Le site de réservation de voyage et de notation « Trip Advisor » vient d’annoncer son classement annuel des plus belles plages du monde, d’Europe, et par pays, à partir des évaluations publiées par ses utilisateurs.
Cette année, la célébrissime Playa de la Concha à Saint Sébastien a remporté la première place à la fois en Espagne et en Europe. De nombreux visiteurs assurent que pour embrasser la meilleure vue sur le sable de la plage, il convient d’atteindre le « el Peine del Viento » (le peigne du vent), un ensemble de sculptures de Chillida, en prenant garde, toutefois, aux très fortes vagues qui s’y déchaînent en cas de tempête. Les commentaires écrits sur le site soulignent également que cette magnifique plage en forme de coquille Saint-Jacques est bien entretenue et qu’il est très agréable de la longer le long des balustrades d’où la vue est superbe ! Entre Igueldo d’où l’on jouit d’un panorama idyllique et le Monte Urgull, avec le verrou de l’îlot de Santa Clara en son milieu, la Concha offre depuis longtemps sa splendide conque sablonneuse à la villégiature royale des Espagnes. Abritant une concentration inégalée de grands chefs – leurs étoiles rejoignent celles de son Festival de Cinéma -, le romantisme haussmannien de ses opulentes façades se piquète de l’architecture avant-gardiste des cubes inclinés du Kursaal en verre couleur d'écume océanique, qui semblent échoués sur la plage de Gros.
De ce côté de la Bidassoa…
Le littoral labourdin n’est pas de reste car ce même classement annuel de « Trip Advisor » désigne la Côte des Basques à Biarritz comme la plus belle plage de France : « La plage est superbe et immaculée. La promenade est large et constitue l'endroit idéal pour regarder les gens ».
L’occasion de quelques rappels à propos de cet endroit emblématique de la villégiature impériale – actuellement très renommé des surfeurs - qui avait troqué son nom originel de « Pernauton » contre celui provenant d’une très ancienne coutume, et dont la vue était accessible uniquement aux hardis grimpeurs d’un sentier presque vertical à cette côte escarpée.
Il s’agissait du bain de mer rituel des villages basques de l’intérieur.
Selon une description d’époque, les Basques « tombaient des montagnes par bandes, en costumes de fête et couronnés de fleurs et de rubans. Ils se répandaient - dans ce qui n’était encore qu’un village dont l’ascension date du séjour de Napoléon III et d’Eugénie - et ils chantaient en se livrant aux danses les plus extravagantes ».
Cette fête se déroulait une fois l’an, le dimanche qui suivait l’Assomption. Après avoir animé le village de leurs chants et de leurs danses, nos Basques de l’intérieur dévalaient leur côte préférée, d’autant plus abrupte qu’on n’y avait pas encore tracé les jolis sentiers plantés de tamaris et d’hortensias, et parsemés de quelques bancs pour admirer le paysage…
Une fois arrivés sur la plage, nos danseurs se déshabillaient tous, hommes femmes et enfants. Puis, ils se prenaient par la main et formaient une seule ligne. Au signal, ils s’élançaient au-devant de la vague - la chronique dit « en poussant des cris sauvages », sans doute des irrintzinas. Finalement, après cinq ou six aspersions de ce genre, ils allaient s’étendre sur le sable et se sécher au soleil ! Cette curieuse tradition se prolongea tout au long du XIXe siècle.
Mais il faudra attendre l’époque des Années Folles pour que le tourisme s’empare vraiment de cet endroit. Les premières constructions de cabines de bains y firent leur apparition dès 1845, c’était des baraques en bois construites sur pilotis en s’appuyant à la falaise. Assez fragiles et munies d’échelles pour descendre sur la plage, elles seront souvent emportées par les vagues, tout comme les divers établissements de bains ne résisteront guère aux tempêtes. Même le second établissement des bains construit en 1858 à l’emplacement des cabines emportées par les vagues. On y accèdait par un chemin de descente en lacets ouvert en 1862. Pour le protéger des assauts de la mer, la construction d’un quai avait été décidée mais l’ensemble fut détruit par un raz de marée en janvier 1924. L’année suivante, on inaugurait un nouveau bâtiment de style Art-Déco un peu surélevé par rapport au niveau de l’Océan. Il comprenait cent quatre cabines et un bar sur la terrasse. En janvier 1928, un incendie n’en laissera subsister que le soubassement.
Situé au-dessus de la Côte des Basques et propriétaire de la falaise, l’hôtel Hélianthe lance la construction en contrebas du Silver Bar. Le complexe est inauguré le 31 juillet 1930. Acheté par la Ville en 1939, il deviendra le quatrième Établissement des bains de la Côte des Basques. En octobre 1959, déjà amputé d’une pergola emportée par un éboulement, il accueille le Waikiki Surf Club. Un nouvel écroulement de la falaise survenu en 1971 sonne la fermeture du bâtiment au public. Il faudra encore attendre près d’une trentaine d’années pour que le confortement des falaises et la sécurisation du site autorisent la reconstruction (presque) à l’identique de l’ancien Établissement des bains « art déco ». Réalisé par l’architecte José Moraiz, il retrouva ses fonctions liées aux bains de mer en accueillant sur une surface de plus de 1000m² des locaux pour les sauveteurs, les clubs et écoles de surf, des cabines de douches, des consignes, ainsi qu’un restaurant et deux boutiques. Une sculpture de Joël Roux fut érigée sur l’esplanade, en hommage aux « tontons surfeurs » qui, en 1957, surfaient pour la première fois les vagues de la Côte des Basques, sans savoir qu’ils venaient de lancer le surf en Europe !
Alexandre de La Cerda