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Billet d'humeur
Pau : un directeur d'école libre démis pour n'avoir pas promu une "fabrique de crétins"
Pau : un directeur d'école libre démis pour n'avoir pas promu une "fabrique de crétins"

| Alexandre de La Cerda 1009 mots

Pau : un directeur d'école libre démis pour n'avoir pas promu une "fabrique de crétins"

Fils d'universitaire et lui-même professeur de lettres en classe préparatoire aux grandes écoles, enseignant à l'École normale supérieure de Saint-Cloud ainsi qu'à l'université Paris III, Jean-Paul Brighelli sait de quoi il parle : il y a déjà une vingtaine d'années, il avait publié (chez l'éditeur Gawsewitch) "La fabrique du crétin, la mort programmée de l'école". Car, pour Jean-Paul Brighelli, "nos enfants ne savent plus lire, ni compter, ni penser. Le constat est terrible, et ses causes moins obscures qu'on ne veut bien le dire. Un enchaînement de bonnes intentions mal maîtrisées et de calculs intéressés a délité en une trentaine d'années ce qui fut l'un des meilleurs systèmes éducatifs au monde. Faut-il incriminer les politiques, les profs, les parents, les syndicats, les programmes ? En tout cas, la Nouvelle Pédagogie a fait ses "preuves" : l'école a cessé d'être le moteur d'un ascenseur social défaillant. Ceux qui sont nés dans la rue, désormais, y restent. Dès lors, que faire ?"
Et à cette Nouvelle Pédagogie dénoncée par Jean-Paul Brighelli, on ajouterait volontiers, de nos jours, les délires "woke", transgenres & Cie...

Que faire ? En tous cas, ne pas suivre l'exemple de Christian Espeso, directeur du lycée-collège Immaculée Conception de Pau, établissement de 2 600 élèves et 250 professeurs qu'il a hissé, en une décennie à peine, dans les meilleurs classements du pays : le premier au classement régional de Nouvelle-Aquitaine et le quatrième au niveau national en France.
Car, Christian Espeso vient d'être suspendu de direction d'établissement pendant trois ans par l’Inspection académique. Comme il a 61 ans, il est en fait viré ! 
Et pourquoi ?
En fait, à la suite d'un article à charge du journal "Libération" qui avait provoqué l'envoi d'une douzaine d’inspecteurs pour mener une enquête approfondie sur l’établissement et son directeur, un rapport sur cet établissement catholique lui reprochait des manquements au respect de la laïcité : célébration de messes (mais en dehors des heures de cours), des cours d’instruction religieuse dans les classes (pratique pourtant courante dans la plupart des établissements catholiques), et surtout, une conférence de Mgr Marc Aillet, évêque du diocèse, devant les classes de terminale, ainsi que celle de l'universitaire historien Reynald Secher sur le « génocide vendéen » sous la Révolution, présentée par le rectorat comme « une approche révisionniste de l’Histoire ».
Encore heureux qu'il ne m'ait pas invité à présenter mon livre "La déportation des Basques sous la Terreur" édité à Pau chez Cairn !
Des parents d'élèves de ce lycée ont beau jeu de dénoncer le "caractère ridicule des raisons aggravantes justifiant cette sanction de la Rectrice qui avait retenu qu'à l'Immac on n'avait pas parlé comme il convient des guerres de Vendée en 1794 et de leurs 200.000 morts. Et le directeur l'a probablement échappé belle, faute de temps les inspecteurs ne sont pas remonté jusqu'à la question du Vase de Soissons et à la tradition historique (et catholique) de Clovis et des Francs au VIème siècle, où on peut suspecter ce qui est rapporté par Grégoire de Tours". 

Une réaction salutaire des élèves, des parents et des élus !

Rassemblement lycéen de soutien à Christian Espeso devant l'établissement.jpg
Rassemblement lycéen de soutien à Christian Espeso devant l'établissement ©
Rassemblement lycéen de soutien à Christian Espeso devant l'établissement.jpg

Plusieurs centaine d'élèves et de parents se sont réunis, brandissant affiches et banderoles "J'aime mon directeur", "les élèves avec le directeur", "rendez nous notre directeur" en soutien à Christian Espeso jeudi matin devant le lycée palois.

Et parmi les élus, signalons la réaction du sénateur (Pyr.-Atl.) Max Brisson :
"Je tiens à exprimer tout mon soutien à Christian Espeso face à la décision outrancière de la direction académique des services de l'Éducation nationale.
Viscéralement attaché à la méritocratie républicaine, à la recherche de l'excellence et à la transmission des savoirs fondamentaux au plus grand nombre, Christian Espeso est un homme de grande valeur. En quelques années seulement, il a fait de l'ensemble scolaire Immaculée Conception l'un des meilleurs de France.
Le traitement incompréhensible dont il fait l'objet laisse penser que Christian Espeso est sanctionné pour avoir pris ses distances avec un système éducatif qui tourne le dos depuis trop longtemps au mérite, à l’effort et au respect de l’autorité.  

La décision démesurée dont nous prenons connaissance laisse penser que Christian Espeso est sanctionné pour avoir osé rappeler qu’un établissement privé sous contrat avait un caractère propre reconnu par la loi Debré.
Il s'agit d'une attaque en règle contre l'ensemble de l'enseignement catholique. L’autorité académique a cédé aux injonctions des syndicats les plus idéologues qui sont animés d'une vision militante et déformée de ce qu'est la laïcité dans notre pays.
Ce parti pris est une grave erreur qui contribuera à raviver une guerre scolaire que nous pensions terminée.
Ne laissons pas abîmer la liberté et la diversité des formes d'enseignement permettant aux parents d’avoir une vraie liberté de choix pour leurs enfants". 
Max Brisson
Sénateur des Pyrénées-Atlantiques, ancien inspecteur général de l'Éducation nationale et vice-président de la commission éducation au Sénat et vice-président de la commission éducation au Sénat

Or, à propos des classements des établissements scolaires, nos confrères du quotidien régional "Sud Ouest" de commenter : comme chaque année, le palmarès des lycées, publié par le ministère de l’Éducation nationale, est très attendu par les parents d’élèves. Et comme chaque année, point de grand étonnement : sur 19 établissements de la région affichant 100 % de réussite au bac, 18 relèvent du secteur privé.

Après les quelques critiques "d'usage", nos confrères du quotidien régional sont bien obligés de convenir d'un accueil favorable certain de ces établissements privés/cathos, avec l'exemple de ce père de famille bordelais : « Nous dépendions de Magendie, lycée public de secteur», commence Thierry, « fervent défenseur de l’école publique républicaine », insiste-t-il. Sauf qu’en fin de seconde, son fils aîné, élève moyen sans être médiocre (et pas perturbateur) n’est pas accepté en première dans le même lycée. Seule option proposée par l’établissement : une orientation en section professionnelle. Ironie de la situation : c’est vers le privé (le lycée du Mirail à Bordeaux) que l’élève poursuit donc son parcours et obtient sans anicroche un baccalauréat général. « Il y a reçu un accompagnement personnalisé et bienveillant », appuie son père...

Répondre à () :

MARTIN DESMARETZ de MAILLEBOIS | 13/09/2024 12:17

Bien d'accord avec vos observations, y compris aigre-douces avec l'allusion à votre excellent ouvrage : " les déportations des Basques sous la Terreur" ! Voilà le drame d'être "sous contrat" avec ce monstre totalitaire et sectaire qu'est le Ministère de la pseudo "éducation" et encore moins "nationale", sauf dans le sens maçonnique du terme, évidemment. C'est un scandale que ce licenciement parfaitement ABUSIF !

Jean-Baptiste HIRIART-URRUTY | 13/09/2024 14:46

"Un contrat, ça se respecte !" J'ai été vraiment étonné par la tonalité de ce "billet d'humeur"..., même si nous sommes un vendredi 13..., d'autant que j'apprécie habituellement, et depuis longtemps, les écrits d'Alexandre de la Cerda. Je ne peux pas laisser passer un certain nombre de choses. - La rectrice de Bordeaux, Mme A. Bisagni-Faure, n'est pas une va-t-en-guerre, me semble-t-il, nous la connaissons bien à Toulouse, elle y était avant d'aller à Bordeaux... Les plaintes qui sont remontées venaient, si j'ai bien saisi, d'usagers de l'Immac-Beau-Frêne (que ce soit des parents d'élèves ou même des professeurs). - Je me suis tapé sur les cuisses en voyant les manifestants (enfants notamment) brandir "J'aime mon directeur", tellement il est facile d'instrumentaliser et de manipuler des enfants et des jeunes (et même leurs parents)..., nous en savons quelque chose à l'université. - Mgr Aillet commence à avoir un certain nombre de "cartons jaunes" (les milieux sportifs de Pau ou de Bayonne comprennent ce que je veux dire avec cette image)... Cela finira par un "carton rouge", que demandent d'ailleurs un certain nombre d'habitants des Pyrénées-Atlantiques. - Appeler les 2 "Bri" (Brighelli et Brisson) à la rescousse n'est pas forcément positif ni du meilleur effet quand on connait leurs écrits et leurs girouettes... Mais venons-en aux faits : l'établissement Immac-Beau-Frêne a signé un dit "contrat d'association" avec l'Etat, comme la quasi-totalité des écoles privées confessionnelles du pays.... Les faits montrent que des termes de ce contrat n'ont pas été respectés... Il ne faudrait pas en arriver à la situation de l'école privée musulmane Averroès de Lille, dont le contrat (du même type) a été rompu par l'Etat... Toute la masse salariale concernant les enseignants (qui sont payés par l'Etat) passerait alors à la charge des usagers, donc des parents... Je crois plutôt en l'intelligence de l'OGEC en charge de l'Immac pour faire amende honorable et revenir à ce que d'aucuns ont appelé "une situation normale". - Arrêtez de vous draper dans "nous sommes les meilleurs", "les autres (du public) sont tous des mauvais...". Quand je donne, bénévolement, des cours de préparation à des concours internes (agrégation), au Pays basque comme au Béarn, je ne regarde pas si les candidats-professeurs viennent du public ou du privé ; quand nous essayons de faire décerner des palmes académiques (bureau dont je fais partie) à des personnels méritants, nous ne distinguons pas celles et ceux qui viennent du privé ou du public ; quand je donne des conseils à des jeunes ou à leurs parents pour la scolarité de leurs enfants, je n'exclus pas tel ou tel établissement parce qu'il est public ou privé... Oui, "un contrat, ça se respecte" J.-B. Hiriart-Urruty Professeur émérite de l'université de Toulouse Membre de l'Académie des Sciences et Lettres de Toulouse et... ex-professeur à mi-temps à l'Immac-Beau-Frêne. "Un contrat, ça se respecte" (bis) J'ai voulu dissocier ce qui est au-dessus d'une autre affaire qui secoue Toulouse ces jours-ci, et pourtant c'est du même tonneau... Un jeune prof (de maths) a commencé son premier cours d'amphi (devant 200 personnes) par une longue diatribe (de 20 mn) très orientée sur la guerre Israël-Gaza... Il a été enregistré, l'affaire a éclaté à l'extérieur, l'enseignant aussitôt mis à pied..., sans parler des diverse plaintes déposées. Cet enseignant avait été recruté pour donner des enseignements de maths, cela aurait pu être d'anglais, de la physique... Il avait signé un contrat pour ça, dont il n'a pas respecté les tenants... Pour la énième fois, "un contrat, ça se respecte".

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