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Portrait
Robert Schuman bientôt déclaré « vénérable »
Robert Schuman bientôt déclaré « vénérable »

| François-Xavier Esponde 1002 mots

Robert Schuman bientôt déclaré « vénérable »

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Scy-Chazelles : des statues de Robert Schuman, Alcide de Gasperi, Konrad Adenauer et Jean Monnet par l’artiste russe Zurab Tsereteli rendent hommage aux pères de l’Europe ©
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1- Robert Schuman parmi les pères de l’Europe.

Robert Schuman considéré comme “le père de l’Europe” devrait être prochainement déclaré vénérable et “postulant” à la béatification, en attente de confirmation d’un miracle en vue de sa béatification, selon des sources autorisées du Vatican.
Une vie d’exception qui se déroule depuis 1886, année de sa naissance au Luxembourg à sa mort en septembre 1963.
Pour Robert Schuman “la solidarité effective entre les deux pays France-Allemagne permettrait de garantir la paix en europe.”

L’idée de génie de Robert Schuman “de placer la production franco allemande de charbon et d’acier sous une autorité commune et une organisation permettant aux autres pays de s’y associer donnera un élan nouveau à la situation de ces pratiques nationales dans chaque pays.”
Le 9 mai 1950 au Quai d’Orsay à Paris, Schuman entre dans l’histoire.

Cinq ans après la fin de la terrible guerre, vouloir effacer ce passé de sang, sera le défi de l’engagement ensemble des deux belligérants sur un pied d’égalité, dans la construction d’une Europe unie et solidaire.
Le pari est fou, les avis divergent mais Robert Schuman persiste.

On taxe son promoteur d’être “rusé comme le serpent et candide comme la colombe”, tiré du verset de l’évangile de Matthieu 10,16. Sa vie est bien à l’image de son récit européen personnel.
Né à Luxembourg le 29 juin 1886 d’une mère catholique. Elle l’initie à la vie spirituelle et à la prière. Fils unique demeuré célibataire, sa mère disparaîtra dans un accident de la route.

A 25 ans, la vie du jeune diplômé de Droit des plus prestigieuses universités allemandes, de Bonn – Berlin et de Munich change de visage.
Avocat brillant à Metz, il se lie d’amitié avec l’évêque Mgr Benzler, ancien père abbé bénédictin de l’abbaye Maria Laach près de Cologne qui l’initie au sens de la liturgie, à la vie spirituelle et le nomme président de la jeunesse catholique du diocèse.

Mobilisé en 1914 dans l’armée allemande, il ne participe pas aux combats, et dès 1918, par le retour de l’Alsace Lorraine dans le giron français, il devient député de la Moselle au Parlement pour une carrière qui durera quarante ans.
Il eut préféré exercer son métier d’avocat, s’occuper de questions sociales et de sa famille mais ne put résister à la pression de ses amis politiques qui le désignent pour la mission de député.

L’homme est jugé chrétien sans complexe ni fausse honte, intègre et estimé par ses pairs.
Il lie des amitiés spirituelles avec deux penseurs éminents de l’époque, Maurice Blondel et Jacques Maritain.

Il faut se souvenir qu’en 1940 il fut arrêté par les nazis et envoyé en résidence en Allemagne. Il fuit ce régime imposé et passe dans la clandestinité en 1942, se cache en zone libre en nos régions du sud, dans des couvents et des monastères.

A la Libération, il sera frappé d’indignité nationale pour avoir participé sans y siéger au premier gouvernement du Maréchal Pétain.
Relevé de cette mesure inique par le Général De Gaulle il rejoint en 1945 le parlement français.
Membre du MRP, le mouvement d’inspiration démocrate chrétienne, il en fut un membre actif et assidu.
Pourvu de nombreuses fonctions ministérielles des plus prestigieuses, il travaille à “la réconciliation franco allemande sans relâche. Une Europe unie et solidaire sera la seule issue à l’histoire passée faite de haines et de rancoeurs ininterrompues”, disait-il.

En 1953, sa carrière ministérielle achevée, il arpente les routes franco-allemandes pour prêcher en faveur du dialogue et de la paix jusqu’à sa mort initiée par la maladie, qui l’arrache à l’affection des siens le 4 septembre 1963.
Son ami pape Paul VI dira à sa mort que “ses prières s’élèvent vers Dieu pour le repos de l’âme chrétienne de Robert Schuman toujours prompt à servir d’une foi infatigable l’unité européenne.”

2 - Pourquoi déclarer maintenant Schuman « vénérable » et postulant à la béatification ?

Depuis désormais trente ans, cette cause avait été introduite à Rome par le diocèse de Metz pour Robert Schuman. Les questions s’éveillent : pourquoi maintenant, en ces temps difficiles pour l’Europe soumise à la pandémie du covid qui a perturbé le déroulé de la vie normale du continent ?

Faut-il y voir un retour à la démocratie chrétienne dont Robert Schuman fut un inspirateur fidèle ? Un croyant convaincu de la légitimité de la doctrine sociale de l’Église ?
Un rappel de son actualité pour les partis politiques du sud du continent qui s’en sont inspirés au fil du temps et ont pu prendre quelque distance avec Rerum Novarum du pape Jean XXIII ?
On se souvient aussi de la Lettre encyclique « Graves de Communi Re » du pape Léon XIII qui interrogeait sur les fondements de la démocratie chrétienne dès ses origines...

Une origine chrétienne constamment rapportée par la définition du bien commun de l’humanité contenue dans l’Evangile du Christ.
Cette adhésion chrétienne à l’engagement public des politiques peut-il restaurer l’image du sens commun de la res publica, bien malmenée au cours de ces dernières années par des agissements suspects, parfois scandaleux de l’usage du pouvoir institutionnel des décideurs européens ?

Le défi partagé entre l’Allemagne et la France de la mise en commun industrielle du charbon et de l’acier à la fin de la guerre, peut il augurer d’autres projets innovants pour aujourd’hui, au bénéfice commun d’un futur européen inscrit dans la durée ?
La crise internationale du covid a sans aucun doute bouleversé les donnes d’une gestion habituée des affaires économiques au sein de la vieille Europe.
Verra-t-on des programmes politiques inspirés de la démocratie chrétienne introduits dans les échéances du Conseil Européen ?

On préjuge déjà qu’une possible béatification d’un homme de dimension reconnue, puis élevé à la sainteté par les croyants, dépassera les frontières internes de l’Eglise, par le culte adressé à un homme de foi universelle dont le miracle à venir pourrait encore nourrir l’engagement des institutions et des hommes désignés pour l’accomplir.

Autant de questions ouvertes autour de cette cause, maintenant et dans des délais brefs avant l’été 2021, selon des sources autorisées du Vatican.

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