Ce sont, chaque année, plusieurs cars de fidèles bayonnais et boucalais qui se rendent en pèlerinage à Notre-Dame de Buglose le 8 septembre (fête de la Nativité de la sainte Vierge), en raison d’un vœu fait lors d’une épidémie de choléra qui avait affecté la région. Particulièrement en 1856, l’épidémie s’était répandue à la faveur d’inondations catastrophiques et avait emporté plusieurs milliers de personnes, dont la mère du violoniste Sarasate qui l’accompagnait au conservatoire de Paris… Ce vœu avait été fait pour cent ans, mais le chanoine Paul Sarcou, responsable des pèlerinages dans le diocèse de Bayonne se souvient que lors de sa nomination à la paroisse de Saint-Esprit, il lui avait été demandé de continuer cette tradition malgré l’écoulement du délai de cent ans depuis la formulation du vœu. C’est dire l’attachement des fidèles bayonnais à ce lieu de pèlerinage très ancien situé sur la rive droite de l'Adour, à 12 km de Dax.
Une origine miraculeuse
Cette année, le diocèse d’Aire et de Dax dans les Landes célèbrer les 400 ans de la découverte de la statue de la Vierge de Buglose, devenu depuis un haut lieu de la piété populaire.
L’histoire débute avec Jeanne d'Albret : désireuse d’éradiquer le catholicisme après avoir embrassé la foi réformée, la reine de Navarre avait ordonné la destruction des oratoires champêtres. Vers 1570, les catholiques dissimulèrent alors dans un marais voisin – afin de la sauver - la statue de la Vierge attachée à l’ancien oratoire de Notre-Dame de Buglose dont la vénération était très ancienne, remontant sans doute au XVème siècle.. D'après la tradition, en 1620, un berger, aperçut qu'un des boeufs qu'il gardait, léchait obstinément une sorte de masse enfoncée dans la vase et cachée par les joncs. C'était la statue de la Vierge !
L'évêque de Dax, Mgr du Sault, voulut porter la Vierge à l'église paroissiale de Pouy. Les boeufs destinés au transport n’avancèrent pas et le char resta immobilisé : c’était le signe de la volonté divine, Notre-Dame voulait rester à Buglose…
Dans un livre intitulé « Histoire de Notre-Dame de Buglose et souvenirs du berceau de Saint-Vincent-de-Paul » publié en 1857, l'abbé Labarrière relate que le 16 mai 1623, Bernard Ducassou vint avec sa mère, Adrien de Laporte son curé, et de d'autres personnes. Sa jambe gauche était percée de sept ulcères purulents. Arrivé à Buglose, il passa la nuit en prière avant de se laver à la fontaine le lendemain. Aussitôt, les ulcères se sont fermés.
Une chapelle fut érigée en 1662 en présence d'une foule considérable et on compta cette année-là dix-neuf miracles reconnus.
Une église fut construite en 1864, consacrant dans ce sanctuaire landais la dévotion mariale. Mgr Delannoy, évêque d'Aire et de Dax, s'attacha ensuite à embellir la basilique. En 1878, il obtint du Pape que Notre-Dame de Buglose soit proclamée patronne du Diocèse.
La « Machine à Carillonner »
En 1877, arriva sur le siège épiscopal d'Aire un évêque venu du Nord, originaire de Templeuve : Mgr Delannoy avait la nostalgie des carillons de sa Flandre natale. En effet, la Belgique et le Nord de la France s'honorent de posséder les plus beaux carillons. Il considérait que l'église de Buglose était le plus beau fleuron de son diocèse. Il fit donc construire deux tours : la tour nord, pas très haute, massive et carrée ; et la tour sud, très haute, à trois étages. Les historiens connaissent l'acharnement que mit cet évêque ainsi que le supérieur des Missionnaires, pour obtenir un carillon. Les longues et fréquentes correspondances avec la Maison Paccard en témoignent.
Le 8 septembre 1894 furent bénites les quatre premières cloches, en particulier la cloche Notre-Dame de Buglose (qui sonne le fa 4) faisant partie de la première coulée à la fonderie Paccard, le 27 mars 1894. Elle fut aussi la première baptisée par Mgr Delannoy le 8 septembre 1895 avec les autres cloches "du branle", soit un carillon de 23 cloches, doté dés l'origine d'un clavier singulier, inventé par le chanoine Maisonnave, nommé "la Machine à Carillonner".
On sait que la plupart des carillons de Belgique et du Nord de la France sont actionnés par un clavier à touches de bois dites "coups de poing" ou "manches de brouette", reliés directement aux battants au moyens de câbles et de fils de fer. L'avantage que présente ce système - mais il est de taille - c'est de permettre à l'artiste toute la gamme des nuances, depuis le pianissimo jusqu'au fortissimo, exactement comme sur un piano. Entre la cloche et lui, pas d'autre intermédiaire que le fil de commande qu'il peut tirer plus ou moins fort, au moyen de la touche du clavier. Par contre, l'effort musculaire exigé est si considérable que les gouttes de sueur perlent au front de l'exécutant. D'ailleurs, ne s'improvise pas carillonneur qui veut. Il y faut toute une formation que l'on reçoit dans des écoles particulières auprès de maîtres spécialisés. Cette « Machine à Carillonner" fut d’ailleurs présentée à l'Exposition Universelle de Paris en 1900.
Depuis sa mise en place dans la tour, aucune modification n'a été apportée à la mécanique. Seul, un modèle à cadre de fer a remplacé celui à cadre de bois. Depuis un siècle, le carillonneur s'assied devant le même clavier ; sans la moindre peine, avec l'aisance du pianiste sur son instrument, ses doigts enfoncent les touches d'ivoire ; les leviers commandés par elles déclenchent un ressort qui jette, à son tour, le marteau contre la cloche. Alors paraît l'ingénieux du système : le battant n'a pas plutôt frappé le bronze qu'il est ramené, instantanément, à sa première place, grâce à une application du principe des plans inclinés et à la force conjuguée d'une puissante roue dentée. Et la sensibilité de la transmission est telle que la mélodie peut recevoir ici, un accompagnement et se prêter, dans ses variations infinies, à toutes les fantaisies d'un virtuose. Que nous voilà loin de la gymnastique épuisante des bras et des jambes sur les touches de bois !
Le bourdon a été installé en 1901. Il pèse 2 100 kg et donne le Do. Les cérémonies d'installation et de bénédiction ont duré deux jours : 9 et 10 mai 1901. Les autres cloches seront commandées au fur et a mesure que l'on trouvera des fonds nécessaires. Par la suite il y aura deux ou trois autres arrivages. Durant l'été 1923, il en arrive encore trois parmi les plus grosses, fondues dans les ateliers de la Maison Dancausse à Tarbes. Enfin, en 1926, 31 nouvelles petites cloches complètent le carillon qui en compte 60 en tout et 34 touches au clavier.
Les lazaristes assurent la charge d'entretenir le sanctuaire et l'organisation des pèlerinages depuis près d’un siècle. Des prodiges et des miracles se multiplièrent durant des années, de nombreux infirmes trouvant la guérison en ce lieu béni.
A noter encore que Saint Vincent de Paul (1581-1660) était également né à quelques kilomètres de là : « Les évêques d’ici ont coutume d’assurer que la tête du diocèse est à Dax, tandis que son cœur est à Buglose ». Une belle image pour symboliser ce lieu fédérateur, et de profond ressourcement spirituel.
- Prochaines auditions du carillon : 20 et 27 août, 3, 17 et 24 septembre. Chaque séance se compose d’un exposé d’une durée d’une demi-heure expliquant le fonctionnement et les particularités de ce carillon, puis d’un concert d’une durée de trois-quart d’heure (soit de 15h30 à 16h45).
- Renseignements : nd-buglose.diocese40.fr