A - Images de l'art
L'art n'a cessé de refleurir autour de ce thème de la naissance de Jésus. Le langage des icônes en fut le support spirituel et esthétique depuis des siècles. On admire sans cesse la Nativité de l'Enfant Dieu comme un mystère de la foi des uns et comme une prouesse des artistes séduits par le sujet.
Dès lors, la Nativité dans l'art parle depuis les sarcophages anciens, aux peintures et mosaïques antiques, de ce trésor ineffable mais rendu visuel de la naissance du Dieu qui nous sauve, "Yeshua" dans l'histoire des hommes.
Les évangiles sont plus ou moins loquaces sur ce thème. Certains pour d'autres, tel ou tel plus austère et succinct sur la naissance de Jésus. laissant aux commentaires exégétiques et aux peintres la liberté totale de leur travail d'information.
Le temps médiéval et celui de la Renaissance sont riches de ce thème de la Nativité ou de la Noël des Ecritures saintes et bibliques, à la gloire de Marie, vierge et mère selon les artistes, présentée dans la première posture ou la seconde. Les deux à la fois, avec Jésus au cœur du message.
L'iconographie sacrée se déroule en trois temps, "les préludes dès le lieu choisi de Bethleem, ce recensement d'époque pour la population juive et l'attente de la naissance par l'annonce aux bergers et l'adoration des mages."
Le décor est planté pour la postérité de la naissance dans ce paysage épiphanique. Car il s'agit bien de la manifestation de l'Enfant Dieu autour de Joseph, Marie, Jésus, les anges, les bergers, et les mages.
Dès le second siècle, les premiers signes des artistes ont gravé, sculpté ou peint le profil de la Sainte Famille de Noël, de la Nativité divine.
Du IVème et Vème siècle naîtront ces illustrations religieuses et chrétiennes dans un environnement religieux différent. La catacombe de Priscille au second siècle représente "l'adoration des mages". On repère encore la Vierge, l'Enfant et le prophète en une autre fresque de la catacombe. Les artistes ouvriront la voie de l'iconographie ininterrompue de ce thème de la Nativité, si cher aux créateurs.
Sans oublier la catacombe de saint Sébastien où le récit de la crèche, de Jésus emmaillotté, associe dès sa naissance un thème spirituel en perspective, de sa fin tragique et sa crèche en forme de cercueil, dans une grotte aux formes des sites mortuaires. Jésus, dès sa naissance, porte chez les artistes les prémices de la mort et de la résurrection d'un sujet d'exception, à qui l'auteur d'art a donné toute sa gravité.
A Sainte Baume, en la basilique Sainte-Marie-Madeleine, on trouve encore sur un sarcophage une illustration de l'adoration des mages et de Jésus enfant. Un thème premier au Moyen Âge et fidèlement emprunté par les peintres.
Les historiens d'art rapportent la tenue de deux traditions iconographiques sur ce thème. En Occident, Marie mère assise porte l'Enfant sur ses genoux. Tel sera le modèle dominant jusqu'au XIVème siècle où sous l'influence italienne ; ensuite, la mère sera représentée à genoux, en état d'adoration de son Enfant et des volontés surnaturelles.
Le sujet de la naissance a donné libre cours aux créatifs. Marie assise, couchée, l'enfant sur le sein de la mère ou à côté, Joseph plus discret ou relégué à d'autres tâches. Une crèche qui viendra à son heure et occupera une place première. On cite au XII ème siècle la fresque de Parinay, à Agen des illustrations en la salle capitulaire de la cathédrale, à Saint Caprais
Les érudits de l'art soulignent qu'à partir du XIVème siècle, l'adoration des mages se substitue à la naissance de l'Enfant. Autre temps, autre regard sur cette naissance, une lecture commentée différente.
Dans la tradition occidentale, 21 peintres prestigieux de l'histoire de l'iconographie religieuse s'illustreront autour de la Nativité. Pas moins de 26 musiciens de la musique sacrée donneront des œuvres magistrales sur ce même thème. messes, cantates, oratorios,
Les quatre évangiles Marc, Matthieu, Luc, Jean, évoqueront la Nativité en leurs différentes interprétations;
Sans oublier les textes apocryphes qui ont une valeur esthétique exceptionnelle. Ces derniers renseignent sur des détails dont on mettra en doute la véracité mais non leur existence. Tel le thème de Marie vierge et mère, peu compris à cette époque mais repris par la pensée théologique au fil de l'histoire religieuse et chrétienne.
Le récit de Matthieu au temps des deux premiers siècles interroge mais la décision de fixer les quatre évangiles comme "canoniques" changera la lecture des témoins du temps sur ce sujet.
Le récit évangélique de Marc dans son dépouillement sert de référence scripturaire disent les exégètes. Luc serait bavard sur le thème. Matthieu séduit par le merveilleux "à l'orientale" de cette naissance réelle et racontée comme un récit littéraire et métaphorique. Selon un récit judéo hellénistique diront les spécialistes, de ces textes anciens.
B - Noël selon les apocryphes
On cite des récits évangéliques dits apocryphes ou romancés de circonstances et des modalités de la naissance de Jésus.
Le protévangile de Jacques est cité comme tel, encore l'ascension d'Isaïe, l'apocalypse d'Adam laissant libre cours à un imaginaire situé dans l'histoire des autochtones qui les partageaient.
Citons encore Justin de Naplouse qui raconte la naissance de Jésus dans une grotte, le dialogue avec Tryphon en 160 de notre ère. Dans une civilisation orale, il est vraisemblable que de tels déroulés devaient circuler en Orient pour illustrer la vie de l'enfant d'exception qu'était Jésus depuis sa naissance.
Comme rapporté, la figure et la maternité de Marie inspirait nombre des proches. Les questions ne manquèrent sur la naissance de l'enfant, l'état de sa mère, autant de sujets convenus d'hier comme d'aujourd'hui sur la divinité et des parents de la Sainte Famille de Jésus.
Il y avait encore le Pseudo Matthieu au VIIème siècle qui ne privèrent la grotte des figurants de toute crèche dès avant ce Moyen Âge si prompt à cette imagerie généreuse.
Grégoire de Nysse et Léon le Grand voyaient en l'âne et l'étable une symbolique d'époque. A savoir le bœuf comme une figure obstinée refusant de reconnaître la divinité de Jésus, et en l'âne réduit à la tâche de l'idolâtrie des peuples soumis aux croyances et superstitions païennes ou non chrétiennes : on ne saurait aujourd'hui emprunter ce langage aux contemporains, mais il ne serait pas possible de l'ignorer dans la tradition de la littérature religieuse passée. La construction de la basilique de la Nativité à Bethleem au IVème siècle sur plusieurs grottes ne fut guère le fruit du hasard mais le choix du site parlant aux fidèles, de la foi évangélique encore en germination.
Chez les musulmans dans le Coran, Jésus le prophète naît sous un palmier, et non dans une grotte, mais il est entouré de brebis, d'un troupeau et des personnages convenus en Orient d'un berger avec ses familiers.
Dans l'orthodoxie, l'icône de la Nativité de Notre Seigneur Jésus Christ remonterait au XVème siècle autour d'Andrei Roublev dans l'iconographie primitive.
Elle s'inspirerait, disent les historiens des arts et des livres saints, de l'évangile de Luc et de saint Romain le Mélode, un auteur de l'antiquité chrétienne. "La Vierge met au monde l'Eternel, et la terre offre une grotte à l'inaccessible. Anges et pasteurs le louent, les mages avec l'étoile s'avancent, car tu es né pour nous enfant nouvelet, Dieu pré éternel ", extrait de Kondakion
En la sobriété de toute crèche sont réunis de la naissance au fil du temps à venir de Jésus tous les symboles parlants de cette vie. l'origine, le travail, les parents, de la crèche et de la mangeoire au cercueil final comme énoncé, "né à la vie éternelle, mort au monde", entouré d'étoiles de justice et de paix, et des prophéties de l'ancien testament omni présentes . Ces œuvres artistiques orientales riches de visages, de couleurs, de gestes attentionnés parfois, interrogent. Pourquoi de tels empressements à regarder au-delà ce temps d'éternité qui s'est arrêté un instant dans une grotte à Noël ?