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Histoire
L’ours, roi des grottes préhistoriques à Isturitz
L’ours, roi des grottes préhistoriques à Isturitz
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| Alexandre de La Cerda 679 mots

L’ours, roi des grottes préhistoriques à Isturitz

Ce n’est pas par hasard que la thématique de l’ours a été choisie par Joëlle Darricau, propriétaire des Grottes d’Isturitz et d’Oxocelhaya, et son équipe d’animation de l’Espace Culturel Arts et Sciences qui lui est attachée, au cœur du nouveau programme présenté récemment au Musée Basque.

Si les emblématiques grottes préhistoriques bas-navarraises sont mondialement réputées pour les vestiges des 80 000 années d’occupation, d’histoires humaines et d’art préhistorique qu’elles renferment, elles ont également abrité diverses espèces animales, au premier rang desquelles l’ours des cavernes.

Découvrant une petite tête d'ours sculptée au silex par un artiste préhistorique dans les grottes d'Isturitz, l’archéologue Passemard ne lui trouvait-il pas déjà « une expression presque humoristique » avec son « air à la fois bonasse et féroce d'un mangeur de miel qui ne devait pas dédaigner la viande fraîche » ?

Dans ce registre « un peu moqueur », les montreurs d'ours ou les joyeux drilles qui excellaient à en revêtir la défroque aux réjouissances carnavalesques ne s’inscrivaient-ils pas dans le fil d’une tradition progressivement estompée comme le remarquait J.-D.-J. Sallaberry à propos de la mascarade souletine dans le recueil de la « Tradition Basque » publié en 1897 : « après le Cherrero, on ne voit plus dans nos mascarades ours, agneau ni berger, mais bien une cantinière agile qui, tout en dansant, présente la provende au Zamalzaïn » ? Or, seulement cinquante ans plus tôt, Augustin Chaho décrivait encore dans son « Voyage en Navarre », à la suite du « Cherrero » qui « ouvrait la danse avec son ballet de crin » - et qui a manifestement inspiré Ravel dans les premières notes de son « Concerto en Sol » -, le berger armé d’une grande hache et conduisant ses troupeaux, « derrière lesquels trottait l’ours »… Une tradition parvenue jusqu’à nos jours grâce au festival « Hartzaro » qui programme à Ustaritz des spectacles en rapport avec le réveil de l’ours (en basque, hartza) et à la « Journée de l’ours » inscrite au calendrier du carnaval luzien. Selon Thierry Truffaut, spécialiste de la question, ces allégories et ces symboles procéderaient même d'un vieux fond européen où l'on aurait pratiqué le culte d’un ours progressivement chargé de tous les maux et représentant l'élément sauvage de la fête.

Un hommage à Guanes Etchegaray
L’ours tient ainsi dans notre histoire une place singulière, affectueuse et effrayante. C’était déjà le cas au temps où nos ancêtres et les imposants plantigrades partageaient l’espace des grottes.

L’Espace Culturel Arts et Sciences des Grottes d’Isturitz et d’Oxocelhaya proposera donc cette année un programme artistique, scientifique et culturel sur ce thème de l’ours qui se déclinera en divers événements tout au long de l’année. Il sera complété par des commentaires aux visiteurs des grottes des témoins de la présence de ces plantigrades « vénérés »… Voire, redoutés ! Car, les preuves de l’occupation des grottes par l’ours des cavernes sont nombreuses : griffades d’ours sur les parois des cavités, polissages de parois dans certains passages étroits empruntés par les plantigrades, ainsi que des bauges. Les vestiges paléontologiques sont également nombreux, bien que moins étudiés par les archéologues. Des « couches à ours », bien développées dans certaines salles recèlent de nombreux ossements d’ours (dents, crânes, mâchoires, ossements divers, etc.).

On trouve ainsi au Musée d’Histoire naturelle de Bayonne un crâne d’ours des cavernes en provenance d’Isturitz. Art préhistorique figurant des ours, vestiges paléontologiques, traces d’occupation conjuguées des hommes et des ours sont autant de témoins de ces époques.

C’est ce patrimoine méconnu qui sera partagé avec le public au cours de cette année en compagnie de scientifiques de renom et d’artistes.

Ainsi, ce samedi 18 mars à 17 h, un hommage sera rendu à l’artiste ami des grottes Guanes Etchegaray : poésie, danses, txalaparta, et autres surprises, avec Christiane Giraud, Beñat Achiari, Paxkal Indo et Jean-Philippe Leremboure…

Hommage suivi d’un Homo sapiens Café à 18 h avec l’écrivain Claude Labat : « Cadavres exquis en sous-sol – L’ours dans la mythologie basque », œuvre originale produite au sein de la grotte (grande salle d’Isturitz, entrée 12 Euros, réserv. tél. 05 59 29 64 72).

Alexandre de La Cerda

Hommage à Guanes Etchegaray
Hommage à Guanes Etchegaray © DR
Hommage à Guanes Etchegaray

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