Photo de couverture : cathédrale de Bayonne, ange jouant de la chalemie (instrument à vent et anche double de la famille du hautbois, très répandu au Moyen Âge)

Nos contemporains familiers de l’informatique et du numérique connecté identifient les anges à des êtres fictifs ou virtuels, des créatures surnaturelles déjà présentes dans la pensée abrahamique des trois religions juive, chrétienne, musulmane et perse, comme des messagers invisibles qui influent sur notre perception de la vie.

Ils auraient selon les circonstances une bonne ou mauvaise influence, dans les écrits de l’Ancien Testament.

Un effet probable de la rencontre entre l’Unique et les religions assyro babyloniennes, de conflits cultuels où les forces invisibles se combattaient, se déchiraient et se neutralisaient parfois dans leurs récits mythologiques et leurs compétitions de survie.
On dirait des premiers que ce sont des anges et des autres des démons ou anges déchus, en raison du destin qui fut le leur, celui d’avoir perdu contre les plus forts !

La guerre y étant par très souvent le théâtre de ces luttes homériques du plus fort au combat au plus faible sacrifié à la guerre.

La mythologie dévoile un panorama morbide et de peu de concession de ces oppositions binaires du glaive et du javelot meurtrier.

En des récits bibliques ancrés dans l’histoire, l’ange retient la main criminelle d’Abraham portée sur son fils Isaac, mais encore dans le songe de Jacob se dresse l’échelle du paradis pour le juste, et au fil du temps se dessinent dans le panel macabre de combats infinis des figures d’archanges d’exception, Gabriel, Raphael, Michel aux vertus bienfaisantes pour les hommes condamnés à des supplices ininterrompus et punitifs.

L’Eternel se laisse penser en ces figures dites théophores sous un visage de bienfait rarement concédé par le combat meurtrier mais obtenu par la grandeur vertueuse de quelques chefs de corps d’armée de dimension supérieure.

Il y faut trouver dans ce monde dit de l’invisible des réalités souveraines que les anciens désignaient comme issus des astres célestes comme des anges des constellations inaccessibles à leur force, cependant agissantes sur leur caractère et leur comportement guerrier.

La pensée humaine ajoutera au fil des réponses de l’esprit une intelligence de ces réalités invisibles que Maimonide qualifiera de “supérieures à l’intelligence humaine.”

Le philosophe Aristote observant fidèlement des constellations du firmament, en ce qu’il pouvait en connaitre, déclarera que “de telles forces communient à l’harmonie céleste” et de toute évidence dans le parler spirituel de l’antiquité, les trois monothéismes et la pensée perse de l’Avesta désigneront dans la création qui entoure le monde des terriens soumis aux influences de forces des esprits  la preuve irréfutable livrée par toute vie naturelle contrainte à naitre et mourir, sans dérobade ni exception !

Maimonide répétera à l’infini leur caractère invisible, une nature de substance aux effets étudiés de leurs fonctions, et pour l’homme de foi tel le juif de Yom Kippour le devoir d’en célébrer l’existence au regard de l’Eternel qui permet à de telles créatures sans pouvoir les contraindre ni les empêcher, d’exercer la volonté humaine elle même !

Le testament des chrétiens ne faisant fi de cette tradition spirituelle millénaire et antérieure, évoquera l’ange si présent dans les moments de la vie publique du Maitre Jésus, “ce Dieu qui sauve”, jusqu’à ces légions d’anges qui peuplent l’imaginaire des croyants  bénéficiant de la munificence divine comme de celle d’un berger divin aux vertus inviolables.

Il y faudra croiser divers visages de l’ange depuis la naissance surnaturelle de Jésus, son chemin de la mission, ses apparitions et ses révélations aux fidèles les plus introduits à son enseignement, jusqu’à l’ange de la consolation qui à Gethsémani viendra en ressource et en soutien aux heures funestes du dernier sacrifice.

Les anciens les représenteront de blancs et non de couleurs image de l’éclair de la résurrection proche des chérubins eux mêmes de blancheur translucide, en un langage d’époque où le blanc domine en cette culture méditerranéenne sur les autres coloris de la vie, comme la révélation divine en sa pureté absolue.

Rien d’étonnant que les chrétiens puis les musulmans adoptent cette “couleur angélique” dans leur représentation de la divinité particulièrement de Gabriel, de Mikaël cependant avec une exception pour Azraël au visage morbide si peu conformé aux deux précédents.

La figure judéo chrétienne de Raphaël, l’ange qui guérit ne semble avoir de telles faveurs mystiques chez le croyant musulman parmi d’autres anges nommés mais non cités dans le Coran, à savoir le gardien du paradis pour les sauvés, et celui de la fin de vie qui intervient pour ouvrir l’accès de l’après vie bien cité dans le Coran.

Il sera rapporté que pour les trois monothéismes Dieu a créé l’ange à partir de la lumière, “djinn” par le feu, quant à l’homme par la terre !

Les anciens savouraient le relaté de ces mondes souverains et supérieurs invisibles comptés au nombre de neuf hiérarchies. On ne résiste à les citer sans pouvoir cependant les distinguer entre eux ; séraphins, chérubins et trônes pour les trois premiers ordres, dominations, vertus et puissances pour les seconds, mais enfin anges, archanges et principautés pour les trois derniers dont on définissait la particularité du genre bien subtilement !
Une telle littérature séculaire enrichit la portée de l’angéologie, une science théologique trés officielle enseignée en Sorbonne à Paris, dans les ordres religieux du Moyen Age !
Basile le Grand parle pour tout être vivant de “son ange gardien” proche en cela des humains, par leur force et les vertus qu’ils inspirent en somme des puissances spirituelles comparable à des forces invisibles influenceuses des comportements des hommes.

On s’interrogeait sur leur faculté de s’exprimer, en quelles langues pourrait-on les entendre et pouvoir les comprendre, en chaque tradition monothéiste, on avait une réponse, les musulmans comparaient leur langage à celui des oiseaux et lors des échanges passionnés des kabbalistes sur ce monde spirituel,  on se mit à déchiffrer les signes de ces messagers en des cercles de commentaires à la Renaissance par des calculs savants, ancêtres des algorithmes modernes ?

Les influences inter religieuses entre juifs, chrétiens et musulmans sur ces commentaires partagés étaient numériques.
La littérature, la peinture, la sculpture et les arts en leur ensemble s’inspirèrent en sus abondamment de cet imaginaire fabuleux.
Le monde des anges existait par eux mêmes mais leur parler et signifiance demeurait inaccessible encore pour longtemps à l’intelligence des hommes.

Avons nous progressé en ce temps sur ce sujet ?
Avons nous doublé ces imaginaires par des fictions numériques rendant plus complexe encore cet entendement ?
Les anges demeurent une énigme de la conscience humaine.
Réels ou virtuels, leur horizon est un mystère divin, leur influence certaine, leur langage préservé par leur souveraineté !