Un chapitre du célèbre atelier de makhila à Larressore se tourne avec la mort de Charles Bergara (5ème génération) à 97 ans. Il a marqué l'histoire de cette famille « par sa passion et son charisme. Il a œuvré à faire connaître le makhila dans le monde. Nous ne le remercierons jamais assez pour son engagement ».
La cérémonie religieuse sera célébrée ce vendredi 19 janvier à 10 h 30 en l'église Saint-Martin de Larressore.
Après sa fille Nicole, la succession est à présent bien assurée avec sa petite-fille Liza...
Si le célèbre bâton des Basques avait été mentionné au XIIème siècle par Aymeri Picaud, à l’époque florissante des pèlerinages de Compostelle, certains n’hésitent pas à rapprocher le nom de « makhila » de « makel » qui comportait la même signification en ancien hébreu.
Comme beaucoup d’objets et de traditions basques, il remonte à la nuit des temps sans que l’on ne sache rien sur son authenticité locale ou l’origine de son apparition. Le makila, arme défensive, demeura le fidèle compagnon des bergers protégeant leurs troupeaux, ou des contrebandiers. Devenus trop dangereux pour les Basques qui s’en escrimaient à tout moment, certains maires, tel celui de Saint-Pée-sur-Nivelle en août 1829, l’interdirent sur une « ordonnance royale de 1728 ».
Très en vogue lors des Années Folles avec la mode du Pays Basque, il para les devantures des boutiques et sert encore de cadeau prestigieux pour les personnalités artistiques, politiques… Une tradition qui perdure jusqu’à présent.
Les secrets d’une tradition
La fabrication de makhilas Ainciart Bergara avait commencé aux alentours de la révolution française de 1789, avec Antoine Ainciart. Décédé très tôt, son épouse, puis plus tard son fils Jean, prirent le relai à l'atelier de Laressore. Jean Ainciart développa l’entreprise.
La saga artisanale se poursuivit avec Marie-Jeanne qui prit pour époux le brillant Jean Bergara (1902-1972), lequel fera prospérer la fabrication des makhilas en remportant deux médailles à l’Exposition Universelle de Paris. Le roi de Bulgarie qui admirait les makhilas, en reçu un en cadeau avec la devise gravée « Mon camarade et mon aide » de la part du Comité organisateur.
Le fils de Marie-Jeanne et Jean, Charles Bergara (qui reçut la Légion d’Honneur en 2003), perpétua la fabrication familiale en réussissant à maintenir la production malgré le seconde Guerre Mondiale.
Offerte à titre de présent à des hôtes illustres de passage tels Napoléon III, le maréchal Foch après la guerre de 14-18, le Prince de Galles, le président Pompidou ou le Pape, la canne basque continuera d’être fabriquée traditionnellement par Charles Ainciart-Bergara, sa fille Nicole et ses neveux, héritiers d’un exceptionnel savoir-faire qui remonte au moins au XVIIIème siècle, à Dominique Ainciart.
Au printemps, après avoir parcouru bois et forêts afin d’y repérer les pieds de néflier ayant la bonne grosseur et la forme convenable, le marquage se fait sur le pied avec un instrument coupant original, ces étranges cicatrices en relief, ondulées ou pointillistes, qui ornent les futurs makilas.
Chaque makila au manche de cuir tressé est surmonté d’une bague de corne ou métal, est fabriqué sur mesure en fonction de la taille de son futur propriétaire. En se dévissant, le fourreau dévoile une pointe d’acier forgé sur laquelle s’ajoute une devise gravée correspondant à la personne qui sera en sa possession.
Un bâton magique qui ne s’achète pas mais qui s’offre ! Le mien m'avait été attribué il y a près d'un quart de siècle pour accompagner le Prix de la Culture basque qui m'avait été décerné par la Ville de Bayonne et la société universitaire basque Eusko Ikaskuntza, avec la devise : "Asmoz ta jakitez" (pour le talent et le savoir). (Makhila Ainciart Bergara - Inthalatzia Ouest, Fronton de Larressore - Tél 05 59 93 03 05)