Pour soutenir la réfection de la Synagogue de Bayonne, le Quatuor Arnaga donnera un concert ce dimanche 24 novembre à 16h au temple israélite du quartier Saint-Esprit (35 rue Maubec). Il a inscrit au programme de ce concert - organisé avec le Consistoire Israélite et le soutien de la Ville de Bayonne - des compositeurs juifs tels que Fanny Mendelssohn, Maria Herz et Félix Mendelssohn.
On entendra ainsi le Quatuor en Mi b Majeur de Fanny Mendelssohn Hensel, née en 1805, soit quatre ans avant son frère Félix avec qui elle avait reçu la même éducation et montrait des talents comparables. Bien que jeune pianiste exceptionnelle, les coutumes de l’époque et sa propre famille n’encourageaient guère une femme à se lancer dans une carrière musicale, encore moins dans celle d’une compositrice... Pourtant, Fanny a composé des œuvres remarquables. C’est son mari qui l’encouragea à persévérer. A Rome, elle rencontra Hector Berluioz et Charles Gounod, leur laissant une inoubliable impression de musicienne accomplie. Son Quatuor en Mi b Majeur - une pure merveille – constitue une œuvre intimiste révélant une âme sensible et expressive qui dénote un remarquable talent pour la musique de chambre. Ce quatuor est composé de manière très originale (sans suivre le modèle de la structure classique du quatuor à cordes telles que les compositeurs classiques l’avaient fixée). Très en avance pour son temps, le romantisme qui s’en dégage donne une impression de bonheur et de passion contenus.
Suivront Cinq pièces pour Quatuor à cordes de Maria Herz (1928). Née en 1848, elle apprend à jouer du piano et du violon à Cologne avant de prendre des cours de composition et de voyager en Angleterre à 22 ans. Mariée avec Albert Herz - ils ont quatre enfants -, ses activités musicales (chef d’un chœur d’hommes et compositrice) seront ralenties pendant la Première Guerre mondiale car son mari doit travailler pour l’armée. Son activité de femme compositrice est difficilement reconnue car les femmes ne sont que difficilement acceptées comme leurs confrères masculins, c’est la raison pour laquelle elle signe ses œuvres en mettant en avant le prénom de son mari : « Albert Maria Herz ». Malgré toutes ses responsabilités, elle parvient à écrire une vingtaine d’œuvres pour orchestre, voix, piano, clavecin et quatuor à cordes. Deux grands quatuors de l’époque de l’entre-deux guerres, le Quatuor de Budapest et le Quatuor de Rome, créent ses œuvres pour quatuor à cordes. Entre 1920 et 1935, de très célèbres solistes tels que Gregor Piatigorsky, Emanuel Feuermann, Gasparo Casado et le très grand chef d’orchestre Otto Klemperer ont joué ses compositions. Lors de la montée du nazisme, elle fuit en Angleterre en 1935 et ira s’établir plus tard aux USA. Elle mourra à New York en 1950.
Les cinq pièces Opus 5 pour Quatuor à cordes sont de véritables petits bijoux : telles des « bagatelles », elles sont concises et décrivent une atmosphère très caractérisée les unes des autres. Elles ne sont pas éditées et les musiciens ont dû recréer leur propre partie.
Quant au Quatuor Opus 13 de Félix Mendelssohn, il est révélateur du temps passé par le compositeur à étudier les quatuors à cordes de Beethoven. Entre 1823 et 1847, il s’essaya à maîtriser l’art si difficile de la composition pour le quatuor et il s’inspira surtout du quatuor Opus 132 de Beethoven pour réaliser son Quatuor Opus 13. En 1827, Beethoven meurt ; cette disparition lui inspire un lied : « Ist es wahr » dont il reprendra le thème dans le premier et le dernier mouvement de ce quatuor. Mendelssohn écrivit à son ami Lindblad : « Le lied a fourni le thème du quatuor. Tu le reconnaîtras dans les notes du premier et du dernier mouvement, mais il parle dans les quatre mouvements. S’il te déplaît à la première écoute – ce qui peut bien arriver – rejoue-le, et si tu trouves quelque chose qui ressemble à un menuet, pense alors au raide et cérémonieux Félix, ton serviteur, engoncé dans sa cravate » ! Ce quatuor fut publié en 1830 et il fut créé à Paris en 1833 par le célèbre Quatuor Baillot puis donné en public pour la première fois, deux jours plus tard à Berlin. Mendelssohn utilise des contrastes, des transitions, des nuances, des motifs et des formes comme chez Beethoven. Cela donne une grande force à toute cette œuvre magistrale en même temps qu’il s’en dégage une grande poésie et un charme délicat.
Rappelons que dès sa création en 2004, le Quatuor Arnaga fut constitué de professeurs du Conservatoire à Rayonnement Régional Maurice Ravel de Bayonne, également solistes à l’Orchestre Symphonique du Pays Basque (OSPB). Il s’est donné pour mission de défendre le grand répertoire du quatuor à cordes du XVIIIème siècle à nos jours, de Haydn et Mozart à Stravinsky, Ohana ou Bacri, tout en y incluant des compositeurs méconnus ou peu joués, tels Ermend Bonnal, Çabalette Durosoir et Sendrez, ainsi que des auteurs basques (Arriaga, Isasi, Usandizaga, Sorozabal, Guridi, etc.). Le Quatuor Arnaga offre également des programmes musicaux pédagogiques. Les œuvres sont commentées, présentées par des experts reconnus dans des domaines aussi variés que la littérature, la poésie, le chocolat, les parfums, l’histoire, …
Dimanche 24 novembre à 16h, à la Synagogue de Bayonne, entrée : 25 € ou gratuite pour les étudiants et les moins de 18 ans. Réservation au tél. 06 80 43 67 06.