Organiste mondialement connu, Olivier Latry, titulaire des grandes orgues de Notre-Dame de Paris et professeur au conservatoire de Paris, avec son épouse Shin-Young Lee, organiste d'origine coréenne, proposent à leurs collègues de raconter un épisode de leur vocation artistique, soit comment ils ont attrapé le « virus » de la musique, soit le musicien le plus influent de leur vie, avant d’en nommer ensuite eux-mêmes deux autres musiciens « pour relayer le bâton : en cette période difficile pour tout le monde, étant « prisonnier » à la maison, nous réalisons comment la communication par la musique est précieuse. Chaque musicien, chaque amoureux de musique se souvient de la "toute première fois" quand on tombe amoureux de la musique. Nous aimerions appeler ce relais #MUSICVIRUS _ Challenge. En lien avec cette expérience, pour chaque personne introduite dans la boucle du virus de la musique, Olivier Latry et Shin-Young ont décidé de faire personnellement un don à l'Institut Pasteur, consacré en particulier à la recherche sur le Coronavirus. Dieu te garde en sécurité ! Êtes-vous prêt à raconter votre histoire » ?
Pour Thomas Ospital, tout a débuté à Ayherre
C’est ainsi que notre jeune organiste basque Thomas Ospital a été désigné par Yoann Tardivel Erchoff (qui enseigne actuellement au Conservatoire Royal de Bruxelles, ndlr.) pour entrer dans la boucle #MUSICVIRUS_challenge qui consiste à évoquer les premiers émois musicaux : « J'ai découvert l'orgue dans mon village où j'étais enfant de choeur. Celui-ci ne servait pas, il y avait bien longtemps que personne ne le jouait. Il était muet et pourtant il me fascinait. Il me semblait énorme et pourtant ce n'était qu'un ancien orgue de salon.
Un jour alors que j'avais dix ans, j'accompagnais mon père qui chantait dans la chorale paroissiale de mon village d'Ayherre, j'étais assis à côté de lui avec les basses (autant vous dire, que je n'étais pas d'une grande utilité...) mais je restais les yeux rivés sur cet instrument. Le chef de choeur, voyant mon intérêt pour l'orgue, m'invita à m'asseoir sur le banc pour donner le ton aux chanteurs. Je lui répondis que je ne savais ni jouer, ni lire la musique. Il me prit la main et la posa sur le clavier. Ce fût pour moi une évidence : « plus tard, je serai organiste ».
Après avoir insisté auprès de mes parents, je commence à prendre des cours de piano, mais je n'ai qu'un but : jouer de l'orgue. A la même période, ma grand-mère souhaite se remettre à l'orgue, elle avait suivi dans sa jeunesse des cours de piano, payés par le curé de la paroisse, afin de tenir l'harmonium du village. J'assiste alors à toutes ses répétitions, calme et en silence (chose assez rare pour moi, surtout à l'époque...). Et puis un jour, ne pouvant être présente pour la messe de Pentecôte en 2001 (j'avais alors onze ans), elle va voir le curé pour s'excuser de son absence. Et moi, avec un certain culot, je déclare à ce dernier : « Ce n'est pas grave, je la jouerai cette messe ».
Il est à la fois surpris et amusé par ma réaction. Il me répond : « Si tu veux, tu pourras accompagner un chant ou deux »... Et je le coupe : « Ah non non, ce sera tout ou rien ».
Alors tout amusé, il me confie la grosse clé forgée de l'église en me disant : « Parfait ! Alors rendez-vous dimanche » !
Je n'ai aucune honte à avouer que mes premières émotions musicales, c'était quand j'accompagnais les messes dans mon village basque. Les chants étaient magnifiques, les fidèles chantaient à en faire trembler les murs de l'église.
Il m'a fallu beaucoup de temps avant d'éprouver le même plaisir en donnant des concerts ».
Depuis lors, lauréat de plusieurs concours internationaux, Thomas Ospital sera nommé sur concours titulaire du grand-orgue de l’église Saint-Eustache à Paris (mars 2015) avant de devenir le premier organiste en résidence de la Maison de la Radio (2016 à 2019).
Et de désigner pour le « challenge » au profit de l’Institut Pasteur le jeune organiste Karol Mossakowski qui lui a succédé à l’orgue de la Maison de la Radio, ainsi que Vincent Genvrin, professeur d'orgue au conservatoire de Dieppe.
Légende : DR – Premiers émois musicaux de Thomas Ospital