L’exposition « Paris, fin de siècle : Signac, Redon, Toulouse-Lautrec et leurs contemporains » au Guggenheim de Bilbao rend hommage aux peintres qui refusaient le réalisme académique. Créateurs des mouvements néo-impressionniste, symboliste et nabi, ils ont, tous à leur manière, cherché à traduire un message nouveau à une époque politiquement trouble.
Après le Second Empire, la IIIème République (1870-1945) est proclamée. En 1878 est inaugurée l’Exposition Universelle à Paris. Une décennie plus tard (1889), l’ingénieur-architecte Eiffel construit à Paris la tour qui deviendra la plus connue au monde.
En parallèle, s’enchaînent les gouvernements éphémères avec leurs démissions et leurs scandales politiques dont l’affaire Dreyfus (1894-98). Emile Zola, un des seuls intellectuels à être dreyfusard, est obligé de s’expatrier en Angleterre suite à la publication de son « J’accuse ». La fin du XIXème siècle voit se développer une presse tapageuse.
C’est dans cette atmosphère que naquit le mouvement Nabi. Suite à l’exposition d’estampes japonaises à l’École des Beaux-arts en 1890, diverses techniques de gravure se développèrent en France. Tel, l’art de l’affiche caractérisé par des aplats de couleurs cernés de noir et des motifs simplifiés comme en témoigne l’œuvre d’Henri de Toulouse-Lautrec (1864-1901). Ce maître post-impressionniste de l’estampe croquait de son pinceau les danseuses et le monde affriolant des bars du Moulin Rouge. Il passa ses dernières années au Château de Malromé en Gironde, la demeure acquise par sa mère et qui avait appartenu à Pierre de Rostéguy de Lancre, le célèbre pourfendeur des sorcières basques en 1609). En parallèle, Pierre Bonnard (1867-1947), également post–impressionniste comme Toulouse-Lautrec, Maurice Denis (1870-1943) et Édouard Vuillard (1868-1940), développèrent la technique de la lithographie en couleur et fondèrent le mouvement Nabi. Un mouvement qui s’était construit autour de la méthode synthétiste reposant sur la mémoire et l'imagination plus que sur l'observation directe.
Un monde de l’imaginaire anti-naturaliste évoqué par le symbolisme apparut à ses débuts, tel le mouvement littéraire du même nom dans les années 1880. Une réflexion qui se concrétisa lors de la publication du « Manifeste symboliste » par le poète Jean Moréas, six ans plus tard.
Sur le plan pictural, le symbolisme généra un paysage psychologique à caractère spirituel.
Parmi les peintres caractéristiques de cette mouvance, Odilon Rodon (1840-1916), avec ses têtes flottantes et ses araignées claires-obscures au fusain, immerge le spectateur dans son rêve à l’eau-forte.
Toiles symbolistes ou « nabis », certaines identifiées comme néo-impressionnistes en raison de leurs formes singulières et de leurs thèmes allusifs, en reflètent l’ambiguïté, comme par exemple celles de Maurice Denis à la thématique allégorique religieuse.
Dans le fil de l’impressionnisme, le néo-impressionnisme entre en scène en 1886. Ce mouvement organisé par Georges Seurat (1859-1891) regroupe, parmi les peintres les plus emblématiques, Henri-Edmond Cross (1856-1910), Maximilien Luce (1858-1941), et Paul Signac (1863-1935), auxquels se joint Camille Pissarro (1830-1903).
Leur objectif était de lier les théories scientifiques sur la couleur et la perception à des effets optiques ou pointillistes, inspirées des nouvelles découvertes optiques et chromatiques de chercheurs tel le chimiste français Michel-Eugène Chevreuil.
Provenant de collections privées européennes, ces toiles de maître aux effets optiques du néo-impressionnisme, rêves fantastique du symbolisme ou estampes d’une réalité ré-imaginée des nabis, inconnues du public sont ainsi réunies pour cette exceptionnelle exposition.
Jusqu’au 17 septembre, exposition « Paris, fin de siècle : Signac, Redon, Toulouse-Lautrec et leurs contemporains » au Musée Guggenheim à Bilbao. Ouvert de 10h à 20h. Fermé tous les lundis sauf de juillet et août.
Anne de Miller La Cerda