(photo de couverture : Michel Postel avec la directrice du musée Asiatica, Mme Xintian Zhu)
C'est une immense perte pour le monde culturel biarrot et plus généralement pour tous les amateurs d'art oriental : Michel Postel, fondateur de Franco-Indian Pharmaceuticals et du Musée Asiatica de Biarritz, est décédé à l'âge de 98 ans. La cérémonie religieuse aura lieu le mardi 7 janvier à 12 heures au Crématorium de la Côte Basque, 111 Boulevard Marcel Dassault à Biarritz. Les visites se font au Musée Asiatica, 1, rue Guy Petit à Biarritz.
Voilà bientôt un bon quart de siècle que Michel Postel avait créé cet extraordinaire Musée Asiatica sur l'emplacement des anciennes voies de chemin de fer qui menaient autrefois les voyageurs jusqu'à la gare de Biarritz-Ville (aussi Gare du Midi).
Tout avait commencé avec l'aventure d’un jeune biarrot Michel Postel arrivé à Bombay pour y fonder le « Franco-Indian Pharmaceuticals » après y avoir représenté de grands laboratoires français.
Michel Postel qui était le fils d'un dentiste biarrot et ancien étudiant de Sup.de.Co., se prit d’un intérêt dévorant pour la philosophie de Gandhi et la civilisation artistique des Indes, plusieurs fois millénaire. A ses occupations professionnelles liées aux industries chimiques et pharmaceutiques, il joindra des années de travaux consacrés aux Arts asiatiques, publiera ses recherches avec l'Université de Louvain ou le Musée Guimet (à Paris).
Michel Postel réussira surtout à persuader Didier Borotra de l'intérêt pour Biarritz de fixer ses collections au sein d'un musée, prévu originellement à Genève.
D'autant plus que ses propres acquisitions, effectuées auprès de marchands londoniens, zurichois ou new-yorkais, n'auront pas manqué d'attirer d'autres pièces remarquables provenant d'amateurs de ces mêmes pays.
Je me souviens en particulier de cette rencontre sous un soleil printanier qui illuminait Biarritz et tiédissait le parvis du musée Asiatica où le prince Henrik de Danemark marquait une échappée supplémentaire, la troisième, entre les séances de soins à la thalasso du Miramar. « Cela fait trois fois que je visite ce musée », m’avait confié le prince, « et je suis littéralement abasourdi devant la quantité des objets et la qualité des cultures révélées ». Et d’ajouter : « Il s’agit certainement d’un des musées les plus intéressants d’Europe dans ce domaine qui m’est particulièrement familier »... (*)
Le Musée Asiatica renferme des pièces exceptionnelles : on y remarquera en particulier la très belle statuaire "gréco-bouddhique" du Gandhâra, région située à la frontière du Pakistan et de l'Afghanistan actuels où, hélas, les talibans avaient détruit en mars 2001 les fameuses statues de Bouddha considérées comme les plus grandes au monde.
Quant à l'art "gréco-bouddhique" du Gandhâra, il paraît étrangement familier à nos yeux d’Européens, en raison des influences hellénistiques qui y ont perduré au cours des siècles qui suivirent l'expédition d’Alexandre le Grand en Asie centrale au IVème siècle av. J.-C.
Mais on trouve également au musée Asiatica la production indienne traditionnelle : des bijoux, des toiles brodées, mais aussi de magnifiques objets du Tibet ou de Chine, des jades sculptées de l’Antiquité. Le visiteur pourra y découvrir des civilisations très anciennes, avec leurs croyances, leurs mythologies et leurs philosophies.
Indiquons encore que les Basques se sont intéressés aux Indes : certes il eut les missionnaires, avec en tête le grand François de Xavier, "l’apôtre des Indes", originaire de Navarre. Mais aussi quelques jeunes aventuriers comme cet Augustin Hiriart qui exerçait le métier d’orfèvre à Bordeaux avant de s’illustrer au service du quatrième empereur moghol de l'Inde, Jahângîr, lequel entretenait des liens avec l’Europe, en particulier l’Angleterre de Jacques Ier. Ses exploits sont connus par les lettres qu’il adressa à ses connaissances restées en Europe. Nous y reviendrons au cours d'un prochain article.
(*) Car Son Altesse Royale le prince Henrik de Danemark, diplômé de chinois et de vietnamien à « langues O » (École nationale des langues orientales), était férue de culture asiatique ; n’avait-elle pas passé ses cinq premières années en Annam où son grand-père Henri, fils du maire de Pau Aristide de Laborde de Monpezat, s’était établi à la tête d'un domaine de plusieurs dizaines de milliers d’hectares (d'hévéa, de riz, de café et de poivre) tout en dirigeant le journal « La Volonté Indochinoise » qu'il avait créé en 1924 à Hanoï. La succession échut à André de Laborde de Monpezat, le père du futur prince, lequel obtiendra son bac en 1952 à Hanoï, avant que le désastre de Dien-Bien-Phu ne livre en 1954 le malheureux Nord Viêt-Nam à ses nouveaux maîtres : le pouvoir communiste expropriera et expulsera la famille qui se repliera dans sa propriété près de Cahors.
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