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Histoire
Musée Basque : bergers basques dans l'Ouest américain, livres & "arborismes"
Musée Basque : bergers basques dans l'Ouest américain, livres & "arborismes"

| Alexandre de La Cerda 1268 mots

Musée Basque : bergers basques dans l'Ouest américain, livres & "arborismes"

Le Musée Basque de Bayonne accueillera jeudi 13 avril à 18h une conférence de Pascal Goñi consacrée aux "Inscriptions des bergers basques sur les arbres de l'Ouest américain" organisée par la Société des Amis du musée (Entrée libre / Sur réservation au tél. 05 59 ).
L'occasion de revenir sur l'histoire de cette émigration basque aux Amériques et les innombrables graphismes et textes gravés sur les troncs arbres bordant, en particulier, les cours d'eau de la Sierra du Nevada, dont l'inventaire avait été entrepris naguère par José Mallea, chercheur au Centre d'études basques de l'université du Nevada, et qui nous transmettent de manière très émouvante « les rêves, les pensées et les sessions de ces bergers. Une date, un nom, un village d'origine, un dessin naïvement élaboré, accompagnés parfois de quelques mots d'une courte phrase, ornent des milliers d'arbres, lesquels parais­sent former une sorte d'immense musée de la mémoire vivante. 
Des traces éphémères, car le temps passant les transforme progres­sivement en boursouflures illisibles, se lisent, sous forme de confessions, les errances d'une imagination traversée par les sentiments de désillusion devant ce qui devait être une glorieuse épopée, de nostalgie du village natal désormais lointain, également de "frustrations" sexuelles. 
Combien de troncs d'arbres ne portent‑ils pas le prénom de Trini, prostituée sans doute fort bienveillante à l'égard des bergers basques ? 
Étranges forêts que celles‑là où chaque arbre reproduit une parcelle de la biographie (à la faveur de textes transcrits en basque, en français, en anglais ou en espagnol) de générations de bergers soucieux d'imprimer et de laisser pour la postérité les marques de leur passage. Message de survie, de refus de l'anonymat, chacune de ces gravures raconte à sa manière une histoire à la fois élémentaire, et semblable aux autres, nourrissant et éclairant ainsi l'histoire générale de la présence basque en Amérique ».

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Mon père était berger ©
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La saga des « Basques américains », une indicible soif de liberté

Nul doute que nombre d'habitants du Pays Basque dont une partie de l'histoire familiale s'était édifiée aux États‑Unis sont intéressés de prendre connaissance de ces témoignages, alors que plusieurs livres d'acteurs ou de descendants de cette "épopée" sont parus, parmi lesquels je rappellerais volontiers « Basque Hotel, Nevada », le roman de Robert Laxalt paru il y a une bonne vingtaine d'années chez « Autrement Littératures »

« A l’est, le soleil perçait à peine derrière les montagnes arides. En cette heure matinale, les trottoirs de Carson City n’étaient pas encore brûlants et les commerçants de Main Street en profitaient pour balayer les abords de leur magasin ou de leur petit hôtel… » 
Robert Laxalt plante le décor dès les premières lignes de son « Basque Hôtel », le décor qui fut celui de sa famille et des nombreux émigrants basques tentés par le « Sweet promised land » - titre d’un de ses romans -, une « terre promise » dont la douceur n’émoussa pas toujours la grande dureté de l’existence dans le Grand Ouest américain. 

Salué lors de sa disparition en 2001 non seulement comme le porte-parole de l’émigration basque, nombreuse au Nevada et alentour - « Bob gave the Basque people a voice » - mais aussi comme l’écrivain le plus représentatif de toute une génération d’émigrants américains.

Ce fut également l’auteur d’une peinture incomparablement vivante des montagnes, des rivières, des lacs, mais aussi des déserts arides. Et par-dessus tout, de cet espoir d’une vie économiquement plus prometteuse, et plus libre que dans sa contrée d’origine où, ne manquait-il pas de souligner, « to be made to feel that it was a crime to be born a Basque… » (on en arrivait à penser que c’était un crime que de naître Basque, à cause des restrictions imposées par les autorités françaises à l’un de leur principaux signes identitaires, la langue basque).

 Comme l’avait écrit l’universitaire Pierre Bidart dans sa postface très documentée, il s’agissait « d'une liberté certes chèrement acquise, un puissant mobile pour la subjectivité du migrant, même célibataire. Cette liberté se construit, parfois, dans et par le silence sur soi, et par la solitude ».

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Dominique Laxalt, le père de Robert, l'universitaire, et de Paul, le sénateur ©
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« Basque Hotel, Nevada » est le récit, pour ainsi dire autobiographique, à la fin des années vingt, d’un fils d’émigrés basques dont le père, berger, avait quitté en 1906 ses montagnes souletines pour mener des troupeaux de moutons dans celles du Nevada ; c’est dans l’Ouest qu’il avait rencontré sa future épouse originaire, elle, de Basse-Navarre. La mère de l’auteur y était partie à la recherche d’un frère et avait racheté, à la fin de la « Grande Dépression » (économique), le « French Hotel » dont elle fit une affaire familiale. 

En sociologue averti, Pierre Bidart voyait avec raison, derrière ce microcosme social, se dessiner l'histoire épique de la migration des Basques en Amérique « dans ses versants connus ou obscurs, fantasmés ou réels, dont la connaissance est aujourd'hui à peine amorcée » qui avait entraîné des cohortes d'individus arrivant matériellement démunis sur des terres inconnues, mus par le désir impérieux de la réussite. Démunis, ils l'étaient aussi culturellement pour affronter une société certes intéressée par une telle main‑d'œuvre, mais tellement éloignée des expériences acquises dans leur société d'origine.
 
Car, dans la Sierra du Nevada, « l'immensité des troupeaux et des paysages, la solitude dans le travail, les rigueurs et les contrastes climatiques suffisaient à mettre un terme aux illusions (…) même si l'exemplarité d'itinéraires professionnels était là pour attester que le travail obstiné, soutenu par une morale de l'économie, pouvait donner des résultats probants »

Et la famille Laxalt en témoignait éloquemment, avec la réussite sociale des enfants du berger : Paul, le frère de l’auteur, fut élu gouverneur du Nevada, avant de diriger le Parti Républicain et devenir le conseiller du président Reagan. 
Quant à Robert - Bob - Laxalt, il s’était illustré non seulement en tant qu’écrivain reconnu, mais aussi comme journaliste et chercheur à l’université de Reno. Il fut en outre l’un des principaux artisans du célèbre monument du berger basque élevé en mémoire de ses compatriotes (à signaler également le livre de la fille de l'universitaire, Monique Laxalt, auteur de "The deep blue memory", traduit en basque sous le titre de "Oroitzapen urdin iluna", qui restitue dans une belle prose lyrique le regard doux-amer d’une émigrée de la troisième génération sur la saga familiale ainsi que sur sa double appartenance identitaire).

Autres activités au Musée Basque

- jusqu’au 9 avril  
Histoire de Légion d’honneur et de distinctions : l’exposition-parcours chemine de tableaux en photographies, de médailles en décorations, distinctions attribuées à celles et ceux qui ont écrit une page de l’histoire du pays ou de notre territoire.
Exposition-parcours Marie Garay (1861-1953), élève de Léon Bonnat puis de Carolus-Duran, Marie Garay est la seule femme peintre de l’École de Bayonne. Elle a réalisé de nombreux portraits mais aussi des peintures de genre dans lesquelles elle a mis le Pays Basque à l’honneur.

- samedi 15 avril à 10h en français puis à 11h en euskara : visite petite enfance, "Kukurruku cherche ses amis", visite contée pour découvrir la mythologie basque. Pour les 2-4 ans. Durée : 45 min. 2,50€/enfant. Gratuit pour les accompagnants. Sur réservation.

- dimanche 16 avril à 15h : visite guidée thématique sur la mythologie basque, parcours conté sur la mythologie basque. Entrée + 3 euros. Sur réservation.

- mercredi 19 avril à 14h : visite pour les jeunes consacrée à la mythologie basque, parcours conté en français suivi de la création (modelage) d'un personnage mythologique. À partir de 5 ans. Durée : 2h. 5€/enfant. Sur réservation.

- dimanche 23 avril à 15h : visite thématique "Les corsaires du musée",arcours en basque dans la salle de la navigation à la découverte des corsaires basques. Entrée + 3€. Sur réservation.

- jeudi 27 avril à 18h Soirée littérature basque Proposée par Euskaltzaindia. Entrée libre. Sur réservation.

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