0
Tradition
L'eau et le toucher qui purifient dans les traditions religieuses
L'eau et le toucher qui purifient dans les traditions religieuses
© DR - Jésus guérit la belle-mère de Pierre

| François Xavier Esponde 1170 mots

L'eau et le toucher qui purifient dans les traditions religieuses

1 – Les vertus de l’eau
Usagers de l’eau courante et du tout-à-l’égout, nous imaginons avec peine l’importance accordée à l’eau de purification dans les rites religieux du temps passé.
L’usage d’un bénitier à l’entrée d’un lieu de culte chrétien évoque à peine la place tenue par l’eau dans la vie des fidèles et les rites qui accompagnaient toute demande de purification de l’individu dans la vie quotidienne.
Pour exemple, la place de la mikvé dans le judaïsme, ou ce bassin de purification dont on trouve encore des vestiges dans les maisons juives du quartier Saint-Esprit à Bayonne, du côté de Peyrehorade, La Bastide-Clairence, Bidache…Les règles sanitaires et religieuses y étaient quotidiennes, ponctuées - selon les travaux accomplis - de la répétition des prières accompagnant une purification personnelle : on connaît la formulation de cette demande dans sa version liturgique, « Loué sois-tu Eternel, notre Dieu,Maître du monde qui nous a sanctifiés, par ses commandements et nous a ordonné l’ablution des mains ».
Si le rite se répète du lever au coucher du soleil, jusqu’à sept fois si nécessaire, l’inspiration de la prière ne laisse aucun doute, accompagnant et poursuivant les dispositions sanitaires prises pour accomplir son labeur au quotidien.
- Plus familiers à nos habitudes, l’eau qui purifie prend place dans les célébrations sacramentelles de la vie chrétienne, et particulièrement lors de la messe où l’on introduit la prière de purification à l’offertoire des dons, pour la présentation rituelle.On reconnaît au demeurant une proximité dans ces prières entre la purification en vue de l’eau et celle en vue du pain alimentaire, que le fidèle associe et ajoute l’une à l’autre pour conformer sa vie à ses invocations de l’Eternel.
Et demeure encore cet ajout de l’eau dans le calice de la messe depuis le Concile de Trente (13 décembre 1545). L’eau se mêle au vin du sacrifice pour conformer la prière au rite de la rédemption et du salut en Jésus le Christ, présenté sous le signe du vin et de l’eau de toute création de la part de Dieu.
- Du côté des Musulmans on distingue trois types d’ablution, les petites, les grandes et les sèches, faute d’eau, d’intention spirituelle de la part du croyant.
Chacune de ces ablutions a ses rites, ses invocations et ses exigences :
- Le rite juif du matin croise les mains droite et gauche, et l’eau versée sur l’une et sur l’autre et la prière acher yatvar disent les fidèles versés dans ces rites.
La purification prenant racine dans la foi personnelle avant quelque autre désignation socio/sanitaire de l’individu dans sa vie commune. Elle peut même se répéter en fin de journée, à l’heure du coucher où, en fonction d’observances particulières, des fidèles réitèrent  de telles pratiques selon leur propre tradition !
Or, la place de l’eau dans nos espaces sacrés a perdu de son importance. Limitée au bénitier à l’entrée de l’église, elle disposait jadis d’un baptistère imposant qui perdit de son importance. Jusqu’à faire l’objet - comme on le voit aujourd’hui en temps d’épidémie - de précautions d’hygiène s’appliquant même à la célébration sacramentelle ou au report des baptêmes pour des jours plus heureux de la vie communautaire et ecclésiale.
2 – Les prophéties du toucher.
La précaution d’usage porte davantage encore sur la lecture commentée des guérisons faites par les prophètes bibliques, dans leur toucher de la maladie des sujets en souffrance.
Les grands prophètes sont consacrés dans leur vocation par le toucher et la fonction de la bouche.Un ange approche une pierre brûlante des lèvres d’Isaïe  pour le purifier, une façon symbolique d’y déposer la Parole (Jérémie 1,9).
On dira d’Ezékiel, « il doit manger la Parole mise dans sa bouche », à savoir le rouleau de la Parole de l’Eternel (Ez 2, 8.)
Daniel, quant à lui, tombera la face contre terre lorsqu’une main invisible le touche et lui demande d’accomplir la mission demandée (Daniel 10,9).
Au-delà du geste posé, la signification de la mission requise porte toute la force et l’attente de l’Eternel, dont le langage approché pour le transmettre est empreint de signes invisibles du langage divin, si habituel dans la culture sémite.
Jésus Yeshua, fera de même.La belle-mère de Pierre est malade. Jésus lui touche la main et, comme relaté dans l’Evangile, restaure en cette personne sa dignité et sa santé déficiente due à cette fièvre qui pouvait entraîner la mort (Mt 8, 14-15).
On ne peut rapporter la condition épidémique d’aujourd’hui à celle du lépreux en cette antériorité biblique, qui conduisait à la mort toute vie, en contact avec la maladie contagieuse et sans solution thérapeutique.Une mission que ne cessent d’accomplir soignants et praticiens du moment confrontés à la menace de propagation du coronavirus.On connaît déjà le prix de la vie qu’entraîne cette guerre contre la mort menaçante de tous ceux qui ne respectent pas les risques.
Image du Serviteur Souffrant décrite par Isaïe, « c’étaient nos souffrances qu’il portait, nos douleurs dont il était chargé » (Isaïe 53,4).
Désormais la question lancinante pour chacun demeure. Faut-il se préserver de la maladie par principe et précaution, ou par fonction curative et sanitaire assurer le pouvoir de guérison d’une épidémie en l’état ?
Le pape, chef suprême des croyants catholiques, n’a cessé d’exhorter à la présence auprès des malades en danger de mort, invitant les prêtres à ne pas se dérober à cette mission.En Lombardie, en Espagne, dans notre propre région, les premières victimes des deux volets, soignant et malade, se font jour.Si se réalise pour la plupart le mystère de la guérison possible, les premières victimes se comptent déjà en chiffres lourds désormais.L’expérience du traitement, celle de la recherche, celle encore du suivi individuel des patients et des familles, interrogeront la conscience de tout un chacun.
Chez les sémites, toute guérison de leur état de vie appartenait à l’ordre de la foi en l’Eternel.Convaincus de vivre l’incarnation de la béatitude, heureux les coeurs purs, ils verront Dieu (Mt, 5,8), le miracle concret de leur propre guérison s’inscrivant dans cette force divine.Qu’en sera-t-il au terme de cette péripétie du temps pandémique de ce début d’année 20 pour le monde entier selon notre lecture de l’histoire ?
Les croyants et crédules se réjouiront de leur état.Les incroyants et les plus sceptiques conjureront le destin avec le hasard du moment.Mais ils seront plus nombreux, ceux qui se poseront encore bien des questions en attente de réponses, chez les soignants sur l’origine de cette épidémie, sa propagation brutale, et la quête des traitements nécessaires pour y parvenir.D’aucuns diront peut-être enfin, la vie est parsemée de mystères, d’explications incomprises, où toute guérison garde sa part de silences en attente de réponses pour l’après !...

Jadis on prêtait à l’eau des forces invisibles de guérison.Les grands fondateurs de traditions spirituelles ont souvent évoqué le pouvoir de la grâce du toucher spirituel pour leurs fidèles.Dans une médecine parée de plus en plus d’appareillage ultra technicisés, le rapport au patient ne perd de vue la relation personnelle du praticien à son hôte dont le langage des sens de toute guérison est dans le toucher, le regard, les senteurs, l’ouïe, le constat clinique du traitement, qui qualifient ensemble le but recherché de la santé des sujets lésés par les maladies !

Répondre à () :

| | Connexion | Inscription