A l'occasion de cette nouvelle édition de sa fête annuelle, nous vous proposons de suivre la route de la Corniche pour parler de quelques domaines et de destinées peu communes. Car cette année encore, ces quelques kilomètres de côtes longeant les falaises maritimes seront réservés aux piétons et aux vélos. De nombreuses animations sont prévues de 10h à 18h, depuis l'exposition « Gestion des risques littoraux » au Blockhaus (près de Sokoa) jusqu'au château d'Abbadia où est proposé un concours de peinture en passant par des balades « Géologie pour tous » à Haizabia (près du domaine de Bordaberry) et diverses activités liées à la connaissance du littoral océanique au Ball-trap (sur les hauteurs, d’où l’on embrasse une fantastique vue sur le large), sur le chemin Etzan Borda (« les oiseaux de la corniche basque ») ou l’exposition « Patrimoine géologique du littoral basque » à Asporotsttipi.
L’occasion de rappeler la vie et de l’œuvre d’Antoine d’Abbadie (1810-1897), assurément un des plus grands savants du Pays Basque. Philanthrope, linguiste, il possédait de nombreuses langues anciennes – mais il fut aussi le restaurateur des concours de bertsus en basque, explorateur, anthropologue, bref, un scientifique aux multiples facettes.
Quand on arrive à Hendaye par la route de la Corniche, on découvre, planté sur un domaine au bord de l’océan, un château étrange par son style, par son emplacement ; Que vient faire cet austère manoir irlandais à cet endroit ? Qui est ce personnage d’Abbadie ? Cette fête de la Corniche constitue donc une bonne occasion d’évoquer le domaine d'Abbadia et son savant constructeur.
Mais sur cette route de la Corniche, il est un autre domaine peu connu au milieu d’un beau parc. C’est là que naquit la destinée musicale de deux pianistes virtuoses : il s’agit des célèbres sœurs Labèque dont les parents, le Dr Labèque et son épouse Ada, étaient copropriétaires du domaine de Bordaberry.
L’actuel domaine de Bordaberry à Urrugne faisait encore partie au XIXe siècle des possessions d’Antoine d’Abbadie, l’explorateur et le mécène de la culture basque que nous évoquions tout-à-l'heure. Sans héritier, d’Abbadie eut la sagesse extrême de laisser le domaine à l'Académie des Sciences dont il fut président, tout en hérissant le legs de clauses contraignantes et conservatoires.
Soit cinquante-deux hectares sur les trois cent quarante d'origine nous sont ainsi parvenus intacts, réserve pour oiseaux migrateurs et banque d'espèces fruitières locales menacées de disparition... On y accueille même depuis quelques années des artistes en résidence dans son ancienne ferme Nekatoenea.
Quant à Bordaberry, il s’agit d’une soixantaine d'hectares de landes et de prés qui avaient été séparés du domaine d’Abbadia et acquis par Marie-Léonie Mortier de Trévise, arrière-petite-fille du fameux maréchal Mortier, créé duc de Trévise par Napoléon et qui représenta plus tard la France à Saint-Pétersbourg. Mariée au prince Rodolphe-Marie-Rogatien de Faucigny-Lucinge et de Cystria, elle passa une grande partie de sa vie à transformer la première construction élevée à Bordaberry, qui était une espèce de manoir sombre de style Tudor, en agréable résidence dans le goût " néo-régionaliste " si prisé des années 30. Mais, elle ne put hélas profiter pleinement de ses efforts, et mourut ruinée à Biarritz après avoir vendu son château au général canadien Brutinel. Celui-ci y fit venir après la 2e Guerre mondiale son ami Winston Churchill. Philippe Oyhamburu et son groupe de musiciens et de danseurs basques, dont Michel d’Arcangues, jouèrent une aubade sur le fronton de Bordaberry à l’homme d’Etat britannique qui venait de perdre les élections dans son pays. Churchill visita la région, vint à Sare à l’invitation de Paul Dutournier à qui il aurait déclaré : « en somme, vous autres contrebandiers basques, vous êtes les précurseurs de l’Union européenne ! Mais, surtout, Winston Churchill peignit. Depuis sa chambre au 1er étage, un balcon donnait sur l’océan, distant de quelques 500 m, et aucune forêt de pins (plantée depuis lors), ne venait en barrer l’horizon.
Plus tard, Bordaberry fut une maison de santé connue sous le nom de « L’Enfant Roi » dirigée par le Dr Labèque dont l’épouse Ada, très fine musicienne et remarquable pédagogue a formé des générations de jeunes pianistes, parmi lesquels ses deux filles Katia et Marielle…
Les manœuvres insidieuses de promoteurs servis par quelques veules compromissions locales en ont fait un objectif immobilier au début des années 90. Enfin heureusement, la demeure principale, Bordaberry, est encore debout.
« Un dimanche sur la Corniche » : programme complet sur www.le64.fr/
Conseils pratiques : sur le domaine d’Abbadia, les chiens ne sont pas admis même tenus en laisse. Les vélos sont interdits sur le sentier du littoral et le Domaine d’Abbadia.
Parking : en venant de Bayonne, pour votre confort et votre sécurité, il est recommandé de se garer le long de la départementale D913 (entre le lycée maritime et l’entrée de la route de la Corniche). Un kilomètre de route est neutralisé à cet effet, le parking y est autorisé des deux côtés, libre et gratuit. En venant d’Hendaye, parking de la station d’épuration (à coté du domaine d’Abbadia) et le long de la route.
Alexandre de La Cerda