Après Thomas Ospital et Yves Bouillier qui ont évoqué leurs « premiers émois musicaux », voici l’altiste Olivier Seube, professeur au Conservatoire régional « Maurice Ravel » de Bayonne - Pays Basque, chef d’orchestre, Alto et concertiste-solo qui nous conte l’histoire de sa passion pour la musique :
Ma mère nous avait inscrits, mon frère et moi, au Conservatoire National de Région de Reims lors que j’ai eu huit ans. Après une année de solfège obligatoire avant le choix d’un instrument, nous avons été convoqués (1966) par le Directeur (Jacques Murgier) pour le rencontrer dans son bureau. Là, il nous fit passer quelques tests rapides pour évaluer nos capacités à écouter, reproduire par le chant des mélodies simples et des intervalles qu’il jouait au piano, puis à reproduire des rythmes en frappant dans nos mains. A la fin de cette évaluation rapide, il s’est adressé à ma mère en lui demandant si nous avions une préférence pour la pratique d’un instrument. Ce à quoi ma mère a répondu par la négative… Le directeur a donc annoncé : pour Olivier, ce sera le violon et pour mon frère, la clarinette. Ma mère était ravie car mon grand-père était violoniste amateur.
En sortant du bureau et, juste arrivés sur le seuil de la porte, le directeur me demanda mon âge. Je lui dis que j’avais neuf ans. Il rétorqua que j’étais grand pour mon âge et annonça que je jouerai de l’alto. C’est comme cela que je me suis retrouvé dans une classe où j’ai appris le violon pendant trois ans, sachant que je passerai à l’alto plus tard avec le même professeur : Madame Propage, qui avait obtenu un 1er Prix du Conservatoire de Paris en violon et un second en alto, dans la classe du grand maître de l’alto français, Maurice Vieux.
Je ne travaillais pas beaucoup mon instrument ; je faisais le minimum pour apporter satisfaction à mon professeur. Les examens, concours du Royaume de la Musique (auditions organisés par France Musique), étaient très pénibles, car j’avais énormément de trac, peu de confiance en moi et une grande timidité. Mais un jour, en rentrant des obsèques d’un ami de la famille qui venait de disparaitre, laissant une veuve et huit enfants, je suis allé directement dans ma chambre et j’ai pris mon alto. J’avais tellement de peine et je ressentais une telle émotion que je me suis servi de la musique pour exprimer mes sentiments. Pour la première fois de ma vie, je produisais de la musique. Même si ce n’était peut-être pas techniquement parfait, j’avais compris que je pourrais devenir professionnel en répétant de telles expériences à l’avenir. J’ai donc décidé de travailler plus sérieusement et de cultiver mon talent pour la musique afin d’en faire profiter autrui.
J’ai eu la chance d’avoir des professeurs et directeurs remarquables qui m’ont guidé et formé avec une grande rigueur et un souci de la recherche de l’excellence.
Ma famille a cru en mon talent et m’a soutenue.
A Noël et lors de nos anniversaires, nous recevions toujours des livres et des disques. L’un de mes disques préférés était un enregistrement de la "Symphonie du Nouveau monde" de Dvorak (que mon frère avait reçu). Je l’écoutais souvent, cela me passionnait. Je m’imaginais dans l’Orchestre de Radio-Télévision-Luxembourg (qui avait réalisé cet enregistrement) sous la baguette de Louis de Froment, en train de jouer tour à tour de tous les instruments de l’orchestre.
Des années plus tard, je fus appelé par ce même orchestre à remplacer un altiste pour une tournée. J’ignorais le programme. A ma grande surprise, je découvris sur mon pupitre la partie d’alto de la Symphonie du Nouveau Monde ! L’orchestre s’accorde et devinez qui vient se placer sur l’estrade de chef : Louis de Froment (qui venait de prendre sa retraite, mais qui revenait spécialement pour cette tournée) !!
Mes collègues ne comprennent pas pourquoi je pleure quand je joue Dvorak…
Maintenant, cher lecteur, vous le savez.
Diplômé du Conservatoire de Paris dans la classe d'alto de Serge Collot et de Bruno Pasquier ainsi que Geneviève Joy, pour la musique de chambre, sa riche carrière musicale a propulsé Olivier Seube à l'Orchestre Symphonique de la Garde Républicaine de Paris, l'Association des Concerts Colonne, l'orchestre baroque «L'Arpa Festante» de Munich, les « Musiciens du Louvre » ; il a joué comme alto – solo à l’Orchestre Symphonique et Lyrique de Nancy, ainsi qu'au Collegium Musicum et à l'orchestre «La Follia», soliste au Studio 111 de Strasbourg où il a enseigné l'alto et la musique de chambre au Conservatoire avant de rejoindre celui de Bayonne. Il est actuellement soliste de l'orchestre Symphonique du Pays Basque et altiste du quatuor Arnaga qui prépare un programme très dense pour la sortie du "confinement" :
- deux concerts avec "les Sept paroles du Christ en croix" de J. Haydn avec Mgr André Dupleix (Pau et Lahonce- Abbaye des Prémontrés), seront reprogrammés ainsi que le spectacle de Théâtre-Musical: "Le Chevalier Saint George" (avec le Théâtre du Versant de Biarritz)
- les prochains concerts toujours programmés sont le 6 juin sur l'île de Berens : il s'agit du spectacle de Théâtre-Musical "Au bord de l'Adour", rare comédie de Jules Verne en création mondiale (*), et le 4 juillet, un concert Mozart avec Bertrand Latour (hautbois) à Arnaga. Un concert Beethoven (dans le cadre du 250ème anniversaire de sa naissance est prévu également en juin avec l'Opus 130 (13ème Quatuor).
(*) Totalement inconnue jusqu'ici, "Au bord de l'Adour" de Jules Verne est "une histoire drôle et positive", celle d'une châtelaine affrontée à des problèmes de couple qui va chercher conseil auprès d'un oncle à Dax. L'Adour en crue la fait se réfugier dans la maison du passeur - philosophe à ses heures, familier du grec et du latin - où la rejoindra, par un curieux concours de circonstances... son mari, pour les mêmes raisons ! Le couple se réconcilie et aura beaucoup d'enfants...