Samedi 9 novembre, le rallye Ardillère fêtait la Saint-Hubert à Onesse-et-Laharie dans les Landes.
Les veneurs (pratiquant la chasse à courre) et les amateurs qui les suivent honorent leur saint patron en début de saison. Une messe est alors célébrée, dans certains équipages en forêt, ou comme ici dans une jolie église de village (notre photo de couverture). Comme c’est de tradition, l’équipage est au grand complet, en tenue, un chien représente la meute, l’église est comble. De nombreux sonneurs rythment la célébration de fanfares qui résonnent sous les voûtes et accompagnent ainsi les prières de l’officiant. Un magnifique « Ave Maria » exécuté en solo d’une trompe bien maîtrisée a laissé l’assemblée sans voix.
Après cette messe distinguée, un grand pique-nique « tiré du panier » rassemble les veneurs, sonneurs, amis, voisins, villageois dans une ambiance chaleureuse malgré la pluie. Des sonneries retentissent entre les conversations, avant la bénédiction de la meute et, plus tard, le lancer de la chasse dans une parcelle de forêt des environs.
Les chiens, tout en étant parfaitement aux ordres, manifestent un empressement certain, les cavaliers se répartissent autour de la parcelle, le son des trompes retentit à travers les futaies et permet ainsi de suivre les actions de la chasse. La pluie a cessé, la température est idéale, la voie bonne et un agile chevreuil entraîne la meute à travers les pins en usant de toutes ses ruses pour déjouer les chiens comme les hommes.
Saint Hubert est le saint patron des veneurs. La légende fait de lui un fils de Bertrand, duc d’Aquitaine (fin du VIIème siècle, époque mérovingienne). Très tôt initié à la chasse, il est remarqué pour ses talents dans ce domaine. Il est fait grand veneur à la cour d’Austrasie par Pépin de Herstal et se livre désormais sans limite à sa passion jusqu’à un Vendredi saint (peut-être un jour de Noël selon différentes interprétations) où, chassant un grand cerf infatigable, il se retrouve face à lui qui l’observe et s’approche majestueux. Hubert aperçoit un crucifix entre les bois de l’animal, son cheval se cabre, la meute est immobile et coite. Dans le silence inhabituel d’une action de chasse, Hubert entend une voix : « Hubert, Hubert, jusqu’à quand ta passion de la chasse te fera perdre ton salut ? Va à Maastricht vers mon serviteur Lambert : il te dira ce que tu dois faire. »
C’était la dernière chasse d’Hubert, qui désormais se consacre à Dieu et devient évêque en Ardennes où il lutte entre autres contre les cultes païens. On lui prête des miracles, en particuliers la guérison d’un homme atteint de la rage, maladie que l’on nommait alors « mal de saint Hubert » . Toujours selon la légende, son pouvoir lui venait de l’étole reçue d’un ange le jour de son ordination ainsi qu’une clef de saint Pierre en or. Des imitations de cette clef, dite « clef de saint Hubert » servait à marquer les chiens tout en les vaccinant contre la rage.
La dévotion à saint Hubert aurait ainsi pris la place de celle de la Diane des Ardennes, maîtresse du monde sauvage et déesse de la chasse à qui l’on offrait les premières prises lorsque la saison de chasse commençait au temps des gaulois…
Il est surprenant de découvrir qu’en réalité, c’est saint Eustache (général au service de l’empereur romain Trajan) qui a eu la vision du cerf.
Saint Hubert a bien existé, il fut un personnage important pour l’évangélisation de son pays et en particulier pour la christianisation des temples dédiés à Odin, il est mort en pratiquant la pêche, et n’est pas particulièrement connu comme chasseur… A la suite d’un incendie de l’abbaye bénédictine d’Andage, où son corps reposait, ses reliques et les manuscrits bibliographiques le concernant ont disparu. Dès lors est né un mythe, dans cette région de forêts où la chasse et les légendes occupent une grande place. Saint Hubert a écarté saint Eustache dont le souvenir est cependant bien gardé et vénéré à Paris dans une très belle église qui lui est dédiée.
La vènerie perpétue des traditions ancestrales, ancrées dans les terroirs et les forêts françaises. Elle est pratiquée par des passionnés de tous milieux et âges dans le respect de la nature et de ses équilibres en suivant des règles strictes. Elle représente une symbiose importante entre le monde animal sauvage et domestique, entre les hommes et leur environnement naturel. La vènerie représente un monde d’une grande richesse où la beauté, l’art, le sport, l’histoire, la culture et la nature se croisent depuis des temps lointains, évoluent de concert et maintiennent contre vents et tempêtes un art de vivre irremplaçable.
(texte et photos de Véronique de Certaines)