De préférence à la commémoration du centenaire de la révolution russe de 1917, nous paraît ô combien plus intéressant le rappel d’un événement qui influa considérablement sur l’avenir de la Russie, de ses relations avec l’Europe occidentale, la France, et notre région en particulier. Il y a 404 ans, le Zemski Sobor ou Assemblée des provinces russes mettait fin au « Temps des Troubles » et à l’invasion du pays par des troupes étrangères en appelant les Romanov sur le trône de Russie. Depuis 2005, la Journée de l'unité nationale, instituée le 4 novembre en souvenir de la libération de Moscou des envahisseurs polonais et lithuaniens par les milices populaires sous le commandement du commerçant-échevin Minine et du prince Pojarsky (1612), est chômée en Russie. Cette fête correspond également à la vénération de l'icône de Notre-Dame de Kazan, dont l'image est liée à la libération de la Russie. Car, le dimanche qui suivit le départ des envahisseurs, une grande procession fut organisée avec l'icône de Notre dame de Kazan qui avait accompagné l'armée de libération. Quelques mois plus tard Michel Romanov fut élu tsar (7 février 1613), fondant la dynastie qui régna sur la Russie jusqu'en 1917.
Presque aussitôt, les premiers souverains de la nouvelle dynastie établirent des relations durables avec le royaume de France en envoyant des ambassades auprès de Louis XIII, lors de son mariage à Bordeaux, et de Louis XIV, les envoyés russes ayant séjourné pendant près d’un mois à Bayonne en 1668 (nous aurons l’occasion, ultérieurement, de revenir sur cet important épisode lié à l’histoire du Pays Basque).
« Pendant les trois siècles de leur règne, la Russie était devenue un Empire fort avec un territoire étendu, entre la mer Baltique et l’océan Pacifique. La Russie, particulièrement sous le règne du dernier empereur Nicolas II, avant la Première guerre mondiale, avait connu une forme de miracle économique, social et politique. La Russie aurait pu devenir un leader mondial. Cette évolution se passait sans camps, sans prisons, sans collectivisation imposée, parce qu’elle découlait du potentiel national qui s’était manifesté en effet pendant ces années-là en Russie », avait résumé avec sagesse le chef de l'Eglise orthodoxe russe lors des commémorations de cet anniversaire à Saint-Pétersbourg.
« Ses richesses principales, cependant, demeuraient toujours la foi orthodoxe confessée par le peuple russe qui a engendré beaucoup d’ascètes, d'hommes d’Etat remarquables, de savants et d’artistes. Car, les Romanov cherchaient à préserver les traditions spirituelles du peuple russe ainsi que son identité nationale », concluait le patriarche Cyrille.
Une réserve de spiritualité en Russie
Le Prince Sixte-Henri de Bourbon Parme, que tant de liens lient à Biarritz où nombre de ses ancêtres séjournaient, à la Navarre carliste et à Pau où il est né, et qui, au nombre de ses nombreux séjours au Pays Basque, avait honoré de sa présence les « Bals russes » de Biarritz, ne manquait pas d’évoquer à ce propos « une intuition commune entre la Russie historique et la France » en constituant pour cette dernière « un contrefort de son indépendance grâce à cette réserve de spiritualité que les Russes ont su sauvegarder. Le couvercle marxiste s’étant brisé, il reste les valeurs essentielles à l’admirable capacité de résurgence. Avec la révolution (française, ndlr), nous avions donné le mauvais exemple à la Russie et le prétexte de sa propre révolution mais, à présent, elle nous fournit l’espoir de la reconquête de la pensée et de la spiritualité. Une communion essentielle pour notre propre renaissance spirituelle, culturelle et mentale ; un tandem garant de notre indépendance géopolitique et un jour, peut-être, économique ». L’actualité la plus récente et une certaine évolution des relations entre les chefs d’Etat des deux pays y mènera-t-elle en nous préservant des sanglantes et dévastatrices aventures guerrières que connut l’Europe au siècle précédent, particulièrement la guerre de 14-18 dont on commémore ce samedi 11 novembre un armistice et une « fausse » paix qui servit, hélas, d’élément déclencheur pour la suivante, en 1939 ?
Alexandre de La Cerda
Alexandre de La Cerda