Alors que le pèlerinage de Pentecôte à Chartres connaît un succès inégalé (16.000 fidèles, un record, essentiellement des jeunes, alors qu’en sens inverse, celui ralliant Chartres à Paris en a rassemblé environ 5.500), sans atteindre évidemment ces chiffres, le Pays Basque n’est pas en reste comme en témoigne le pèlerinage du lundi de Pentecôte à Notre Dame d’Oilandoi qui domine la vallée de Baigorri avec bénédiction des pâturages et vignes alentour, ainsi que cette chronique de l’Abbé François-Xavier Esponde :
De mémoire de bergers du lieu, de marcheurs et de pèlerins la chapelle de Notre Dame de l’Aubépine attire la foule chaque année.
Exit covid oublié, les visiteurs du jour reviennent de la région jusqu’à Saint-Jean-de-Luz, Espelette, Itxassou, Ainhoa Dancharinea, de la Navarre voisine et bien d’au delà.
Une marche précède “la montée des marches de la Croix” et de la madone, Aranxako Ama portée par des bras vigoureux, le nouveau curé Jean-Paul Martinon égrenant le chapelet et les chants de la procession.
Un décor féerique et bucolique de mai tous les ans où la nature luxuriante, le chant des cours d’eau, des oiseaux et de vautours qui dominent du ciel toisent la montée des pèlerins. Le cadre écologique et naturel prédomine sur toute autre considération.
On vit nature et dans un environnement naturel que la commune préserve en l’état !
La chapelle admirablement restaurée par les Amis de la Chapelle d’Axulai est ornée de peintures murales, de statues, dans un dépouillement volontaire, sans fioriture ni ajout démonstratif surnuméraire. On dit qu’un artiste peintre de renom y a laissé son empreinte sur une oeuvre sise dans le lieu saint.
Pas d’électricité in situ, la sobriété monacale du site, une production électrique a minima pour la sonorisation du jour, une ambiance bon enfant rappelant la bergerie traditionnelle du pays où la vie se déroule du lever de lumière au coucher sans bruitage d’aucune sorte.
On se souvient encore que le curé Roger Idiart avait fait ajouter la statue imposante en bois massif de la madone. Elle siège à l’angle de l’entrée de la chapelle, auréolée de roses rouges, et de fleurs de saison pour ce jour de la solennité.
Rappelant les rogations du temps de Pentecôte, les bénédictions du Ciel pour éviter les menaces de grêle, de maladies sur les animaux et les hommes pleuvent comme des incantations de la prière, et tout un chacun se transporte à l’heure de la messe dite en basque jusqu’à la chapelle urbi et orbi hors les murs, de gens assis ou debout selon les années.
L’homélie du jour du pasteur curé de nombres d’églises alentour fixa l’intérêt des présences sur le lien de Pentecôte et de Marie aimante de toute passion humaine, douloureuse souvent, portée en ce lieu par tout un chacun comme un voeu confié à Notre Dame de l’aubépine.
“Marie de toute croix portée dans le silence de la prière, qui rassemble tous les siens dans une église qui naît toujours au pied de la croix d’un esprit partagé entre tous, d’un petit reste qui ne cesse de rayonner au delà.”
Le cadre alentour aménagé par la commune permet de collationner en famille, on y voit des groupes d’amis constitués avec leur musette bien garnie, partager après les dévotions les ressources d’un pique nique convivial, arrosé de quelques bouteilles, dont certaines n’ont eu peine à franchir la frontière de Dancharinea proche.
Les chroniqueurs du passé racontent qu’en ce lieu un ermite, venu de l’autre côté selon les époques de l’histoire réunissait ses amis lorsque les circonstances en Navarre bruissaient de sons des canons de guerres et en France de révolution.
On prétend que des échauffourées sanglantes se déroulèrent sur ce sommet jadis, laissant aux témoins le soin de rappeler la mémoire de ces sacrifices humains, quasi oubliés désormais.
Napoléon et ses soldats passant la frontière, les révolutionnaires français précédemment n’épargnèrent pas la chapelle, brûlée, incendiée, rebâtie et sans cesse mise au goût du jour.
L’âme paysanne des Basques aime à se replonger dans cet imaginaire collectif qui ne s’éteint avec le temps et se revigore sans cesse quand les circonstances exigent que la vie surmonte la mort et ses sombres avatars de l’histoire !
Terre de passage, de contrebande sans doute, Aranxako Ama porte dans son coeur bien des amertumes passées des autochtones et des espoirs de meilleure augure qui réunissent en cet endroit les amoureux de l’histoire, et des nostalgies de souvenirs !