Agnès Varda (89 ans !) aux cheveux bicolores, aux blouses bariolées, reste animée d’une créativité inébranlable. En marge de l’industrie cinématographique, elle demeure une artisane, une glaneuse. « Rien ne se perd tout se transforme ! », telle pourrait être sa devise.
Son avant-dernier opus, « Les Plages d’Agnès » (2008), un « documenteur » selon sa définition, nous avait enchantés par son ton léger et nostalgique sur ses années Jacques Demy (1931 – 1990), son mari trop tôt disparu. Une brassée de souvenirs amusants, drolatiques et douloureux. Chez Agnès Varda, la mémoire ne flanche pas !
Entre 2015 et 2016, avec JR, « street artist » reconnu mondialement, elle parcourt la France des villages à bord de son camion photographique. Du nord au sud, d’est en ouest, ils s’arrêtent dans des bourgades pour photographier des habitants : gros plans, plans d’ensemble, qu’ils agrandissent en grand format. Ensuite, JR et son équipe collent ces affiches sur les murs des localités visitées. Ainsi, les murs reprennent vie par la grâce d’inconnus, de simples habitants, de résidents sur notre terre de France. Les lieux de collage sont souvent judicieux, parfois improbables, comme celui de l’ami disparu d’Agnès Varda, le photographe Guy Bourdin, sur un bunker littéralement planté en bord de plage à Saint-Aubin-sur-Mer. La première marée va faire disparaître l’affiche : image éphémère d’une vie trop courte. L’espièglerie de ce couple improbable, disparate, peut à l’occasion susciter, hormis les sourires, une réelle émotion quand, à la fin du film, Agnès Varda veut rencontrer à Rolle (Suisse) son ami Jean-Luc Godard. Elle est très émue. Le grand cinéaste qu’elle a connu jeune débutant fait du Jean-Luc Godard…Nous n’en dirons pas plus !
Ce film, court (89 minutes !) eu égard aux standards actuels (près de 2 heures de projection en moyenne !), est un enchantement pour le regard souriant, malicieux, que portent nos duettistes sur la « France Profonde » si proche, si loin de nous.
Un film à voir pour nous réconcilier en toute sérénité, avec notre entourage familier ou non.
Jean-Louis Requena