La diffusion des livres sacrés des religions fut parmi le premier travail des inventeurs de l’imprimerie dans le monde.
Le “Jikji “ ouvrage bouddhiste coréen en fut la première création en 1377 à partir de caractères métalliques mobiles : un ouvrage bien conservé sous le titre « Des Traits édifiants des Patriarches » rassemblés par le bonze Baegun de Päkun de 1298-1374 fait l’objet protégé dans la BNF de manuscrits orientaux.
Acquis par le diplomate français Victor Collin de Plancy entre 1896 et 1899, le livre fut montré lors de l’Exposition Universelle de Paris en 1900 puis racheté par le joaillier Henri Vever qui le légua à nouveau à la BNF en 1950 (*).
Le livre ne fut depuis lors montré à un public, la République de Corée ayant fait la demande de l’exposer un jour chez elle dans le cadre d’un prêt temporaire.
Chacun en apprécie sa valeur unique et exceptionnelle !
Lors d’une exposition actuelle la Bnp présente à Paris de tels trésors de bibles, incunables et parchemins d’Europe et d’Asie qui font suite à l’invention de l’imprimerie dans le travail de diffusion de la foi, des cultures et des savoirs associés depuis l’origine.
Dès sa parution en 1455 en France la Bible Gutenberg en fut la diffusion retentissante.
L’on découvrait à la fois la technique et l’objet de diffusion des Oeuvres sacrées des religions qui dès le XVème siècle en comprirent tout l’intérêt.
Le futur pape Pie II en témoigne à propos de Gutenberg, “ Ce qu’on m’a écrit sur cet homme admirable que l’on a vu à Francfort est exact, je n’ai pas vu de bible complète mais un certain nombre de cahiers de différents livres d’une écriture très nette et très correcte, sans aucune erreur et que tu pourrais lire sans peine et sans lunettes, écrira-t-il, en mars 1455 au cardinal Juan de Carjaval “
Le pape est à la joie et les intellectuels du siècle sont séduits par la nouveauté d’un accès pour le plus grand nombre à la sainte bible.
Deux exemplaires exposés dans la démonstration Exposer ! l’Europe de Gutenberg y sont visibles, l’un sur parchemin luxueusement peint , l’autre imprimé sur papier et plus modeste se laissent voir à Paris.
Appartenant à la BNF elles sont rares et rarement visibles pour le public, imprimées en série sur plus de 1300 pages, elles demeurent des raretés d’exception par la qualité technique de ce travail de pionnier autant que de la valeur économique engagée pour ce faire.
Gutenberg en mesura l’enjeu par le thème retenu.
A partir de manuscrits médiévaux, les auteurs sont des moines ou des gens lettrés s’attachant à 10-15% de lecteurs européens en état de les lire et commenter.
Les exposants y ont reproduit le matériau en bois monumental d’impression prêté d’après le modèle original existant au Musée Gutenberg de Mayence, à partir de couleur noire, rouge et bleue prises au rouleau dans les conditions de l’époque.
Par une profusion d’autres documents d’époque ajoutés, les exposants ont réuni le travail réalisé par d’autres inventeurs de l’imprimerie, qui usèrent de ces techniques pour d’autres fonctions que celle de diffuseurs de la bible.
“Nous sommes en présence d’une véritable effervescence de créativité autour de l’imprimerie parmi d’autres documents découverts en Asie avant la typographie, témoins de cette découverte majeure pour le savoir, l’accès à l’impression pour tous les sujets dont celui des livres sacrés des religions”, rapporte la commissaire Caroline Vrand, Conservatrice du Département des estampes et de la photographie à la Bnf.
“Avec 250 pièces présentées dont une vingtaine prêtées, s’enthousiasme la commissaire, ce sont là les forces vives de la Bnf avec ses collections d’incunables parmi les plus riches du monde exposées”.
La Commissaire souligne encore, avec une Cosmographia de Ptolémée, (une géographie) versus d’époque, une Divine Comédie de Dante, illustrée d’après Botticelli, une Apocalypse de Dürer, des missels et des livres d’heures, un ferment de culture fait foi à cette époque d’une curiosité spirituelle de toute part, des romans de chevalerie, des abécédaires, des pièces de théâtre, des partitions de musique, ou encore le petit livre de comptes Aritmetica de Philippe Calandri, pour permettre aux marchands florentins de calculer avec leurs mains, rien ne fait défaut à l’impression d’époque, d’une révolution des esprits en cours !
Comme pour toute invention de la modernité de tous les temps, la face sombre de l’imprimerie se dévoile avec la propagation de la haine religieuse, avec le Malleus Maleficarum ou Marteau des sorcières, traduction immédiate des instruments d’inquisition utilisés et propagés par les imprimeurs à la solde de cette cause malfaisante !
Rabelais qui ne fut jamais en retard de son temps disait déjà par le truchement de Pantagruel en 1532 : “Des impressions fort élégantes et correctes sont utilisées partout qui ont été inventées à mon époque, par l’inspiration divine, comme inversement l’artillerie l’a été par suggestion du diable. Tout le monde est plein de gens savants” !
Ne cherchez pas de parallélisme avec la modernité !
Pantagruel moderne pourrait en effet pointer du doigt le règne dominant de quelques mensonges Internet qui diffusent la vérité avec ses codes fort discutables et instruisent des contrôles de vérité présentement utiles, pour en comprendre les tenants et aboutissants d’une modernité sublime et pleine d’écueils !
(*) Jusqu’au 16 juillet prochain, les curieux pourront découvrir cette exposition parisienne unique à la Bibliothèque nationale de France quai François Mauriac – Paris XIIIème.