La Guerre du Pacifique (7 décembre 1941 – 2 septembre 1945)
Au matin du dimanche 7 décembre 1941, l’Empire du Japon attaque par surprise la principale base navale américaine de Pearl Harbour située sur l’archipel d’Hawaii causant ainsi, d’importants dégâts matériels et la mort de 2.400 américains. Le lendemain devant le congrès, le Président Franklin D. Roosevelt (1882/1945) déclare la guerre au Japon : c’est le début de la « Guerre du Pacifique ». Une part importante de la flotte américaine (les porte-avions) n’a pas été détruite par l’attaque japonaise. La marine japonaise tente de l’anéantir en planifiant, début juin 1942, une opération aéronavale d’envergure sur l’atoll de Midway. Les cryptanalystes américains ont réussi à déchiffrer les codes secrets japonais, ainsi l’U.S Navy a préparé un plan pour contrecarrer l’offensive. La flotte japonaise est anéantie. La bataille de Midway (4 au 7 juin 1942) marque le tournant de la « Guerre du Pacifique » : le Japon ne peut reprendre l’initiave stratégique ; le pays fortement dépendant de ses approvisionnements (hydrocarbures, caoutchouc, minerais divers, etc.) est incapable de remplacer le matériel perdu (navires de guerre, avions, chars, etc.).
Entre temps les américains ont mis toute leur capacité de production au service de la guerre. L’industrie américaine tourne à plein régime : c’est l’économie de guerre. Navires de tout tonnage, véhicules, avions, chars, armes de tous sortes, sont produit à la chaîne puis sont acheminés, par de gigantesques convois maritimes, sur les deux théâtres d’opération : le Pacifique et l’Europe.
Cependant, les soldats japonais ont été dispersés sur toute l’Asie du sud-est et en particulier sur de nombreuses îles aux reliefs escarpés dotées de jungles impénétrables. A partir de 1943, la conquête de chacune d’elles, occupées par le Japon, demande des sacrifices énormes en soldats américains face à la résistance fanatique des soldats japonais qui n’hésitent pas à se sacrifier jusqu'au dernier homme.
Par leur stratégie de « saute-mouton » (les atolls fortement retranchés sont délaissés mais soumis à un blocus), les américains s’approchent de l’archipel japonais. En 1944, le Japon a virtuellement perdu la guerre mais le « Quartier Général Impérial » ne veut rien céder : l’archipel japonais doit rester inviolé ! Une stratégie de guerre asymétrique est mise en œuvre : on empêchera le débarquement des américains par des attaques de kamikazes sur leur flotte croisant à proximite du Japon et des guérillas sur leurs arrières (les îles lointaines abandonnées) …
Onoda, 10 000 nuits dans la jungle
Fin 1944, Le sous-lieutenant Hiro Onoda (Yuya Endo) 22 ans, est effondré : il a été rejeté de l’école de pilotage car il souffre de vertige. Il ne sera par kamikaze. Le mystérieux major Yoshimi Taniguchi (Issei Ogata) le contacte et lui propose d’intégrer l’école de Nakano où sont instruits des officiers commandos. Après sa formation, Hiro Onoda part en mission secrète sur l’ile de Lubang, aux Philippines, territoire occupé par le Japon. Sa mission : retarder avec son commando le débarquement des Américains sur l’île.
L’armée américaine débarque en février 1945 sur l’île de Lubang. Le lieutenant Onoda se replie dans les massifs montagneux avec trois hommes : le caporal Shimada (Shinsuke Kato) et deux soldats de première classe Akatsu (Kai Inowaki) et Kozuka (Yuya Matsuura). L’U.S Army anéantit la garnison nippone et prend rapidement possession de l’île : les quatre militaires survivent tant bien que mal dans une jungle hostile, sous des torrents de pluie. Coupés de tout contact, isolés, vivant en autarcie et de quelques larcins aux dépends des insulaires philippins. Ils survivent en se fondant dans l’inextricable jungle.
Le 2 septembre 1945, l’Empire du Japon capitule sans conditions… Sur leur île, loin de la mère patrie, les guérilleros n’en savent rien. Ils poursuivent leur résistance (passive) sans croire aux quelques nouvelles, fatalement mensongères, qui leur parviennent.
Le lieutenant Hiro Onoda fait respecter l’ordre qu’il a reçu du major Yoshimi Taniguchi : « rester sur l’île et exécuter sa mission toujours et à jamais ». Seul cet officier est habilité à annuler son ordre.
Les années défilent sans que les rituels de survie des guérilleros varient : campements de fortune, recherche de nourriture, difficile promiscuité …
Onoda, 10 000 nuits dans la jungle est le deuxième long métrage d’Arthur Harari (40 ans) ce qui est pour le moins surprenant au regard de la maîtrise scénaristique et technique (image, son, acteur) de son film. Après Diamant Noir (2015), plongée dans l’univers des diamantaires anversois, Onoda, coproduction complexe (France, Italie, Japon, Belgique, Allemagne, Cambodge !) tourné au Cambodge, avec des acteurs japonais parlant leur idiome, est une œuvre pour le moins dissonante dans la production française. Le résultat est un grand film ambitieux par sa thématique (la patrouille perdue, thème récurrent du cinéma hollywoodien) et par sa durée (2 heures 47 minutes !).
Arthur Harari également coscénariste (avec Vincent Poymiro) cadre ses personnages en gros plan, voire en très gros plan, afin de montrer leurs émotions, leurs déterminations, ou leurs faiblesses dans un environnement résolument hostile : la jungle foisonnante, l’ennemi invisible (US Army), les paysans hostiles, toutes sortes de personnes tentant de rompre leur pacte guerrier : ne jamais se rendre, être un « soldat japonais résistant (zanryû nipponhei ». Le réalisateur et son chef opérateur Tom Harari (son frère !) se contentent de quelques plans larges sur les monts et forêts où progressent, par sauts, la petite escouade soudée par un patriotisme belliqueux mais lézardée par un quotidien angoissant. Le réalisateur par un découpage millimétré des actions/inactions de ses protagonistes nous fait ressentir le poids de la solitude volontaire et son interaction sur leurs comportements : ils ne forment pas un bloc compact, indifférencié, bien au contraire. Chaque soldat japonais cèle une personnalité complexe que le temps long va révéler.
Onoda, 10 000 nuits dans la jungle (adaptation d’une histoire vraie) a été le film d’ouverture au dernier Festival de Cannes (2021) dans la section « Un Certain Regard ». C’est un très grand film hors normes (production, thématique, durée) qui, sans doute, annonce l’éclosion d’un jeune metteur en scène français de grand talent : Arthur Harari.