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Manifestation
40e anniversaire du décès de Jean Rostand, le 4 septembre 1977
40e anniversaire du décès de Jean Rostand, le 4 septembre 1977
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| Béatrice Labat 1278 mots

40e anniversaire du décès de Jean Rostand, le 4 septembre 1977

A l’occasion de l’exposition sur Jean Rostand qui se tient jusqu’au 5 novembre à Arnaga, Béatrice Labat, conservatrice du musée Edmond Rostand-Villa Arnaga, a composé une biographie en s’appuyant sur les travaux d'Albert Delaunay (1910-1993), médecin, biologiste et homme de lettres, ami de Jean Rostand, ainsi que ceux de Jean-Louis Fischer, historien des sciences de la vie et de la médecine et d'Alain Dubois, ancien élève de Jean Rostand, professeur au Museum national d’histoire naturelle.

Jean Rostand, fils d’Edmond Rostand et de Rosemonde Gérard, est mort le 4 septembre 1977 à Ville-d’Avray. Descendant d’une famille lettrée immensément célèbre, il rejette dans sa jeunesse la littérature, héritage trop lourd pour le fils de l’auteur de Cyrano de Bergerac et de Chantecler. Dans ce texte dont nous publions des extraits, Béatrice Labat propose de suivre son cheminement, enfant solitaire et timide, passionné par les insectes, jusqu’à l’écrivain scientifique et humaniste devenu aussi célèbre que son père.

Jean Rostand a publié plus de 90 livres. Pamphlets de révolte après la première guerre mondiale, livres de vulgarisation scientifique et d’histoire des sciences, ouvrages humanistes sur les grandes questions de l’après-guerre, sans compter les articles sur ses recherches en biologie.

Ses écrits ont marqué toute une génération. On ne compte plus les écoles, collèges, avenues qui portent son nom. L’Académie française lui a ouvert ses portes, comme à son père avant lui.

Tout au long des pièces de sa maison d’enfance, Arnaga, découvrez l’homme que fut Jean, fils d’Edmond et de Rosemonde.

Biologiste, écrivain, moraliste

Jean Rostand est né le 30 octobre 1894 à Paris. Il est mort le 4 septembre 1977 à Ville-d’Avray.  Fils de deux poètes, un père couvert de gloire, il choisit de s’écarter de la littérature pour la biologie. Ses recherches sont d’une grande diversité. Les plus importantes portent sur la parthénogénèse (reproduction par voie chimique d’œufs non fécondés), sur l’étude des anomalies chez les batraciens, sur la conservation des cellules.

Jean Rostand est aussi un important moraliste. Humaniste engagé, il fustige les fanatismes, les injustices. Il cherche à mettre en garde contre les progrès de la science et notamment sur les dangers des essais nucléaires. Dans les années 70, il s’engage en faveur des droits des femmes.

Jean Rostand se révèle un grand vulgarisateur scientifique. Ses livres ont marqué toute une génération. Car le fils d’Edmond Rostand a un véritable style. « C’est un savant qui écrit bien mieux que personne » dit de lui André Maurois. Il écrit quatre-vingt dix ouvrages entre 1919 et 1975. Il est élu à l’Académie française en 1959.

Mais ce qu’il préfère entre tout, c’est d’être « au bord d’un étang, quand je pêche des grenouilles, des têtards ».

« La morale biologique est basée sur trois critères : se comporter non comme un animal mais comme un homme ; non comme un enfant, mais comme un adulte ; non comme un névrosé, mais comme individu sain »

« Je sais très bien qu’il y a en moi un peu de romantisme à la Cyrano. « Ne pas monter bien, peut-être, mais tout seul ».

L’enfance de Jean Rostand : un enfant sauvage

Jean Rostand est né le 30 octobre 1894 à Paris. C’est encore un jeune enfant lorsqu’il arrive à Cambo avec ses parents. Il est d’un tempérament solitaire. « Quand les personnes voulaient voir mon père, je fuyais toujours dans le jardin. J’étais timide, extrêmement timide. Je ne faisais rien alors pour avoir, pour chercher le contact avec les gens. J’ai toujours eu très peur des hommes  ».

Adulte, il dit être resté « un  grand sauvage ».  « J’ai aussi le goût de la solitude. Timidité et solitude sont intimement liés. J’ai un très grand pouvoir de solitude je pourrais rester deux ans dans la maison et dans mon jardin sans en sortir ; je ne souffrirais pas ». 

Sans doute en réaction inconsciente envers son père, il a tout jeune « l’aversion, le dégoût de tout ce qui était littéraire ; j’étais un peu scientifique. Déjà à l’école, j’étais très mauvais en lettres et excellent en sciences, même en mathématiques. J’adorais mon père, je l’admirais, je le vénérais mais, certainement, j’ai dû faire une petite résistance. C’était et c’est peut-être la crainte de ne pas pouvoir faire quelque chose dans ce domaine ». Maurice a toujours considéré que Jean était, avec sa mère, la personne la plus importante de sa vie.

La passion de la biologie

La vie à la campagne offre au jeune garçon l’occasion d’observer la nature, éveillant son intérêt pour l’histoire naturelle.

« Dans le grand parc familial d’Arnaga, et dans les bois avoisinants, je rencontrais, à profusion, de quoi entretenir ma passion naissante et stimuler mes curiosités ». « Aussi loin que je remonte dans mes souvenirs, je me vois fouillant la terre, battant les buissons pour attraper des mantes religieuses, attrapant des papillons avec un filet. A six ans, sept ans déjà, j’étais un passionné d’insectes.» Les insectes lui sont « plus précieux que les plus beaux jouets sortant des magasins ». Loin de tempérer cette passion, son père lui offre un petit laboratoire pour ses expériences. 

C’est à l’âge de neuf ans que son intérêt se transforme en passion avec la découverte des « Souvenirs entomologiques » de Jean-Henri Fabre. Son père raconte que ces livres « avaient le singulier pouvoir de faire tenir tranquille un petit garçon turbulent ».

Jean décide alors de «prendre pour modèle ce vieillard en sabot». Plus question pour lui d’une autre carrière. « Je rêvais d’être naturaliste comme d’autres enfants rêvent d’être explorateur ou général ».

Dessin préparatoire du portrait de Jean au papillon par Eugène Pascau, exposé dans le Grand Hall. Le filet à papillon est celui que Jean tient sur le tableau.

Bouleversé par la lecture des «Souvenirs entomologiques», Jean écrit à Fabre qui lui répond et lui envoie quelques insectes de Provence.

Photographie dédicacée « A mon jeune ami Jean Rostand, JH Fabre, Sérignan Vaucluse ».

La famille de Jean Rostand : Andrée Mante et leur fils François

A l’âge de 26 ans, Jean épouse en 1920 Andrée Mante. Andrée est sa cousine germaine, la fille de Juliette, sœur d’Edmond. C’est une femme douce et effacée. Artiste sensible, elle sculpte et dessine de nombreux portraits de la famille et des amis.

Leur fils François nait l’année suivante, en 1921. « J’attendais la naissance de mon fils avec intérêt, mais sans nulle fièvre. Je ne pensais même pas particulièrement à la venue d’un enfant. Mais à peine fut-il né que tout changea ! Ce fut pour moi, un véritable coup de foudre ! Ce petit animal soudainement entré dans ma vie représente dès lors quelque chose d’énorme, de capital, pour moi. Ce fut brusque et immédiat. Par la suite, la sensation de ce prodige énorme a subsisté… Une nouvelle vie avait commencé, bien plus sérieuse que ma vie propre. J’ai été - je suis ! – Un père très inquiet.»

Jean va protéger son fils toute sa vie. Grâce à lui, François vit dans l’aisance. Le fils s’inscrit dans la tradition familiale en écrivant. Son intérêt le porte vers les mathématiques et la linguistique. Mais le poids de la lignée familiale semble lourd pour le dernier des Rostand, discret et solitaire. Il s’éteint en 2003 chez les petites sœurs des pauvres, sans descendance.

Jean Rostand laisse une très riche bibliographie : 18 ouvrages littéraires écrits entre 1919 et 1970 et 72 ouvrages scientifiques publiés entre 1928 et 1975 

Si vous voulez en savoir davantage sur cet humaniste engagé, aux fortes convictions tempérées par son ouverture d’esprit, rendez-vous à la Villa Arnaga à Cambo !

 

Béatrice Labat

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