Napoléon dessina le profil de la Nation en France pour sa postérité. En ce bicentenaire, les rappels historiques ne manquent pas, se rapportant à la vie l'action et au dessein de ce génie de l’esprit qui tenta d'apporter de la modernité, une respiration et de l’avenir à un pays sortant des méandres de la révolution française.
On en oublierait presque, parmi bien d’autres plans en cours, législatif, politique, juridique et économique, le modèle civil du Catéchisme impérial à l’usage des enfants de l’Empire, assurant leur éducation patriotique comme le voulait Napoléon.
L’enseignement moral et civique créé par la Convention Nationale avait disparu sous l’Empire, il fallait y remédier. Napoléon en assura la direction de sa rédaction.
On lui prêta le chapitre sur les devoirs civils de tout citoyen instruit de l’empire, selon les chroniques du temps.
Depuis l'origine Napoléon se méfiait des effets induits de la révolution sur la jeunesse : il pressentit l’urgence d’une instruction avec ses codes en faveur d’une nouvelle génération de jeunes citoyens formés à l’éducation civique. L’empereur ne croit guère à “l’école” qualifiée de chimère et d’utopie, du pur Abbé Saint Pierre dans le texte...
Selon ses dires, la religion inculque aux masses la soumission, la discipline, le sens de la hiérarchie. Le propre du clergé est d’éduquer le peuple, à charge pour le gouvernement civil d’en contrôler le contenu.
L’Empereur inscrit sous ce premier décret de l’Empire, l’enseignement civique et moral dénommé "Catéchisme Impérial" et paru en 1806 à l’usage de toutes les églises catholiques de l’Empire français.
Le premier Décret est signé par l’Empereur lui même, ce 4 avril 1806. Il s’agira du seul catéchisme en usage dans toutes les églises catholiques, comprenez que les manuels existants, dont ceux des Gallicans ou des Ultramontains, seront bannis ou non reconnus et relégués par l’autorité impériale.
L’article 2 mentionne la durée de ce manuel, de dix ans..
Le 18 août 1806, l’archevêque de Paris, le cardinal de Belloy, donnera son accord appuyé et flatteur à l’adresse du programme de l’Empereur : “Les devoirs des sujets envers les princes y sont expliqués, parce que les circonstances des temps où nous vivons ne ressemblent point à celles des temps qui ont précédé.
... Les chrétiens n’ont jamais craint de déclarer leurs sentiments envers les puissances établies par Dieu pour régir le monde.
Enfin notre - très cher fils - le Prince, qui règne sur la France est loué d’avoir rétabli dans les circonstances difficiles, le culte public de la religion de nos pères parce qu’un tel courage mérite d’entendre nos hommages”...
Il est juste de consigner dans les fastes de la religion à côté de Constantin le nom de l’Empereur protecteur de la religion véritable.
Ce catéchisme définira dans l’agencement de ses chapitres les devoirs des enfants envers leur père et mère, selon la hiérarchie des rôles et des fonctions de chacun.
“De l’église, du pape, des évêques, des pasteurs comme ceux des monarques civils, des princes et des magistrats. Les chrétiens donneront à l’Empereur amour, respect, obéissance, fidélité, service militaire, paieront tributs pour conserver et défendre l’Empire et son Trône.
Ils diront leurs prières rendues à l’Empereur pour le salut et la prospérité spirituelle et temporelle de l’Etat.
Dieu a rendu l’Empereur dispensateur des dons, de paix, de guerre sur la terre. Il en demeure le ministre et l’image de sa puissance sur ses sujets.” Dieu et l’Empereur se donnent selon cette image et ce retour.
Notre Seigneur, souligne encore le Cardinal de Paris, selon l’Edit de l’empereur César-Auguste, a ordonné de rendre à Dieu ce qui est à dieu, et à l’Empereur ce qui est à l’empereur.
... Les circonstances particulières du choix de l’empereur justifient ce culte. Il demeure l’Oint de dieu par consécration du souverain pontife. Il restaure le culte public de la religion sainte de nos pères et en est le protecteur, ramenant et rétablissant l’Ordre public par sa sagesse et la Défense de l’Etat par son bras puissant..
Que dire des sujets qui n’accepteraient cette obéissance civile ? Car le devoir de soumission aux préceptes contenus dans ce livre appellent fidélité à l’empereur et à sa famille comme à tous ceux qui, tels les magistrats, seront désignés dépositaires de l’autorité de l’empereur et priés de s’y conformer.
Le propre du catéchisme civil étant de conforter l’obéissance aux supérieurs, d’inculquer l’honneur, le respect, ne jamais leur nuire et en dire du bien...
Quant aux infidèles, il leur sera proféré l’excommunication, et pire encore, la damnation éternelle !
Cependant pas de préjudice matériel ni d’exil mais le sort réservé aux damnés de la terre pour les récalcitrants.
A Rome le dossier du catéchisme rencontra une lecture peu bienveillante de son contenu.
Mais les circonstances et le Concordat de 1802 exigeant de la prudence, on évita de rejeter le catéchisme et l’ouvrage obtint de l’Archevêque de Paris sa bénédiction flatteuse et le soutien fervent de l’épiscopat français.
Napoléon connaissant les démêlés en l’état au sein de l’Eglise catholique entre courants divergents, savait d’aventure pouvoir obtenir l’appui du haut clergé et du clergé de son catéchisme objet de discussions et de délibérations diverses.
Ce catéchisme ne survécut guère à la fin de l’Empire, mais il définit un enjeu moral et civil inédit en faveur d’une éducation de la jeunesse, pour une France traversée de régimes politiques contrastés et divisés.
D’aucuns s’en inspireront un jour plus tard, dans leurs manuels laïcisés de l’instruction civique, directement inspirés du Catéchisme impérial de Napoléon !