1 - L’année 2018 rappelle deux anniversaires contemporains et de réelle importance.
- Le 10 décembre 1948, les 58 Etats membres de l’Assemblée Générale des Nations Unies adoptent la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme à Paris. Le choix du lieu n’est pas neutre pour se souvenir, lors de ce 70ème anniversaire, du sens des déclarations contenues dans le texte, à savoir « la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine et leurs droits égaux et inaliénables comme un idéal à atteindre par tous les peuples et toutes les nations »…
- Autre anniversaire en 2018, le 170ème du Décret sur l’Abolition de l’Esclavage dans les colonies françaises, adopté par le gouvernement provisoire de 1848 sous l’impulsion de Victor Schœlcher (sans oublier que déjà le 3 juillet 1315, l’édit du Roi de Navarre devenu roi de France, Louis le Hutin, avait affranchi les serfs du domaine royal. Cet édit rappelait que selon le droit naturel, chacun naissait franc, donc libre en langage actuel. Officiellement, depuis cette date, le sol de France affranchissait l'esclave qui le touchait. Louis X le Hutin consacrait ainsi en l’amplifiant ce vaste mouvement de libération commencé par Suger : « Toute créature humaine doit généralement être franche par droit naturel. Le Roi condamne avec énergie le joug et la servitude qui est tant haineuse et fait qu'en leur vivant, les hommes sont réputés comme morts et, à la fin de leur douloureuse et chétive vie, ils ne peuvent disposer ni ordonner des biens que Dieu leurs a prêtés en ce siècle », ndlr.).
Dans l’Antiquité aucune civilisation n’avait osé mettre en avant de tels principes dans le monde de l’universel. En Orient on n’y croyait guère. Les Grecs et les Romains pas davantage.
Souvenons-nous pour notre gouverne de la controverse de Valladolid en 1550, une date encore contemporaine de notre histoire : on se demandait si les indigènes d’Amérique, récemment découverts, étaient des humains dotés d’une âme.
Sepulveda, un penseur de la lignée d’Aristote, affirmait qu’ils ne l’étaient pas. Le dominicain Las Casas soutenait le contraire en affirmant que « tous, nous étions des créatures sous le regard du Créateur », relisant le propos de l’apôtre Paul aux Galates : « il n’y a plus ni juif, ni grec, ni esclave, ni homme libre, ni homme ni femme de la part des chrétiens ».
Un tel humanisme choqua les esprits éduqués du temps et n’avait pas encore conquis tous les contemporains.
Relire l’Evangile dans les cultures de son époque devenait une école de la vie et des humanités revisitées par les Paroles de l’Eternel.
2- Le contenu d’un humanisme contemporain revient au-devant de l’esprit et de la conscience universelle.
Héritiers de tous ceux qui dès le XIVème siècle proposaient une forme d’émancipation des hommes, nous voulons prendre le destin en main en perspective d’une justice plus humaine. Mais les contemporains que nous sommes, s’interrogeons sur le sens d’un tel défi aujourd’hui.
Les migrations actuelles sous toutes les latitudes. Les enjeux du réchauffement climatique, les théories du néo libéralisme à grande diffusion, la propagation des technologies numériques à l’échelle de la planète, ont fait éclater les structures et les limites du monde de ces années 1948.
Nous avions connu, disent les historiens contemporains, de grandes migrations, celle des juifs espagnols et d’Europe Centrale, celle des huguenots français. Mais sans commune mesure avec ce que le proche avenir peut nous réserver.
Jadis, les découvertes de l’existence planétaire des humains de nouveaux mondes avaient corrigé les vecteurs européens de l’intelligence du passé. Aujourd’hui, devant l’immensité des défis modernes, certains prônent de départager les Droits Fondamentaux de l’Humanité, de l’état de la Citoyenneté réelle, inégalement reconnue et acceptée. D’autres invitent en réponse à œuvrer dans le sens de la citoyenneté mondiale. La crise migratoire nouvelle, aux suites pour l’heure inconnues, pose à nouveau la valeur de la dignité humaine dans sa dimension universelle pour le temps qui vient.
Le réchauffement du climat a désormais embrasé le monde entier. Le comportement uniforme d’un homme coupé de son environnement et maître de son destin ne fait plus recette. Les situations réelles ne n’autorisent plus.
La planète et la survie des espèces vivantes ont mis en lumière les prétentions d’un humanisme scientiste à courte vue, hérité des siècles passés. L’humanité ne pouvant plus se penser « hors-sol », les défis écologiques imposent de connaitre les limites de nos pouvoirs sur la Création et celles de notre bon droit.
Le rapport aux générations suivantes ne se posant pas en termes de résultats probants et exclusifs, les humanistes s’interrogent aujourd’hui sur le contenu même de ce présent pour le temps qui vient. « Dans un sens de la mesure, de la modération, de l’économie et du recyclage généralisé de toutes consommations ».
Pour les économistes, répondre à la question « qu’est-ce qu’une vie bonne et libre ? » déborde les limites encadrées des rendements divers des résultats immédiats.
L’humanisme économique appelle désormais le volontarisme des politiques pour administrer le bien public au service du bien commun des acteurs de la vie. « Veiller au bien être des acteurs, évaluer autrement le contenu des performances, et donner sens à la démocratie de ceux qui travaillent pour l’intérêt de tous, sont des défis majeurs de l’humanisme pour aujourd’hui ».
3 – La perspective d’un trans-humanisme portée par le numérique.
Un tel défi totalement inédit interroge sur le contenu du progrès « pour obtenir tout le possible sinon le bénéfice que nous voulons en retenir et refuser ce que nous ne voulons pour notre humanité ».
Un temps des Lumières dans cette version contemporaine plonge tout un chacun dans ce monde virtuel qu’il s’agira d’apprivoiser, de maitriser et d’utiliser à bon usage ! On devine que de tels défis sont encore à venir mais bien présents pour chacun. Elles sont l’objet du contenu de l’éducation même des plus jeunes générations qui jouent là leur propre avenir.
François-Xavier Esponde