En ce jour anniversaire du décès du Cardinal Roger Etchegaray il y a cinq ans à Cambo, le 4 septembre 2019, chacun se souvient qu'en octobre 1989, il avait accompagné à Jakarta le pape Jean-Paul II dans un premier voyage papal mémorable, réitéré par le pape François et en cours.
Jakarta et l'Indonésie avec ses 17 500 îles, sa population de 180 millions d'habitants dont 97 % musulmans parmi les bouddhistes, les chrétiens, 80 millions de catholiques et davantage de protestants, de shintoïstes et de confucianistes.
"Promouvoir l'harmonie religieuse pour le bien de l'humanité" fut le Document commun signé par le Pape François et le Grand Imam de Jakarta en la Mosquée d'Istiqlal construite en 1978, aux dimensions immenses, avec ses jardins et ses dépendances.
Et reliée symboliquement à la cathédrale elle-même par un tunnel qui permet cet échange quotidien entre deux communautés monothéistes mais distinctes.
Une messe impressionnante de 80 000 personnes a réuni ce jeudi matin des membres appartenant sans doute aux deux communautés, malgré leurs origines propres, autour de ce projet commun de la fraternité religieuse au service de l'Indonésie comme rapporté en sa Constitution en 1945.
"Sous le Dieu tout puissant et sa bénédiction divine sur l'Etat et ses peuples. dans le partage de la justice sociale déjà citée en 45 et l'aide nécessaire pour les peuples environnants."
Ce thème faisant écho au texte papal Fratelli Tutti sur la Fraternité Universelle déjà mentionné au Caire, au cours d'une précédente rencontre avec le Grand Iman d'Al Azar... Car, la question du dialogue interreligieux taraude le pape François, tout comme celle des conditions atmosphériques de la Terre menaçant en ces pays la survie des populations à cause des risques d'inondations et des possibles épidémies.
La devise de l'Indonésie demeure "Plusieurs mais Un"...
"Malgré sa diversité extrême, le pays conserve le sens de l'unité, de la paix, de l'harmonie, de l'équilibre, le sens des droits humains, et cette angoisse du développement durable pour assurer la survie alimentaire d'une population nombreuse attirée par les conditions de vie en Indonésie" comme indiqué par le pape François.
"Le mandarin jésuite" ne craint de bousculer son église et le monde occidental, le nôtre, mais en le faisant, il s'inscrit dans une tradition de son Ordre toujours en perspective d'un prochain avenir pour l'Eglise.
Ainsi, jusqu'au 13 septembre prochain, le voyage du pape François, sur les traces des deux illustres jésuites, François Xavier et de Matteo Ricci, va encore se poursuivre vers le Timor oriental, la Papouasie et Singapour, pays peu connus aux yeux de beaucoup : ce sera l'occasion de parfaire nos connaissances.
Pour cet homme de 87 ans, décidé comme un pape appelé à la mission, ce voyage inédit à l'époque passablement trouble de l'histoire actuelle se déroule sous le regard de la Chine autre destination rêvée de tous les papes depuis le XIIIème siècle passé.
Or, depuis son élection à Rome, la composition du Collège cardinalice a changé, ainsi que le nombre de ses voyages asiatiques : Corée, Sri Lanka, Philippines, Birmanie, Bangladesh, Thaïlande, Kazakhstan, Mongolie. L'actuel déplacement du pape François s'ajoute à la désignation de 21 cardinaux pour l'Asie (face aux 51 pour l'Europe, 18 pour l'Amérique, 16 pour l'Afrique, et des élus aux sièges décisionnels du Vatican comme Caritas Internationalis et des dicastères de poids comme la Préfecture de l'Evangélisation des peuples attribuée à un philippin ! Puis encore le Dicastère du clergé pour un coréen...
Et les vaticanistes rapportent le travail infatigable du cardinal Parolin dans la diplomatie romaine sur le pas du cardinal Etchegaray qu'il visita à Cambo dans l'ermitage de sa retraite.
Le christianisme en Asie
L'Asie se rappelle à Rome depuis le XIIIème siècle. "Le premier délégué pontifical à avoir rencontré un souverain en Asie était perçu comme problématique, il s'agissait du Khan mongol Güyük, mais l'histoire demeura inachevée à cause de la colonisation occidentale. Le catholicisme asiatique est devenu étranger". Il met pour un asiatique en question la famille et la structure sociale dans sa hiérarchie même.
Pour une population asiatique de 4,7 milliards, les catholiques représentent 3,31 % du total. Une courbe ascendante en ce continent, en augmentation en Afrique, en baisse en Europe.
Les vocations religieuses accompagnent cette évolution en ces pays du sud global ou émergents actuels asiatiques.
Le délégué allemand de la commission des épiscopats européens souligne que "l'église s'éloigne de l'Europe, et tend vers l'Asie et l'Afrique où il y a une formidable croissance" !
- Fournissant les sources d'informations de premier intérêt, il faut citer ici l'anthropologue et théologien français Michel Chambon, connu en ces latitudes lointaines, comme un acteur de l'Université Nationale de Singapour et fondateur du réseau panasiatique de recherche sur l'évolution du catholicisme asiatique.
- On ne saurait oublier de mentionner également la théologienne Christina Kheng, spécialiste d'ecclésiologie et de gouvernance citée au Synode romain en cours.
- Dans un pays comme Singapour, les chrétiens se partagent en protestants pour les deux tiers, les catholiques pour un tiers, soit 19 % de chrétiens au total. Parmi les bouddhistes en majorité, les musulmans 15 %, les taoïstes, les hindouistes, sans compter les 20 % de sans-religion.
Au carrefour de l'Asie, de ses mobilités des populations en constante évolution à Singapour, réseau économique puissant, les chrétiens tiennent la barre comme toute minorité approuvée pour son niveau d'instruction, ses canaux et réseaux de santé et de rapports sociaux, une influence de minorité agissante et requise dans le pays.
- Pour le Timor, Michel Chambon souligne : "quand le Portugal est parti à l'heure de la décolonisation environ 20 % de la population était catholique, mais avec l'occupation indonésienne, ils étaient 97 %. Ainsi la colonisation portugaise a influencé la trajectoire religieuse du pays, mais n'explique pourquoi les catholiques sont devenus majoritaires."
- La Papouasie Nouvelle est un carrefour de chrétiens, protestants majoritaires mais 96 % du total sont de chrétiens.
200 langues des échanges œcuméniques au sein d'un Etat où la population d'indigènes domine. Les chrétiens de toutes provenances cultivent cet espace de dialogue religieux particulièrement intense à nos yeux éloignés de leurs réalités spirituelles.
- Une autre réalité comme celle de Kuala Lumpur, paysage de la diversité des origines et des histoires chrétiennes héritées de missions successives existe incarnées par des personnalités extérieures.