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Bayonne : la troisième édition de Confluences, autour de la famille Delay
Bayonne : la troisième édition de Confluences, autour de la famille Delay
© Anne de LC

| Yves Ugalde et Alexandre de La Cerda 1435 mots

Bayonne : la troisième édition de Confluences, autour de la famille Delay

« Le plaisir d’honorer une très grande famille bayonnaise sert de fil directeur intéressant qui tisse le lien avec l’histoire de la ville », expliquait le maire de Bayonne dans sa présentation de cette troisième édition de Confluences, manifestation qui « a trouvé son public, comme c’était le cas naguère pour les Entretiens de Bayonne ». Et Pierre Vilar, l’orchestrateur de l’événement, d’ajouter que c’était « l’occasion de parler de littérature en diversifiant les angles : biographies, livres et toros, romans, etc. ».

La première séance mardi matin au Musée Basque débuta par une passionnante évocation de la généalogie des Delay (avec projection de photos de famille) présentée par le conservateur du musée, Olivier Ribeton, que son ascendance rattache également au Delay, suivie de témoignages sur Jean et Maurice Delay, médecins et écrivains, dont la vocation s’apparentait à Tchekhov qui considérait « la médecine comme sa femme légitime et la littérature comme sa maîtresse », et lorsqu'il s'ennuyait avec l'une, il allait coucher avec l'autre !

Nous reviendrons sur cette passionnante manifestation pour en évoquer quelques aspects. En attendant, nous « cédons le clavier » volontiers à notre ami Yves Ugalde, adjoint à la Culture bayonnais :

« Dans le cadre de la semaine « Confluences » que la Ville de Bayonne consacre aux Delay, une grande famille de la cité, les intervenants évoquaient ce matin la figure de Jean Delay. Le fils de Maurice Delay, le chirurgien qui fut aussi maire de 1947 à 1958.

Jean, bachelier à 14 ans, était un fou de lecture. Il avait d'ailleurs appris seul à lire à l'âge de deux ans. Sa mémoire, qui fut, plus tard, un des ressorts fondamentaux de sa littérature, impressionna très tôt son père.

Le grand jeu du soir, à la maison, consistait pour Maurice à lire à son fils deux pages d'un ouvrage qu'il cachait ensuite sous son oreiller, pour prévenir toute tricherie, et à lui en demander la restitution le lendemain matin. Ce que Jean faisait au presque mot près.

L'adolescent bayonnais n'avait, en revanche, aucun intérêt marqué pour la chirurgie, ce qui plongeait son père dans une profonde déception. La clinique Delay n'aurait donc pas de successeur éponyme. Une perspective douloureuse, et, pour dire vrai, inadmissible aux yeux de Maurice qui tenta de contourner la difficulté en envoyant son fils chez des artisans de la ville pour lui délier les doigts sans lesquels le chirurgien n'est rien.

Chez le relieur, Jean s'ennuyait. Les livres, pour lui, ça se dévorait beaucoup plus que ça ne s'habillait, même de nobles couvertures. Chez l'électricien, ce fut pire. L'électricité, Jean la redoutait.

Il fallait se rendre à l'évidence, pour Jean, la médecine oui, mais pas la chirurgie. La lecture avait déjà fait son œuvre et c'est bien le fonctionnement de l'esprit, donc du cerveau, qui le fascinait. Ce sera donc la psychiatrie dont il deviendra un des phares. Au point d'entrer à l'Académie des Sciences, puis, plus tard, à l'Académie Française. Ses quatre volumes d'« Avant-mémoire » ont fait et font référence. On y évolue dans le dédale des ancêtres maternels de l'auteur, à la croisée de chemins basques et gascons qui sont aussi les nôtres.

L'électricité crainte du temps des stages forcés à Bayonne, il la retrouve au sommet de sa carrière médicale. Les années 30 sont celles de l'électrochoc triomphant. Il est admiratif devant les désordres du cerveau que cette thérapie aux aspects plutôt brutaux parvient à vaincre. Cela ne l'empêchera pas de poursuivre des recherches poussées pour ouvrir les portes médicamenteuses de la psychiatrie française dans les années 50.

La mémoire, ses performances éblouissantes, sa dissolution dans la vieillesse ou des pathologies qu'il aide à cerner de mieux en mieux, c'est aussi celle d'une famille hors du commun qui n'a toujours pas dit, et encore moins écrit, son dernier mot avec les deux sœurs Delay, filles de Jean. L'une psychanalyste, l'autre académicienne, que j'ai le privilège de traiter en amies bayonnaises pendant toute une semaine. Et le cercle de famille ne demande qu'à grandir jusqu'à dimanche. Ces dames se promènent en ville comme des filles du pays toutes à la joie simple de revenir sur les traces d'une jeunesse heureuse qui aura fait d'elles de fausses Parisiennes aimant le jambon, la piperade et la fête basque entre deux références à Freud ou à Giraudoux.

Yves Ugalde

 

Programme :

Vendredi 2 mars

Librairie Elkar (Place de l’Arsenal) à 17h : Rencontre-signature : Claude Delay

Critique, psychanalyste et biographe, Claude Delay est l’auteur de romans publiés aux éditions Gallimard (Paradis noir, Le Hammam) et aux éditions Des femmes fondées et animées par Antoinette Fouque, figure essentielle du féminisme : Les ouragans sont lents, Passage des singes. Évocation du mentir-vrai de l’écriture romanesque, des animaux aimés, d’une mémoire vive dont les cicatrices portent le récit.

Musée Bonnat-Helleu à 19h : « Sorti de sa réserve : « Francesca da Rimini et Paolo Malatesta », huile sur bois de Jean Auguste Dominique Ingres, 1850.

Florence Delay présente une œuvre du Musée Bonnat-Helleu, sortie des réserves du musée à l’occasion de la manifestation. Introduction par Sophie Harent, conservateur en chef du Patrimoine et directrice du Musée. Vente et signature sur place des livres de Florence Delay, et d’essais sur Ingres à l’issue de la rencontre (Attention : réservation obligatoire au tél. 05 59 46 63 60, de 8h à 17h, ou par courriel à l'adresse : public.mbh@bayonne.fr

Samedi 3 mars

Grand Salon de la Mairie à 10 h : « Graal Théâtre ». Une lecture à la table par Jacques Roubaud et Florence Delay d’extraits de Graal Théâtre (Gallimard, 2005). Une continuation contemporaine, tissée d’humour, d’enchantements et de coups de théâtre, du roman breton des chevaliers de la Table ronde, ce « trésor épique et féerique, source d'un merveilleux qui enchanta l'Europe entière pendant des siècles ». Jacques Roubaud, l’un des poètes majeurs de notre époque, se dit avec Florence Delay le scribe de cette matière universelle mise en dialogue entre les forêts, les châteaux et la chambre d’amour. Vente et signature sur place des livres de Jacques Roubaud et Florence Delay (Entrée libre).

Grand Salon de la Mairie à 17h : Rencontre littéraire, avec Claude Delay : Patrick Grainville

Entretien sur le roman avec Claude Delay, psychanalyste, romancière, biographe et critique littéraire, en dialogue avec Patrick Grainville, romancier (prix Goncourt en 1976 pour Les Flamboyants, Seuil), auteur en 2018 de Falaise des fous, unanimement salué par la critique. Auteur de 26 romans publiés aux éditions du Seuil, Patrick Grainville a publié également de nombreux essais sur la peinture. Il revendique un « réalisme débridé, mâtiné d’imagination ». Son roman L’Atlantique et les amants (2002) évoque avec puissance la côte basque et landaise, la corrida des vagues dans « l’Atlantique ouvert ». Vente et signature sur place des livres de Patrick Grainville et Claude Delay (Entrée libre).

Dimanche 4 mars

Grand Salon de la Mairie à 10h : Rencontre littéraire : Autour de Florence Delay

Écrivain, traductrice, comédienne et critique dramatique, Florence Delay est la quatrième femme élue à l’Académie française. Elle occupe depuis 2000 le fauteuil n°10, qui fut celui d’Alfred de Musset ou de Jean Guitton. Dialogue et table-ronde en sa présence autour de ses romans, ses essais, son écriture, avec Jean-Yves Pouilloux, écrivain et essayiste, professeur honoraire à l’UPPA, et Jacques Lecarme, critique, professeur honoraire à la Sorbonne nouvelle, animés par Pierre Vilar. Vente et signature sur place des livres de Florence Delay, Jean-Yves Pouilloux et Jacques Lecarme (Entrée libre).

Grand Salon de la Mairie à 11h30 : Projection du film de Maurice Bernart Mort de Raymond Roussel (1975, 16 min.) Sur une musique d’Eric Satie, à partir des écrits de Leonardo Sciascia (Atti relativi alla morte di Raymond Roussel – Actes relatifs à la mort de Raymond Roussel, 1971). Avec Florence Delay, Pierre Decazes.

Grand Salon de la Mairie à 15h : Florilège Delay, par Denis Podalydès.

Lecture par Denis Podalydès, sociétaire de la Comédie française, d’un montage de textes. Connu d’un large public pour ses rôles au théâtre comme au cinéma, Denis Podalydès est également metteur en scène et écrivain : Scènes de la vie d'acteur (Seuil, 2006), Voix off, (livre/CD,Mercure de France, 2008), La peur, matamore (Seuil, 2010) et le roman Fuir Pénélope (Mercure de France, 2014). Il a récemment composé l’Album Shakespeare de la collection La Pléiade. Il a reçu le Molière de la révélation théâtrale en 1999 pour son rôle dans Le Revizor et Molière du metteur en scène en 2007 pour Cyrano de Bergerac. Il sera la voix en mars 2018 du spectacle Monsieur Django et lady Swing, à la Salle Pleyel, avec The Amazing Keystone Big Band, et met en scène à partir du mois de juin au théâtre des Bouffes du Nord Le Triomphe de l’amour de Marivaux. Vente et signature sur place des livres de Denis Podalydès, Jean Delay, Claude Delay, Florence Delay (Entrée libre).

 

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