Pour les vétérans des Fêtes de Bayonne, un seul nom s’impose : celui d’André Béhotéguy, disparu il y a quatre ans.
Cet ancien élu de la municipalité Henri Grenet laissera un souvenir impérissable à la tête de la commission des fêtes qu'il dirigea de 1974 à 1995 en en restant toujours le président d’honneur. Car, c'est dès la première édition des fêtes de Bayonne en 1932, à l'âge de cinq ans, qu'il y participa au son des txistus des gaitas et, surtout, des xirulas souletines qu'il appréciait particulièrement jusqu'à faire venir un de leurs virtuoses reconnus, Etxahun Iruri, lorsqu'il assumera la responsabilité de l'événement.
D'ailleurs, grand amateur des Dantzazpi et Karrikaldi qu'il ne ratait jamais, au début des années 90, André Béhotéguy avait fait venir pour la première fois un bertsulari au balcon de la mairie lors de l’ouverture, non sans quelques remous d'habituels pisse-vinaigre...
C'est également au début de ces années 90, sous sa présidence, que le blanc et rouge s'était imposé. Chemise et pantalon blancs, foulard et ceinture rouges lui firent dire : « Quand on a une tenue vestimentaire impeccable, on a aussi la tenue morale. Elle efface de plus les couches sociales et les inégalités ». Pour que tout le monde se retrouve dans la fête.
Même pendant son service militaire et, plus tard, lorsqu'il fut rappelé en Algérie, André Béhotéguy se débrouilla toujours pour revenir au moment des fêtes.
Précisément, à propos de « l'épisode algérien », comment ne pas rappeler ce mail – car ce vif octogénaire, avec qui je partageais de solides convictions royalistes, maniait parfaitement Internet – qu'il m'adressa un jour en réponse à une de mes chroniques dans la presse écrite, je l'admet, parfois « dérangeantes » pour les esprits fades ou somnolents :
De : andre behoteguy <andreguy@live.fr>
Date : 28 mars 2012 11:06:45 HAEC
« Cher ami, abonné depuis sa création (à l’hebdomadaire régional, ndlr.), j'apprécie vivement votre chronique « C'est le bloc-notes » qui rétablit la vérité sur pas mal de sujets, en particulier concernant la religion, les films et les pièces de théâtre blasphématoires. Mais je voudrais surtout vous dire aujourd'hui que votre papier sur "Evian ou la tragédie algérienne" me semble bienvenu en opposition avec beaucoup de journalistes qui semblent ignorer complètement les événements tragiques de cette époque. Rappelé en Algérie comme officier de réserve en 1959-1960 pour garder ce pays à la France, j'ai eu la possibilité de comprendre et d'apprécier de nombreux pieds-noirs et aussi et surtout des musulmans plus français que beaucoup de nos compatriotes. Fêter le 19 mars 62 est une folie car, comme vous l'avez si justement écrit, ce fut le début de massacres contre tous les Français de souche algérienne ou européenne. Bravo pour votre courage d'être allé à contre-courant » !
Cette année-là, et les suivantes, lorsque je commentais à la radio la messe des Fêtes, j'eus le cœur serré et l'estomac noué de ne plus le voir aux premiers rangs de l'église Saint-André où on l'accompagna une dernière fois le 17 juillet 2014.
De père charnégou – plutôt gascon – et de mère basque, André Béhotéguy était l'archétype-même du Bayonnais traditionnel, alliant la jovialité épicurienne et la verve gascoune à la retenue et à la fidélité du Basque sur les sujets graves et sensibles. Attaché, comme sa sœur, à l'église Saint-André et à son quartier, il y anima très tôt la troupe théâtrale des « Croisés », connaissant en 1958 l'immense succès de « Vues...et Revue », magnifique panorama de l'actualité bayonnaise en une série de sketches qu'il avait mis en scène. Il participera en 1966 à la représentation de « Georges et Margaret ». André Béhotéguy dirigea également la chorale paroissiale de l’église Saint-André dont sera issu le chœur « Errobi », ainsi que le premier otxote des Pottoroak - « des gars de Bayonne avec en commun le goût du rugby, de l’après-match et de chanter » - auquel il forgera une renommée en décrochant des contrats et en le faisant passer à la télévision.