1 – Le bénéfice de l’eau
De très sérieuses études estiment la disponibilité en eau à 486 Milliards de m3 par an pour notre confort, mais les deux tiers s’évaporant, il resterait pour nos usages 175 Milliards de m3...
Si 32 Milliards sont prélevés dont 5 M pour l’eau potable, les 3/4 de ces disponibilités s’engouffreraient dans la terre pour alimenter les nappes phréatiques.
Les ingénieurs de la terre s’interrogent désormais sur une pressante gestion en amont afin d’évaluer la gestion de cet « or bleu » dans le but de limiter le manque d’eau, évaluer les disponibilités en surface et alimenter les nappes phréatiques elles-mêmes, que les experts qualifient selon les années de modérément basses à très basses...
On compterait vingt départements français en état de déficit aujourd’hui et curieusement, plusieurs régions - dont la nôtre - seraient exposées à ces risques de pénurie d’eau : citons la Seine - Normandie et Adour Garonne avec la Loire et le Sud-Ouest de la France !
L’agriculture et l’industrie seraient, davantage encore, les premiers consommateurs d’eau chaque année. Or, 70 % de cette eau est utilisée par l’industrie dont, selon ces experts, 25 % sont réellement consommés, le reste étant remis à la nature après avoir été purifié, et 10 % de l’eau réservé aux usages agricoles, en l’occurrence 4 Milliards de m/3. Soit, principalement, une consommation saisonnière centrée sur l’été dont 50 à 80 % est utilisé - selon l’INRA - pour les plantations de colza, de maïs, de tournesol, et pour les fruits et légumes.
Les départements cités comme « fragilisés » de notre région seraient le Lot, le Gers et les Landes...
2 – 2006, une année charnière.
Depuis 2006, les surfaces irriguées seraient stabilisées, le quart de la disponibilité de cette eau étant utilisée pour la consommation domestique. Une vieille histoire qu’entretiennent les agriculteurs et les ONG de la terre, dont « France Nature Environnement », qui dénoncent régulièrement la consommation démesurée de l’eau par les gens de la terre, et le manque d’économie de cet usage dans la gestion de l’eau en France ! L’abondance de l’eau à laquelle chacun était habitué hors les régions de la Méditerranée avait peu contribué à cette gestion raisonnée et durable des consommateurs, mais le réchauffement climatique semble avoir modifié les comportements des usagers. De plus, un contrôle du gaspillage de l’eau a permis de réduire au fil du temps le volume d’eau perdue (20 %) à cause des canalisations vétustes ou mal vérifiées.
3 – L’agronomie vigilante.
Les agronomes soulignent qu’à l’avenir, il faudra repenser la nature des cultures agricoles en suivant une sélection génétique des espèces peu gourmandes en eau, comme il sera urgent d’éduquer à la consommation domestique de cet or bleu dans les us et pratiques de chacun.
On parle également de récupérer les eaux polluées, de les purifier de leurs polluants pour recharger in fine les nappes phréatiques au cours d’un cycle circulaire innovant. Tout ceci modifierait cependant le peu d’empressement témoigné - jusqu’à maintenant- à cette gestion durable de l’eau. Les géo physiciens pensent déjà à injecter jusqu’à l’aquifère de la terre des produits permettant de purger la qualité de l’eau souterraine afin de la détacher des risques d’infection dans le sous-sol et la rendre ainsi consommable.
Tout ceci paraît sans doute assez neuf pour le commun des utilisateurs, et l’éducation dès l’école sera nécessaire pour changer les habitudes les plus anciennes, peu disposées dans ce sens car moins averties, comme nous le sommes désormais, de l’urgence de la gestion de l’eau pour tous.
On parle encore de construire des bassins de rétention de l’eau « hivernale » pour les usages de l’été comme cela se faisait dans les contrées tropicales, mais utiliser cette eau serait sans doute retirer la disponibilité aux barrages hydro électriques pour les bénéfices agricoles, particulièrement dans notre région où ces barrages sont nombreux et la production d’électricité directement concernée par cette pratique.
Réutiliser des eaux polluées, recyclées par des stations d’épuration, représenterait encore une autre perspective, la question restant encore « taboue » en France, à la différence de l’Italie, de Chypre ou d’Israël où la pénurie a imposé ces solutions d’urgence désormais acceptées par tous les habitants de ces pays.
Le code de gestion durable de l’eau s’établira donc en fonction de sa consommation raisonnée, de l’irrigation contrôlée, du recyclage imposé... Soit une petite « révolution de l’intelligence » pour chacune des professions concernées, de concert avec les autres.. Chacun devine que les défis sont encore à venir. L’acceptabilité sociale et le partage des tâches seront un éveil civique compliqué, mais bien nécessaire au bénéfice de l’eau en tant que bien commun de tous. L’Inra envisagerait des réserves d’eau pour la viticulture, mais de telles mesures s’accorderaient-elles avec les règles actuelles du classement viticole des vins ?
Dans les zones marines, la désalinisation de l’eau de mer constitue encore pour nous une manière de « prouesse ». En Israël, la pratique est pionnière et les pays du monde émergents se pressent auprès des géologues et ingénieurs qualifiés pour apprendre la technique à leur usage.
L‘eau est devenue ainsi un enjeu écologique et économique.
Les alertes, les alertes renforcées, et la menace de pénurie ont accéléré le réflexe de précaution de beaucoup aujourd’hui. De 2006 à 2021, les directives prises par les Ministres de l’Environnement successifs alertent sur la réduction drastique de la consommation d’eau imposée aux agriculteurs.
Les projets de stockage de l’eau pourraient faire un pas en avant notable. Souvenons-nous de ces premières mesures drastiques qui avaient été prises en 1992. La Loi sur l’Eau en 2006 ne fit que les accentuer, on dit parfois que certaines régions les plus exposées pourraient subir une baisse allant jusqu’à 85 % de la consommation actuelle.
Les Chambres d’Agriculture en France auraient déjà inscrit trente organismes agricoles prêts à gérer l’eau et sa répartition pour les gens de la terre, selon des bassins de vie spécifiques. En 2012, on évoquait déjà un moratoire en faveur de bassins de rétention de l’eau pour le Sud Ouest. Ce moratoire fut levé en 2015 par le ministre de l’écologie Ségolène Royal. Il se dit que pour l’heure, tous ces projets demeurent gelés, en attente de décisions politiques pour ouvrir des horizons nouveaux à ces gestions de l’eau pour l’avenir.
L’avenir de l’eau, sa gestion, son partage, sa préservation, sa protection durable n’auront jamais été évoqués avec tant d’intérêt que depuis la prise de conscience généralisée de l’ampleur du sujet et des urgences de solutions à inventer entre des professionnels que bien des intérêts séparent encore dans leur entreprise !
François-Xavier Esponde