Nous allons nous intéresser à cette période des années cinquante qui voit la résurrection de Biarritz grâce à son maire Guy Petit. Le Casino municipal, reconstruit en 1929 par son père Joseph Petit, devait redevenir le cœur de la vie sociale et artistique de la ville.
Dès son élection à la mairie, Guy Petit se préoccupa de faire renouer Biarritz avec sa vogue touristique passée, et dans ce but, dota la ville des infrastructures nécessaires grâce à une très habile politique de financement, recourant à des emprunts en période de grande inflation. Il récupéra les terrains et les bâtiments du Casino Municipal au départ de l'Université américaine en février 1946, fit rouvrir la frontière avec l'Espagne, racheta l'hôtel du Palais menacé, libéra Javalquinto en installant la mairie dans les anciens locaux des magasins du Bon-Marché, et reprit l'idée d'un grand aéroport à Parme, afin que la Côte Basque demeurât un centre de tourisme international.
Le 8 juillet 1950, Guy Petit recevait le Commissaire Général au Tourisme. Il lui demandait, pour le crédit de deux cents millions de francs qu'il venait d'obtenir en faveur des premiers travaux à l'aéroport, l'exemption du taux d'intérêt (7 %, qu' il jugeait excessif, alors que l'État recevait gratuitement cet argent, soit du plan Marshall, au titre des investissements, soit des impôts).
Dans la soirée, tous deux assistaient à la réouverture du Casino Bellevue : Biarritz avait récupéré ses deux casinos !
A cette époque, les grandes manifestations artistiques avaient presque toutes pour cadre le Casino Municipal ; la première fut une exposition d'Art français contemporain, dont une merveilleuse tapisserie de Jean Lurçat, alors que tous les musées de Rayonne, de Bordeaux et du Sud-Ouest demeuraient encore fermés, et leurs trésors rangés dans les caisses d'une retraite obligée en temps de guerre.
Ainsi, la saison 1953 voyait-elle, sur la scène du casino, Marie Bell et Aimé Clariond briller dans le Misanthrope de Molière ; le violoniste bordelais Jacques Thibaud, troquer exceptionnellement contre la baguette de chef d'orchestre son archet « à la mâle éloquence, à l'élégance française, à la sonorité ravisseuse », et se faire acclamer triomphalement (avant d’être victime d’un accident d’avion qqs jours plus tard).
Le sculpteur biarrot (d'origine russe) Choukline avait réalisé un bas relief consacré à ce dernier concert de Jacques Thibaud donné sur la scène du théâtre du Casino. Déposé lors de la rénovation du Casino en 1994, il serait souhaitable qu'il retrouve place à l'entrée principale du bâtiment...
Et les féeries de l’International Ballet du Marquis de Cuevas, avec les plus grandes étoiles de la danse du moment, dont la célèbre Rosella Hightower.
Et en 1954, le Casino Municipal change de main.
Réunissant les fonds nécessaires avec quatre associés - le bijoutier Victor Bord, Jean Noguès, propriétaire de galeries commerciales, Carlos Alamon et le chanteur André Dassary - l'industriel Charles Pereyre (Les grands Vins de France) rachetait l'établissement à Robert Toutain, qui représentait le groupe Saint-James. Et deux ans plus tard, appelés à la rescousse par Guy Petit en vue du sauvetage du Palais, ils formeront avec la ville la société Socomix qui gère encore de nos jours le palace biarrot.
Par analogie avec ceux de Calais, un billet de la célèbre « Baronne Bigoudi » - nom de plume dissimulant l'ironie mordante et redoutée du docteur jean Garat qui sévissait dans la presse locale - les surnommera les « Bourgeois du Palais »
Charles Pereyre finira par régner également sur les casinos de Saint-Jean-de-Luz, Dax, Pau et Bagnères de Bigorre.
C’est alors, le 27 août 1957, que se produisit l'incendie qui aurait pu être dramatique : voyez notre article "Biarritz : le 27 août 1957, le Casino Municipal flambait !"
https://baskulture.com/article/biarritz-le-27-aot-1957-le-casino-municipal-flambait-7458