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Patrimoine religieux
La France et la protection des chrétiens d'Orient, un propos de circonstance d'hier à aujourd'hui
La France et la protection des chrétiens d'Orient, un propos de circonstance d'hier à aujourd'hui

| François-Xavier Esponde 1344 mots

La France et la protection des chrétiens d'Orient, un propos de circonstance d'hier à aujourd'hui

1 - La guerre en cours en Orient et ses effets sur les chrétiens

Des discussions de paix tenues à Paris sur l'avenir de cette terre unique par son origine, le sujet de leur avenir n'est pas anodin et ne laisse personne indifférent !
Dans le contexte de guerre actuelle au Proche Orient comment et en quels termes se posent les conditions de la protection des Lieux Saints par la France ? Hier et aujourd’hui ?

Une histoire ancienne depuis le roi saint Louis au XIIIème siècle, qui veille à "la protection physique des chrétiens au demeurant catholiques" en ces lieux peu ou prou favorables à leur présence.
Plus tard, François Ier et le Sultan Soliman le Magnifique scelleront un accord en faveur de la France et au détriment de Charles Quint à propos de cette zone d'influence désormais reconnue en Orient pour que la France protège désormais ces Lieux Saints.

Nous sommes déjà en 1535.
Des églises telles la basilique de la Nativité à Bethléem, la protection du patrimoine religieux de ces sites, le règlement des contentieux entre religieux chrétiens de différentes églises, connaîtront au fil du temps les bouleversements politiques et religieux de la région. Zone d'influence pour les Empires de cette époque, ottoman, anglais et français, qui se disputeront leurs domaines de prédilection jusque dans la vieille Jérusalem, objet d’infiltration infinie.

Qu'en sera-t-il à la fin du conflit actuel où l'on décline destructions d'églises, de couvents, d’écoles, d’hôpitaux d'espaces sacrés autour de Gaza et en Cisjordanie, ou au sud Liban, occasionnés par le conflit ouvert depuis le 7 octobre 2023 ?

En 1852, au coeur du XIXème siècle, la signature du Statu Quo des Lieux saints fit passer à une étape majeure au bénéfice de la protection de ces espaces sacrés.
Il fallait observer "la règle commune de ne changer ni de modifier des coutumes séculaires" au sein des communautés chrétiennes principalement orientales et de protéger au premier chef leur intégrité physique et morale.
La France garantissait à ses ressortissants religieux nationaux in situ des droits et des privilèges assortis de bénéfices pour permettre de vivre en Terre Sainte.

On notera que les Domaines Nationaux, propriétés assumées par la France, assureront une implication culturelle et spirituelle forte au bénéfice du rayonnement de la France, inévitablement sollicitée par des tiers envieux d'une telle influence !
Le financement colossal de l'entretien de la basilique de la Nativité en sera un enjeu premier, un chantier en attente de travaux depuis deux siècles dont "les propriétaires" ne pouvaient assurer la charge.

On fit valoir des Accords de Protection, droits obtenus par la France de ses alliés principalement européens, pour garantir sous le générique de Droits de Capitulation répétés à l'infini au cours du passé, la possibilité pour des étrangers circulant en Terre sainte de voyager, de commercer, et de pratiquer leur religion en vertu de ces ententes.

Comprenez pour des non catholiques et des musulmans, un droit acquis par la France comme une garantie appliquée en Terre sainte dès ce temps.
Dès 1740, on développe "les Capitulations" avec le sultan ottoman et on reconnaît que "le temps demande du temps" pour admettre que les Lieux saints ne soient la propriété individuelle de quiconque mais de tous les croyants ! Une gageure !

De ces capitulations, disent les historiens, on fit peu mention de la part de Soliman le Magnifique, mais ces accords signés engageaient principalement les parties dans des échanges commerciaux et administratifs de première main.
On évoque "des religieux chrétiens non français bénéficiant de ce protectorat catholique de la France en Orient dès la fin de l'empire ottoman."
Une révolution des esprits pour cette époque et pour notre pays devenu administrateur civil d'un domaine religieux particulièrement sensible de la terre d'Orient !

En 1898, le pape Léon XIII soutint et confirma ce protectorat de la France et des accords sur ce thème ont été réitérés  depuis 1948 : concernent la protection du patrimoine religieux et culturel, des accords de libre échange douaniers avec les pays proches, et des garanties contre les risques d'expropriation des biens religieux, une menace endémique, d'hier à aujourd'hui, en ce pays où de nouveaux venus viennent à "squatter" le domaine religieux à leur avantage.

La France disposant de ce statut singulier, le Consul de France bénéficie de quelques faveurs lors de cérémonies et messes liturgiques en l'honneur du pays, de ses nobles tâches et de ses devoirs de retour.
Il est rappelé la formule de circonstance : "Seigneur, sauve la République et exauce nous en ce jour où nous t'invoquons" !

Il est encore des Domaines Nationaux français héritages de familles juives qui les transmirent au pays et qui représentent désormais une charge financière importante.
Le domaine Sainte-Anne, celui d'Eleona, l'abbaye d'Abou Gosh, la basilique de la Nativité à Bethléem, objet de convoitises ininterrompues au cours de l'histoire  depuis l'Empereur Constantin en 330, Justinien au VIème siècle, seule et unique église ouverte au culte depuis l'origine, la basilique constitue le roman inachevé d'un récit livresque.
On s'y dispute les carrés sacrés, à chaque étage, de surface au sous sol, au plafond et dans les parties les plus inappropriées des moines ermites habitent comme en une fourmilière .Ce jour ce sont des latins, des grecs orthodoxes et des arméniens qui tiennent la présence solidement armée, de la gestion de la Nativité !

Mais à qui appartient cette basilique exceptionnelle ?
Aux religieux, à l'Etat d'Israël, à la délégation de quelques monarques puissants du monde oriental ?
Mystère !
On l'ignore, mais à l'heure d'une infiltration d'eau des plafonds abimant les mosaïques séculaires du site, on cherche du pactole et des dividendes car peu de volontaires s'annoncent et les travaux attendent parfois plusieurs années.
En 2011, la basilique a rejoint le cercle majeur de l'Unesco du Patrimoine immatériel de l'Humanité car dès l'origine la Palestine avait été reconnue par l'organisation culturelle internationale à la colère d'Israël et des Etats Unis peu désireux de cette cohabitation.

D'autres couvents alentour à Bethleem ont été enregistrés par l'Unesco, et parmi ces sites historiques, le chemin des pèlerins.
Un sujet sensible d'hier remis au goût du jour avec ce qui se passe en Israël.
Qu'en diront les principaux observateurs internationaux de l'événement ?

Les treize églises chrétiennes de Jérusalem étant prises au piège de la guerre, l'absence de pèlerins, les dégâts de la guerre et leur incidence sur les populations internationales auront inévitablement une incidence première en vue de la réparation après-guerre.

2 - Un retour à l'histoire instructif.

Souvenons-nous sous le Second Empire, c'est en 1860 qu'eut lieu le massacre des chrétiens libanais maronites en provoquant dans l'histoire de la France la première opération humanitaire pour sauver les chrétiens amis de la France !

Paradoxe infini de l'époque, en France sous la IIIème république, la présence des enseignants religieux dans l'école de la république faisant pression, nombre de ces congrégations enseignantes expulsées quitteront le sol national pour l'Orient et fonder des écoles confessionnelles généreusement subventionnées par l'Etat dans le but de "développer le rayonnement de la culture française".

Le tout dans un environnement politico culturel confus où se mêleront au fil du XIXème siècle ces luttes d'influences internationales à propos de la protection des chrétiens en Orient. Comme déjà cités, les Russes défendant les orthodoxes, les anglais les juifs et les Druzes, les français les catholiques ou le Vatican, chacun disposant de son rapport défini dans ce monde qui fascinait les Européens, de plus en plus conscients de l'héritage reçu de ces chrétiens autochtones.
De ce point de vue, le récit de la première guerre de Crimée est instructif de l'époque et de son enracinement dans des disputes diplomatiques et militaires, éloignées des Lieux Saints et proches des zones d'influences nationales !

Le poète Lamartine s'extasie de la foi fervente et authentique des chrétiens maronites au Liban. L'intelligence française partage ses commentaires.

Cependant, dans un contexte politique local où les Ottomans et les Maronites chrétiens taxés d'être "chrétiens" - comprenez des croisés, ou pire, des “vendus” - s'affronteront chez eux en 1915, au grand dam de la France, impuissante à interrompre ce conflit génocidaire !

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