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Littérature
1973 : Christine de Rivoyre, lauréate des Trois Couronnes et disparition de Pierre d'Arcangues
1973 : Christine de Rivoyre, lauréate des Trois Couronnes et disparition de Pierre d'Arcangues

| Alexandre de La Cerda 838 mots

1973 : Christine de Rivoyre, lauréate des Trois Couronnes et disparition de Pierre d'Arcangues

Il y a 50 ans, le 22 mai 1973, disparaissait Pierre d'Arcangues, marquis d’Iranda (né le 12 avril 1886), un des fondateurs du Prix littéraire des Trois Couronnes, dont nous avions rappelé le souvenir dans notre Lettre du 5 mai dernier :
https://baskulture.com/article/lcrivain-pierre-darcangues-en-exergue-au-festival-musical-et-littraire-darnaga-5897 

Quelques mois plus tard, en cette même année 1973, la romancière landaise Christine de Rivoyre se voyait remettre le Prix littéraire des Trois Couronnes par le président du jury, le préfet Gabriel Delaunay, qui avait succédé à son collègue alors disparu, le préfet, poète et romancier Pierre Daguerre.

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Ex-libris d'André Boyer-Mas ©
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La cérémonie avait eu lieu à Hendaye où « un vibrant hommage avait été rendu à l’écrivain Pierre Loti à l’occasion du cinquantenaire de sa mort, ainsi qu’à deux personnalités marquantes du jury disparues peu auparavant, le marquis Pierre d'Arcangues et Mgr Boyer-Mas ».

Au moment de la Guerre d'Espagne, André Boyer-Mas avait organisé le passage vers la France de centaines de personnes - essentiellement des membres du clergé espagnol persécutés par le gouvernement républicain, se chargeant de leur convoiement et de leur hébergement -, avant d'aider au passage par cette même frontière de nombreux convois de Français Libres vers les ports de la Méditerranée pour embarquer vers l'Afrique du Nord, alors qu'il était à la tête de la Délégation française de la Croix-Rouge en Espagne (située à Madrid).
Car derrière le religieux se cachait un fin diplomate : nommé par Édouard Daladier (en février 1939) attaché culturel auprès de l'ambassade de France en Espagne, il devint le confident et l'ambassadeur du Pape Pie XII qui le nomma son Camérier.
Auteur de plusieurs études historiques, on lui doit également en particulier celle sur l'Exposition commémorative du 3ème centenaire du mariage de Louis XIV avec Marie-Thérèse : 1660-1960, Saint-Jean-de-Luz étape royale (Catalogue par Mgr Boyer-Mas, Bordeaux, Delmas, 1960). 

Saint-Jean-de-Luz dont une avenue porte d'ailleurs son nom (située près de la ligne de chemin de fer, elle donne dans l'avenue Claude Farrère vers le quartier Acotz).

Quant à Christine de Rivoyre, c’est son roman « Boy » qui lui valut de recevoir le Prix des Trois Couronnes…
Il s’agissait d’un tableau de mœurs quelque peu nostalgique, avec la touche acide qui est le propre du talent de Christine de Rivoyre : à travers l'aventure de Boy et des siens, racontée tour à tour par Crevette ou par Suzon, on découvre le monde des maîtres de maison et celui de l'office, avec ses fêtes à lui, ses alliances paysannes, ses joies, ses dimanches et ses bals. La romancière réussit à recréer minutieusement un univers d'avant-guerre, ses rites, ses opinions et son mode de vie encore proche du XIXème siècle. 

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Christine de Rivoyre entourée de Michel Déon, Jean d'Ormesson et Félicien Marceau ©
Christine de Rivoyre Michel Déon Jean d'Ormesson Félicien Marcea.jpg

Douze ans et demi, un prénom bizarre hérité d'une aïeule allemande, une petite taille, du caractère et beaucoup de romantisme : telle est Hildegarde, qui rêve sur la plage d'Hendaye, en juillet 1937. 

Comme chaque année, malgré la guerre d'Espagne toute proche, elle y passe les vacances avec sa famille, sur qui règne une grand-mère à l'autorité d'un autre âge. Le vague bonheur de la petite fille se précise quand débarque, au volant d'une Talbot décapotable, son oncle favori, qu'on appelle « Boy » chez les Malégasse. 

C'est un jeune homme de vingt-six ans, à qui personne ne résiste. Ni sa mère qui l'adore, ni ses soeurs, même la plus revêche, ni ses amies nombreuses et successives, pas plus que sa nièce, complice extasiée de ses frasques, ou Suzon, la femme de chambre, qu'il va souvent retrouver la nuit dans sa petite chambre sous les combles. 

Pour tous, domestiques, cuisinière et Nannie comprises, Boy est le dieu du foyer, l'image même de la jeunesse, de l'insouciance heureuse, un « fils de roi » qui a la chance avec lui, la fantaisie, la grâce. Et pour Hildegarde, qu'il a baptisée « Crevette », il est le charme fait oncle et, bien sûr, son premier amour inavoué.

Mais qui est Boy, en réalité ? 

Derrière la façade, l'ombre se découvre peu à peu, celle d'un faible soumis à ses passions, soudain possédé par la folie du jeu, des sens, de l'alcool ou de la vitesse. Boy est de ces êtres qui vivent plus intensément que les autres, et ne semblent destinés à briller un moment bref que pour mieux disparaître ensuite d'un coup, dans le dernier éclat d'un drame inévitable. Il ne laisse pas moins dans la mémoire de ceux qui l'ont aimé une blessure qui ne guérit jamais tout à fait, souvenir lumineux d'un passage ébloui.

Des jeunes poètes également récompensés

Et la veuve du fondateur des « Trois Couronnes » remettait personnellement le prix qui portait le nom de son époux, le préfet Pierre Daguerre, à Louis Brunet pour son recueil de poésies « La porte des brebis » faisant directement écho aux paroles du Christ : « En vérité je vous le dis, je suis la porte des brebis » (Evangile de Jean). 

Par ailleurs, « des prix d’encouragement étaient formulés à deux autres poètes, le jeune biarrot Alain Landais et Alban-Robert Fillol, avec « une certaine façon d'approcher les choses de la vie avec humour, débouchant sur la création poétique » : en 1973, il avait publié « Pétales d'hortensias ».

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"La porte des brebis" de Louis Brunet ©
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