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Conférence
L'histoire de la cathédrale de Bayonne à l'UTL (St-Jean-de-Luz)
L'histoire de la cathédrale de Bayonne à l'UTL (St-Jean-de-Luz)

| Alexandre de La Cerda 1235 mots

L'histoire de la cathédrale de Bayonne à l'UTL (St-Jean-de-Luz)

L’Université du Temps Libre de la Côte Basque Sud organise mardi 9 avril à 15 une conférence de Lionel Landart consacrée à l'histoire de la Cathédrale de Bayonne, pour en savoir plus sur cette « cathédrale anglaise en terre gasconne » ? Cette cathédrale gothique dont les flèches ne datent que du XIXème siècle ? Sur ce buste de saint Léon de Carentan, le céphalophore, l’évangélisateur du Labourd qui, décapité par les Vikings, porta sa tête sur quelques centaines de mètres ? Sur ce vitrail d’une scène biblique où les visages de deux femmes sont ceux de Louise de Savoie, mère de François Ier et de Marguerite d’Autriche, tante de Charles Quint, qui conclurent la « Paix des Dames » entre les deux souverains ?
Lionel Landart, natif d’Ascain, actuel curé d’Arcangues, longtemps chargé de la gestion de la Cathédrale Sainte-Marie comme vicaire général du diocèse, s’est passionné pour ce monument qui raconte l’histoire de Bayonne.
Villa Ducontenia, 12, Avenue Ithurralde - St-Jean-de-Luz / Entrées : 5 € pour les non abonnés.

« Une cathédrale anglaise en terre gasconne » ?

Pour ma part, et en guise d'introduction à la conférence du Père  qui promet d'être passionnante, et pour vous "mettre l'eau à la bouche", j'ajoutera quelques éléments historiques extraits de mon livre "Vol au-dessus de Bayonne" (Editions du Pays Basque) concernant ce splendide monument si célèbre et si mal connu de Bayonne.

Il est bien vrai que la cathédrale de Bayonne est représentative de la période anglaise, particulièrement faste à Bayonne : en 1154, grâce à Aliénor d’Aquitaine, Henri Plantagenet qui monta sur le trône d'Angleterre régna également sur l'Aquitaine dont dépendait le Labourd. Après des débuts orageux, la monarchie anglo-française comprit l'intérêt de laisser une large autonomie aux bourgeois bayonnais qui en profitèrent pour développer économiquement leur ville.

La population augmenta notablement et de nouveaux quartiers furent créés : le Bourg Neuf entre Nive et Adour, et celui de Saint Esprit « dou cap de poun », car il était réuni au Bourg Neuf par un grand pont en bois.
Signe de prospérité, les Bayonnais et les Labourdins financèrent la construction d'une cathédrale sur l'emplacement d'une église romane incendiée.

Les spécialistes y voient l'influence de l'école de Reims, peut-être liée au rayonnement de la cour de Navarre, royaume dont le souverain n'est autre que le comte de Champagne depuis 1234. L’universitaire Josette Pontet, présidente de l’Ass. Art, sciences & Lettres, note dans son "Histoire de Bayonne" que les liens économiques avec Pampelune peuvent très bien "expliquer la reproduction de schémas champenois, sinon la venue de maîtres d'œuvre français"
L'historien Manex Goyenetche y voit aussi une autre influence : le premier plan général de l'abside, du chœur, du transept, semblent inspirés des travaux de Sainte-Sophie de Nicosie. En effet, Bernard de Lacarre, évêque de Bayonne, se croisa avec Richard Cœur de Lion et assista même le 12 mai 1191 à Chypre, conquise sur les Byzantins, au mariage de son souverain avec Bérengère de Navarre qui y fut couronnée reine d’Angleterre. 

Concernant l'influence architecturale navarraise, outre certaine ressemblance avec la cathédrale de Pampelune, en particulier les chapelles absidiales de la cathédrale, remarquables d'élégance, et le cloître où se déroulaient les réunions des différentes corporations, on remarquera dans la belle nef élancée les intéressantes clefs de voûtes armoriées de l'époque anglaise : l'écartelé des léopards anglais avec les fleurs de lys françaises rappelle la revendication des souverains anglais sur le royaume de France. 
D'autres armoiries portent la célèbre nef bayonnaise et symbolisent la puissance navale de la ville qui fournit plus d'une fois sa flotte au service de ses suzerains britanniques. Si le tympan de l'entrée, côté bibliothèque municipale ancien palais de l'Evêché, a été vandalisé par les révolutionnaires, la cathédrale a gardé par bonheur un chef d'œuvre de sculpture sur le portail droit de la sacristie : le Christ en majesté, sorti des ateliers de sculpture locaux aux XIIIe - XIVe siècles.

Les vitraux de la cathédrale sont aussi remarquables : ils datent essentiellement de la Renaissance. 

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Le vitrail de la Cananeenne, 1531 ©
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On admirera tout particulièrement dans la chapelle Saint-Jérôme, l'un des plus beaux, datant de 1531. Il représente le Christ chassant le démon du corps de la fille de la Cananéenne.

On peut le rapporter à l'histoire de François Ier qui avait fait entasser dans le Château-Vieux voisin l'énorme rançon exigée par Charles Quint, son vainqueur à Pavie en 1525, pour libérer ses fils laissés en otage à sa place. 

Le vitrail de la Cananéenne, réalisé un an après l'échange des enfants de France contre la rançon constituer "un clin d’œil à cet épisode historique", d'autant plus qu'on y remarque les armes royales et la salamandre, emblème de François Ier. Une frise de statues gréco-romaines dans le style de la Renaissance et les "mécènes" du vitrail en orants ajoutent à l'intérêt de ce chef-d'œuvre. 

Quant au "mystérieux" heurtoir de bronze du XIIIe siècle sur la porte Nord, on se demande s'il était en relation avec quelque "droit d'asile" dont l'histoire de Bayonne ne semble pas, toutefois, avoir gardé la trace.

Le cloître, un des plus beaux et des plus vastes de France, est du plus pur gothique rayonnant du XIVe siècle. Il servait également de cimetière et de lieu de réunion pour les guildes marchandes qui gouvernèrent la Ville.

Le XIXème siècle lui apporta également sa part de réalisations : en particulier l'achèvement des tours et l'édification des flèches entre 1873 et 1884, grâce au don du parlementaire bayonnais Jacques Lormand. 

Autour de la cathédrale se développa le centre urbain avec sa place publique : c'est l’actuelle place Pasteur. Là s'élevaient les magasins aux grains, se tenait le marché, l’exposition des poids publics. De l'autre côté de cette place appelée Notre-Dame, devant le Pilori, l'Hôtel de Ville était installé dans la maison de la Beziau où le Maire tenait audience depuis 1315. L'évêque habitait la tour dominant l'actuelle bibliothèque municipale près de la rue de l'Abesque (évêque).

Le souvenir d'un jeune évêque bas-navarrais

Et à proximité se trouve la place Bernard de Lacarre : cette petite place à l'allure presque méditerranéenne est enclavée dans le pâté de maison situé entre la fontaine du Pilori et la rue Poissonnerie qui y donne accès. Elle rappelle le souvenir de l'évêque bayonnais Bernard de Lacarre qui s'était croisé avec Richard Cœur de Lion. 
Le fils bien-aimé d'Aliénor d'Aquitaine qui régnait sur Bayonne en fit un des cinq connétables de sa flotte. Au cours de cette troisième croisade (1189-1192), Bernard de Lacarre assista le 12 mai 1191 à Chypre au mariage de son souverain avec Bérengère de Navarre qui y fut couronnée reine d’Angleterre. Il en avait rapporté une tunique de style oriental, en drap et soie tissée de fil d'or, richement ornée. Trouvée dans sa sépulture, elle est exposée au musée national du Moyen Âge aux Thermes de Cluny à Paris. 

Ce jeune évêque bas-navarrais était issu de la famille noble de Lacarre, aujourd'hui éteinte (son château fut acheté au baron de Lacarre par le maréchal Harispe). Entré chez les moines de Sordes dont il devint abbé en 1176, Bernard de Lacarre fut élevé à la dignité épiscopale dix ans plus tard pour continuer la construction de la cathédrale Sainte-Marie de Bayonne débutée par son prédécesseur Raymond de Martres. 
Sous son épiscopat, en 1194, une bulle du pape Célestin II avait retranché les paroisses de Saint-Sébastien et Hernani du territoire du diocèse bayonnais qui s'étendait autrefois jusqu'à cette limite en Guipuzcoa, et jusqu'à Roncevaux en Navarre...

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