Entre une « Princesse des neiges » (débarrassée des « représentations culturelles datées » et « Les Misérables » façon Ladj Ly (qui s’est bien gardé de montrer à ses spectateurs, dont, paraît-il, ceux de l’Elysée, les images des blocs de béton tombant des fenêtres sur des policiers, des voitures de pompiers caillassées & incendiées sans raison, des infirmières et des médecins agressés, des tabassages à mort pour mauvais regard et autres scènes de la « diversitude » et du « vivre-ensemble »), les écrans devraient prochainement accueillir « Le Fils d’un roi » de la cinéaste Cheyenne-Marie Carron, réalisatrice de « l’Apôtre », de « Patries » et de « Jeunesse aux cours ardents ». La projection en avant-première du film aura lieu le 7 décembre prochain à Paris au cinéma « Le Balzac ».
Enfant d’ouvriers, Kevin, 17 ans, reconsidère la société et ses injustices quand son meilleur ami Elias lui parle des bienfaits de la monarchie dans son pays d’origine, le Maroc. La réflexion des deux lycéens à l’occasion d’un exposé d’histoire les confrontera à de nombreux réfractaires, mais aussi à la découverte de l’héritage réel de la monarchie française.
Dans sa « Note d’Intention », Cheyenne-Marie Carron note que beaucoup de ses films et projets « parlent d'enracinement, d'héritage et de quête de soi, généralement du point de vue de personnages isolés dans la société : une jeune fille issue de la DDASS (« La Fille Publique »), un agriculteur en proie aux difficultés de la profession (« La Morsure des Dieux »), ou encore une jeune femme à la recherche d’une nouvelle façon de vivre via des traditions ancestrales (« le Corps Sauvage ».) Des personnages qui me permettent de lancer des réflexions sur des sujets souvent sensibles ou tabous dans la société actuelle : que ce soit sur le fonctionnement de celle-ci, sur des modes de vie marginalisées, ou sur la question de la spiritualité.
En discutant avec un ami, devenu monarchiste depuis, j’ai réalisé avoir retenu de l’Histoire de France ce que les programmes scolaires ont bien voulu me transmettre – généralement, en ce qui concerne le passage de la monarchie à la République, que les Rois ont tendance à être des tyrans tandis que les Révolutionnaires sont tous des héros… Mais à partir de cette discussion, j'ai pu découvrir un autre versant de notre Histoire, bien plus riche, plus complexe et plus nuancé que ce qui m'avait été enseigné jusqu’alors, ainsi que des valeurs oubliées qui mériteraient d’être rappelées à la société actuelle.
J’ai aussi réalisé que, de nos jours, la monarchie permet souvent d’œuvrer à l'unité du peuple : je pense au Royaume Uni, ou encore à la Belgique au moment des oppositions violentes entre Wallons et Flamands, incapables de former un gouvernement pendant plusieurs mois ; et c’est notamment la figure du Roi qui a évité la dislocation du pays.
Au milieu de ces réflexions historiennes et sociologiques, j’ai souhaité aller plus loin et en faire le fil directeur de ce film : dépeindre un jeune homme issu d'un milieu ouvrier, et qui porte en lui un désir de grandeur, de transcendance, l’envie d’échapper à son quotidien sans issue via l’étude de l’Histoire. Un jeune homme qui échappe au consumérisme ou à la superficialité de son temps, trouvant un sentiment de liberté et de joie via une nouvelle façon de s’éduquer auprès de son ami Elias, un jeune Marocain revendiquant la monarchie en son pays, et qui le guide dans sa découverte de l’Histoire des Rois et ses leçons.
Plus généralement, j’ai envie de faire le portrait d’adolescents à contre-courant de leur propre génération, chez qui sommeille un désir de beauté et de grandeur ; et de faire le portrait de jeunes de banlieue qui, mis à l’écart de la société, cherchent à penser celle-ci et y trouver leur juste place malgré les obstacles et les injustices qu’ils rencontrent ».
Si le scénario rappellera à plus d’un lycéen les censures insidieuses de professeurs incapables de s’extraire de leurs idéologies jusqu’à infliger injustices et humiliations aux contrevenants (expérience personnelle, dans ma jeunesse), l’intérêt du film provient du ton très juste des deux acteurs principaux qui procure au film une remarquable authenticité : deux jeunes de banlieue, avec leur naïveté, leurs maladresses, leurs « galères », qui découvrent peu à peu qu’on leur dissimulé l’histoire de leur pays en fonction de présupposés idéologiques…
Un extrait révélateur du film montre comment Élias et Kevin commencent leur exposé sous l’œil noir du professeur :
- Élias : « On va commencer par vous lire un texte de Tocqueville qui mentionne un discours de Louis XVI.Le prolétariat fut une création républicaine par l’expropriation de la classe ouvrière opérée par la Révolution.Les ouvriers ont été réduits en esclavage par les idéaux de 1789 ».
- Kevin : « Qui a supprimé le système corporatif qui garantissait la sécurité et les libertés ouvrières ?Qui a interdit aux ouvriers et au peuple l’exercice du droit naturel d’association ?Qui a enlevé à l’ouvrier la propriété professionnelle et les droits qui en découlent ?Qui a confisqué aux associations ouvrières l’immense patrimoine financier ?Qui a massacré le peuple et en particulier les ouvriers depuis 1789 ?Qui a supprimé les congés, les dimanches et tous les jours fériés ?Qui a obligé les enfants à travailler dès 5 ans dans les manufactures et les femmes la nuit ? La Révolution » !
- Élias : « La Révolution a été une immense escroquerie puisqu’elle a dépouillée l’ouvrier de tous les droits que lui garantissait la Royauté »…