embouchure vers l’océan Atlantique, au quartier San Pedro à Pasajes.
Toujours sous un soleil rayonnant, les traversées aller-et-retour de la baie se firent sur un charmant bateau en bois. Le groupe d’amis bercé par l’eau de la mer découvrit le chantier naval et la vue plongeante magnifique sur l’Océan qui le prolongeait, puis s’aventura dans le chantier où des histoires extraordinaires sur les exploits des baleiniers commentés par une étonnante guide basco-belge les attendaient.
Depuis environ quatre ans, ce chantier-école naval construit une baleinière du XVIème siècle d’après les techniques ancestrales. Il y a quelques années, dans les eaux froides de l’Océan canadien, l’épave d’un baleinier basque du XVIème avait été ainsi retrouvée par une équipe d’archéologues. Aujourd’hui, devenue symbole du patrimoine culturel subaquatique de l’Unesco, cette « relique » a permis de redécouvrir les techniques ancestrales des charpentiers basques, témoignage de l’histoire locale du pays.
En 2013, capitale culturelle européenne, Saint-Sébastien - avec l’appui des gouvernements basque et canadien - avait décidé de sponsoriser la reconstruction d’une réplique de ce baleinier du XVIème à Albaola.
Aujourd’hui le public découvre le vaisseau dont il manque encore plusieurs ponts ainsi que le château arrière. Lors de la visite émaillée d’explications détaillées sur la vie des pêcheurs de baleines, la guide fit remarquer que ces Basques buvaient par jour trois litres d’un cidre qui, contrairement au vin, leur évitait le scorbut et d’autres maladies grâce à l’apport de vitamine C ! Traditionnellement produit au Pays Basque, ce cidre sec est proposé dans de nombreux restaurants. Afin de déguster cette boisson dans une cidrerie, le groupe des Amis d’Arnaga s’aventura dans la bucolique et très rustique cidrerie Ola, une ancienne forge – comme son nom l’indique (en basque) - au pied des Trois Couronnes, non loin de la frontière. Une journée ensoleillée où tout le monde repartit enchanté !
Alexandre de La Cerda a concocté la prochaine excursion des Amis d’Arnaga qui aura lieu le mercredi 7 juin dans la ville moyenâgeuse d’Oñate avec visite de son Université Renaissance et de l’église au cloître gothique enjambant la rivière, déjeuner dans une tour féodale du XIIIe siècle et montée à la basilique d’Aranzazu - sculptures contemporaines d’Oteiza et peintures de Nestor Basterrechea – (s’inscrire auprès du président Christian Perret à Cambo, tél: 06 64 79 23 64).
Anne de Miller La Cerda (source AlC)