Comme chaque année à l’orée des fêtes de Noël, c’est une bonne « escouade » des Amis d'Arnaga qui avait « embarqué » mercredi dernier pour la traditionnelle journée « navideña » à Donosti : ils ont d’abord visité le Museo San Telmo entièrement refait et restructuré, avec d'intéressantes découvertes archéologiques et de vestiges d'anciennes peintures dans l'église, la tour et le cloître restaurés… Excellent déjeuner gastronomique arrosé d’un bon cru de « Marques de Riscal » dans un salon de l'hôtel Maria Cristina, prolongé d'une visite aux très belles crèches de la place de Guipuzcoa, dans le jardin face au palais de la Diputacion. En guise de conclusion d’une année particulièrement riche pour l’association qui a proposé à ses membres de nombreuses activités - conférences, concerts et sorties culturelles – réalisées grâce aux membres du bureau et aux bénévoles qui ont permis de mettre au point cet important programme.
Le Musée San Telmo, inauguré en 1902, est le plus ancien d'Euskadi. Le bâtiment historique est un couvent dominicain du XVIème siècle. La collection d’origine effectue un parcours chronologique du XVe jusqu’au XIXe siècle avec de grands noms comme le Greco, le Tintoret, Ribera, Rubens, Madrazo ou Miró, ainsi que Clouet et Hubert Robert, en découvrant l'évolution des styles artistiques au fil du temps. Un nouveau pavillon situé au pied du mont Urgull accueille, entre autres, des expositions temporaires. L'espace "L’éveil de la modernité" présente les grandes transformations survenues aux XIXème et XXème siècles dans la société basque avec entre autres les différents courants artistiques au Pays Basque depuis la fin du XIXe siècle jusqu’à la fin du XXe. Un autre espace évoque des époques et des événements qui ont été primordiaux dans la formation et le développement du Pays Basque, et qui ont laissé une empreinte dans son évolution, depuis la préhistoire jusqu'au XVIIIe siècle. Egalement deux expositions "contemporaines" (design & photos).
Par ailleurs, la tour du couvent héberge un espace nommé "Musée des musées du Gipuzkoa", qui offre des informations sur les centres composant le Réseau des Musées du Gipuzkoa.
Alexandre de La Cerda en a rappelé l’Histoire : Le musée a été créé en 1900 sur proposition de la Société Bascongada des amis du pays (fondée par Xavier María Munibe e Idiáquez, comte de Peñaflorida d’Azkoitia : fréquentant les société savantes et l’Académie des Jeux Floraux lors de ses études à Toulouse, il créa le séminaire scientifique de Bergara où travaillèrent des savants tels que les frères Elhuyar d’Hasparren, inventeurs du tungstène).
Pour en revenir au musée, après le succès rencontré lors des expositions de la fin du XIXème siècle à Saint-Sébastien, une pétition fut adressée à la commission municipale pour la création d'un musée municipal qui reçut rapidement des dons et des dépôts constituant ses premières collections. Ce Musée historique, artistique et archéologique inauguré le 5 octobre 1902 devenant trop exigu, le conseil municipal construisit un bâtiment où seront associés l'école des arts et des métiers, la bibliothèque municipale et le musée. Ce nouveau bâtiment, inauguré en 1911 s’avéra également trop petit et en 1932, un transfert fut à nouveau décidé, cette fois vers le couvent dominicain de San Telmo qui avait été précédemment acquis par le conseil municipal et conditionné pour cela.
Cet ancien couvent de frères dominicains avait été construit sur les contreforts du mont Urgull au milieu du XVIème siècle grâce au patronage du noble gipuzkoan Alonso de Idiáquez, qui était secrétaire d'État de l'empereur Charles Quint. Les travaux de ce bâtiment de transition entre le gothique et la Renaissance, commencés en 1544, se sont achevés en 1562. Les dominicains décidèrent de consacrer le couvent à San Telmo, patron des hommes de mer. En 1813, pendant les guerres napoléoniennes – ou guerre d'Indépendance -, la ville de Saint-Sébastien a été saccagée et dévastée, et le couvent a subi de gros dégâts, dont le plus important a été la perte du retable principal. En 1836, avec la Desamortización de Mendizábal (confiscation de Mendizábal), les religieux furent expulsés du couvent qui servit de caserne pour un régiment d'artillerie.
Le désamortissement consista à mettre aux enchères publiques des terres et des biens confisqués essentiellement à l'Église catholique, aux ordres religieux ou parfois à la noblesse qui permit au Trésor public espagnol d'obtenir ainsi des revenus très importants, grâce auxquels il prétendait amortir les titres de la dette publique. Mais ce vol organisé de la part du gouvernement - sur le modèle des Biens Nationaux de la révolution française - n'eut pas les effets escomptés : en effet, la répartition des terrains provenant de ces spoliations seront mis en vente par des commissions municipales qui s'arrangèrent pour que seuls des membres de la riche oligarchie puissent acquérir la plus grande partie d'entre eux, privant les petits propriétaires des bénéfices du désamortissement et empêchant la création d'une véritable bourgeoisie ou classe moyenne, qui aurait pu aider le pays à sortir de son marasme économique. Les terrains sujets à désamortissement désignés par le gouvernement furent uniquement des propriétés ecclésiastiques, et en dépit du fait qu'une grande partie du patrimoine de l'Église fut alors réquisitionné, celle-ci ne reçut rien en échange. Pour cette raison, l'Église prit la décision d'excommunier aussi bien les expropriateurs que les acheteurs des terres, ce qui dissuada en grande partie les gens d'en faire l'acquisition et obligea à baisser fortement leur prix, diminuant par là-même le bénéfice escompté par l'État. Mais le résultat le plus clair de ces expropriations/spoliations fut la ruine progressive de ces bâtiments qui ne seront plus entretenus ni par les ordres religieux ni par les fidèles, dont le meilleur exemple sera le couvent San Telmo de Saint-Sébastien…
Ainsi, à la fin du XIXème siècle, l'état de détérioration avancé de San Telmo sera tel qu’il incitera de nombreux habitants de St-Sébastien à demander au Conseil municipal de prendre des mesures à ce sujet. En conséquence, en 1913, la tour et le cloître avaient été déclarés monument national, des parties qui appartiennent encore à l'État aujourd'hui. En 1928, le conseil municipal décida d'acheter le reste de San Telmo et de l'inaugurer en tant que musée municipal en 1932.
Pour l'inauguration, le 3 septembre 1932, le peintre José María Sert sera recruté par le grand peintre basque Zuloaga – qui prit une part importante dans la constitution du musée - afin de recouvrir les murs de l'église avec 17 toiles réalisées à Paris, à base de glaçures sur fond métallique, qui racontent onze scènes de la vie et de l'histoire de Gipuzkoa dans un style héroïque et quelque peu,« grandiose » : les hommes qui illustrèrent le territoire et leurs exploits.