Ce dimanche 25 août, la fête de saint Louis correspond à la date du décès du souverain le 25 août 1270 à Carthage, près de Tunis. En beaucoup d'églises, vitraux, tableaux et sculptures commémorent le souvenir du saint roi, c'est le cas à Mauléon, la capitale de la province basque de Soule : enserrée dans la partie ancienne de l’hôpital Saint-Louis, la chapelle de l’édifice semble dater du transfert de l’Hôpital d’Ordiarp à Mauléon en 1715.
Le beau rétable de style baroque en bois doré qui occupe son chevet (notre photo de couverture) est orné d'une peinture représentant saint Louis procédant au lavement des pieds des pauvres et des malades, à l’image du Christ.
Un rite devenu traditionnel en Europe et en Orient, pratiqué par les chrétiens avant la Cène, du Jeudi Saint au matin de Pâques : pendant plusieurs siècles, souverains et chefs religieux accompliront cette cérémonie appelée le Mandé (en vieux français) ou Mandatum (de « mandatum novum », commandement nouveau, Jean, 13), ou lavement des pieds des pauvres, des mendiants ou des lépreux.
Un autre rituel est représenté sur l’un des vitraux de la nef de la chapelle, il s’agit de saint Louis rendant la justice à l’ombre d’un chêne. En fond, on devine le château de Vincennes, représentation remarquablement réalisée par le maître-verrier bordelais Gustave Pierre Dagrant qui travailla à Rome et résida un temps à Biarritz. Cet ancien élève des Beaux-Arts de Bayonne (d'où était originaire sa mère) se vit confier de nombreux travaux de restauration dans le Sud-Ouest et en Amérique Latine (extraits d'un article d'Anne de La Cerda dans l'ancien hebdomadaire régional).
Le roi saint Louis et la Navarre
Du long règne de saint Louis (plus de 43 ans, de 1226 jusqu'à sa mort), nous retiendrons en particulier la sagesse dont il fit preuve avec ses voisins : on est assez porté à croire que, si Louis IX avait voulu, il aurait pu profiter des embarras pour s'agrandir à leurs dépens : comme on l'a vu, la France royale tenait alors le premier rang en Europe ; le roi de France, dit l'anglais Mathieu de Paris, est le roi des rois (rex Francorum, qui terrestrium rex regum est).
Or, sa politique extérieure n'avait qu'un but : la réconciliation de tous les chrétiens en vue d'une croisade unanime. Par exemple, il ne profita guère des droits que Louis IX tenait de Blanche, sa mère, sur la Castille.
Il fut sage en entretenant avec son cousin Alfonse X, prince paisible, des relations amicales.
Quand la mort prématurée de son fils Louis, fiancé en 1255 à Bérengère de Castille, eut rompu un premier projet d'alliance entre les deux maisons, Blanche de France, sa fille, épousa un frère de Bérengère, Fernand, dit de La Cerda.
Et, parmi les différends dont il eut à connaître à son retour de Terre Sainte, il y avait déjà cette succession du royaume de Navarre, si disputée au cours des siècles.
Thibaut IV, comte de Champagne et roi de Navarre, qui mourut en juillet 1253, avait laissé plusieurs enfants de ses deux derniers mariages. Blanche, sa fille par Agnès de Beaujeu, sa seconde femme, avait épousé le comte de Bretagne. De Marguerite de Bourbon, sa troisième femme, il avait eu trois fils et deux filles ; l'aîné de ces enfants, Thibaut V, se voyait contester ses droits par son beau-frère de Bretagne, mari de sa demi-sœur.
« Le roi de Navarre », dit Joinville, « vint au parlement avec son conseil, et le comte de Bretagne aussi. À ce parlement, le roi Thibaut demanda madame Isabelle, la fille du roi de France, pour en faire son épouse. Allez, lui dit le roi, faites votre paix avec le comte de Bretagne, et puis nous ferons notre mariage. Et il ajouta qu'il ne voulait pas qu'on dise qu'il mariait ses enfants en déshéritant ses barons. Je rapportai ces paroles à la reine Marguerite (de Navarre) et à son fils, et ils se hâtèrent de faire la paix. Après quoi le roi de France donna sa fille au roi Thibaut de Navarre »…
En 1269, Thibaud et Isabelle avaient décidé de suivre saint Louis en croisade. Avant son départ pour Tunis, le roi de France rédigea de sa propre main ses "Enseignements à ses enfants Philippe et Isabelle", série de conseils politiques et moraux, de réflexions du roi sur la Bible et les écrits des Pères de l'Eglise. Ayant rejoint son beau-père à Aigues-Mortes, Thibaud s'embarqua avec l'armée royale le 1er juillet 1270. Durant le siège de Tunis, l'armée fut décimée par le choléra, maladie qui n'épargna pas saint Louis qui succomba le 25 août.
Le roi et la reine de Navarre survivront peu de temps à saint Louis. Thibaud V décédera à Trapani, en Sicile, le 4 décembre 1270 tandis qu'Isabelle mourut sur les îles d'Hyères le 23 avril 1271. D'après Guillaume de Nangis, les corps du roi et de la reine de Navarre rejoignirent le cortège funéraire de saint Louis. Et l'on a conservé « la lettre que le roi Thiebaut de Navarre envoia à l'evesque de Thunes ». Elle commence ainsi : « Thibaut, par la grâce de Dieu, roi de Navarre, de Champagne et de Brie, comte palatin. Sire , je receve vostre lettre en laquelle vous me priez que nous vous feissons asavoir lestât de mon cher seigneur Louys, jadis rois de France. sa bouche ne cessa de jour et de nuit, par toutes parties, l'espace de quinze eures, de louer Nostre Seigneur et de prier pour le peuple qu'il avoit mené. Et la ou il avoit déja perdu une partie de la parole, crioit-il aucune foiz en haut: Fac nos, Domine, prospéra mundi despicere et nulla ejus adversa formidare. Et moult de foiz crioit-il en haut : « Esto , Domine, plebi tue sanctificator et custos ». Apres l'eure de tierce il perdit ausi comme du tout la parole, mes il regardoit les gens moult debonerement et sourioit aucune foiz. Et entre eure de tierce et de midi fist ausi cum semblant de dormir, et fu bien les eauz clos l'espace de demi liu. Après il ovri les euz et regarda contre le ciel et dist cest vers : Introïbo in domum tuam, adorabo ad templům sanctum tuum. Onque puis il ne parla, et entour eure de none il trespassa ».
De la Gascogne jusqu'à Paris...
« Louis jusqu'à son heure dernière / Lutta jadis, vaillant soldat, / Nous qui marchons sous sa bannière, / Comme lui, nous ne tremblerons pas (…) La France s'élance et crie Montjoie ! / Victoire et gloire à notre roi » !
L'hymne bien enlevé des Monjoyards en l'honneur de leur saint patron retentissait dans les ruelles de la belle bastide de Lamontjoie au cœur de l’Albret, le pays d’Henri IV, mais aussi celui de son ancêtre saint Louis, dont la procession promenait l'ostensoir aux reliques offertes en 1298 par son petit-fils Philippe le Bel. Conservées depuis lors dans la précieuse châsse-reliquaire en émail champlevé de Limoges datant du XIIIe siècle, ces huit os métacarpiens de la main du saint roi constituent l'ornement principal de l’église Saint-Louis élevée à la même époque avec des ajouts postérieurs, en particulier un remarquable décor d’angelots et d’animaux fabuleux sur les culots et les gorgerins des chapiteaux ainsi que le retable baroque en bois doré présentant un air de famille avec nos églises basques...
Avec d'autres représentants de familles historiques et revêtu de sa cape de l'Ordre de Saint-Gabriel (réservé aux diplomates), notre rédacteur Alexandre de La Cerda y avait pris part, car lui aussi descend de saint Louis par son aïeule Blanche, troisième fille de Saint-Louis, mariée à Ferdinand de La Cerda !
Et à Paris, Alexandre de La Cerda, en tant que membre également de l’Ancien Ordre royal et souverain de l’Étoile et de Notre-Dame du Mont Carmel, avait participé il y a six ans en l’église Saint Germain l’Auxerrois à un chapitre présidé par Mgr le Comte de Paris, Chef souverain de l’Ordre, qui avait dévoilé la statue du "Roi Saint Louis - enfant" réalisée par la sculptrice Catherine Cairn et bénie par le chapelain de l'ordre et le curé de la paroisse.
A la fin de la messe, en présence des chevaliers revêtus de leur cape et d'une assistance nourrie, Mgr le Comte de Paris, "Henri, septième du nom, descendant des rois de France" avait fait une émouvante déclaration - en ces temps troublés - avant de prononcer solennellement la consécration de la France au Cœur de Jésus demandée par Sainte Marguerite-Marie Alacoque à Louis XIV (qui, mal conseillé, semble être resté à l'époque dans une certaine "expectative")...