Roger Marie Elie Etchegaray s’est retiré du monde ce mercredi 4 septembre 2019 à « Arditeya » à Cambo. Parmi ses prénoms, celui d’Elie, « l’Eternel est son Dieu », hébreu et chrétien, dont il aimait porter le patronage.
Né le 25 septembre 1922 à Espelette, après ses études à Ustaritz, Bayonne, Rome, il débuta son service diocésain dans l’administration épiscopale de Bayonne-Lescar-Oloron. Membre de l’Académie des Sciences Morales et Politiques, titulaire de la Grande Croix de la Légion d’Honneur, et de nombreux titres qu’il ne dévoilait jamais, l’homme était grand et noble dans sa personne, discret et humble dans son humanité.
Auteur d’une vingtaine de livres, brochures et de titres portant sa signature, Roger Elie Etchegaray est connu en outre pour l’ouvrage « J’avance comme un âne » réédité et diffusé dans le monde entier, et « J’ai senti battre le coeur du monde », qui condensent les souvenirs et les missions du cardinal-légat du pape Jean Paul II envoyé de par le monde.
Pendant huit années consécutives, lors de ses vacances estivales d’août, le cardinal avait présidé les Conférences d’Espelette, puis de Cambo, placées sous son patronage et qui virent se succéder des personnalités de la vie publique, sociale, intellectuelle et spirituelle du pays autour de thèmes divers choisis selon le profil de la vie du cardinal et de ses engagements au service de l’Eglise universelle.
Les premières rencontres s’étaient tenues à la mairie d’Espelette autour d’André Darraidou et de Gracie Florence, anciens maires de la cité. Le cardinal exposait ses ouvrages en présence des éditeurs et se livrait aux confidences discrètes car la discrétion était sa singularité première. La grande salle municipale se révélant trop petite pour contenir les visiteurs qui suivaient sur le parvis le témoignage donné par le cardinal, on dut se résoudre à choisir l’église plutôt que le patronage municipal, et le public vint plusieurs années durant pour rencontrer le natif du pays et le conférencier. Les thèmes s’enrichirent de la présence de dominicains comme Jean-Jacques Perennes, actuel directeur de l’Ecole Biblique de Jérusalem, du Père Colomb, supérieur général des MEP de Paris, d’académicien français comme Florence Delay, de conseillers politiques de la Commission Européenne comme Eneko Landaburu, d’économistes comme François Villeroy de Gallot, du père jésuite Pierre de Charentenay, ancien directeur des « Etudes », du directeur de la revue « Esprit », Jean-Louis Schlegel, d’Alain Lamassoure ancien ministre et député européen, de Dominique Quinio, rédacteur en chef de « La Croix », de Michel Camdessus, ancien directeur du FMI, de Jean-Caude Petit ,directeur de « La Vie », de Jean-Baptiste de Foucauld, Commissaire au Plan, et bien d’autres présents et anonymes de ces rencontres...
Le choix des sujets de débats fut ouvert et convenu avec le cardinal : « Eglises du monde en dialogue », « Le bien Commun et la pensée sociale de l’Eglise », « Chrétiens au service du bien commun européen », « Regards vers l’avenir du monde, de l’Europe et de l’Eglise », « L’histoire en perspectives d’avenir »… Les amis du cardinal venaient à sa rencontre et lui témoignaient la gratitude des amitiés partagées tout le long d’une vie. Ses amis artistes et cinéastes lui adressaient des messages d’amitié. Il les recevait au Petit Vatican d’Espelette à l’abri des regards dans sa maison familiale « Choko maitea ».
Il aimait la diversité humaine enrichie de ses relations internationales et disait avoir visité la plupart des pays du monde, excepté la Corée du Nord et l’Albanie, à l’époque fermées à toute relation avec le Vatican. Mais ces pays lui étaient chers car il rêvait un jour d’y retrouver des chrétiens isolés ou oubliés dans le monde. Son souhait fut de revenir à Pékin en Chine mais des raisons personnelles le dissuadèrent de le faire.
Roger Etchegaray avait une âme jésuite héritée de son affection pour le navarrais François de Xavier, et Ignace de Loyola qu’il célébra à Loyola au cours d’un rassemblement jésuite international en présence de centaines de supérieurs venus du monde entier.
On le disait original et il le fut pour permettre à nombre de ses amis de le devenir davantage en sa compagnie. Son amitié avec le slave polonais devenu le pape Jean-Paul II fut d’autant plus forte que le slave et le basque réunis partageaient des goûts communs : la montagne enneigée des Pyrénées et des Alpes pour le ski, et l’eau de la piscine du Vatican pour le pape...
Homme libre, esprit universel, le Basque du Monde laissera le souvenir inoubliable d’une personnalité pyrénéenne forte dont le devise répétée par lui même était : « Ne regardez jamais derrière vous, mais toujours devant »...
Agur Jauna, sineskoa, oraiko eta ondoko denboretako denentzat !